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Grosse frayeur pour Geoffrey quand ses voisins ont rallumé le chauffage: comment éviter les dangers liés au CO, ce "tueur silencieux"?

On commence à rallumer les chauffages et les installations, qui ont dormi tout l'été, peuvent être encrassées, mal entretenues, et provoquer des dégagements de monoxyde de carbone (CO). Les pompiers se retrouvent alors sollicités pour secourir des personnes intoxiquées. Comment éviter cela, et quand s'alerter? Nous vous proposons un topo avec l'arrivée des températures plus fraîches.

Geoffrey nous a contactés pour nous faire part de ce qu’il a vécu le samedi 3 octobre dernier dans son habitation de la rue de Namur à Wavre. "Les voisins ont rallumé leur chauffage et de la fumée sortait par notre plafond dans notre maison. Les pompiers sont intervenus et ont fait évacuer les deux habitations qu'ils ont ensuite ventilées", écrit-il via la page Alertez-nous. Nous avons joint les pompiers de Wavre, qui nous ont confirmé cette intervention.

Plus de peur que de mal, même si, comme le dit le capitaine Bécret, "on n’a jamais de chance quand on doit appeler les pompiers". Le dégagement de monoxyde de carbone (CO) n’a pas nécessité d’hospitalisation, seule une personne s’est rendue à l’hôpital, de son propre chef, pour faire un contrôle, nous explique-t-il.

Les températures baissent sérieusement et le capitaine reconnait que quand il commence à faire froid, la caserne est sollicitée pour des dégagements de CO: "Il y a des problèmes quand les chaudières ou les chauffe-eau sont mal ventilés. Si le brûleur ne brûle pas bien l’air, on peut avoir un dégagement de CO", explique-t-il. Il se peut aussi qu'une cheminée soit obstruée, par un oiseau qui a fait son nid, par exemple. Les fumées blanches, elles, étaient probablement dues à la condensation. Par exemple, de la fumée peut se former lorsqu'on allume une cheminée et qu'elle n'a pas encore atteint une certaine température.

Eviter le pire

Qu'ils soient issus du milieu médical ou de celui des installations de chauffage, les professionnels attirent l'attention sur la prévention. Dirk Peytier est le président national d'ICS, l'association professionnelle des installateurs en chauffage central, sanitaires, climatisation, et des professions connexes: "Quelle que soit l’utilisation, il faut toujours bien dégager les ventilations, pour qu'il y ait une bonne aération, et bien faire entretenir son appareil. A Bruxelles, c’est tous les trois ans. La plupart des fabricants conseillent tous les deux ans, certains même un contrôle annuel". 

Si vous le souhaitez, vous pouvez réaliser un petit test simple avec les vieilles chaudières, les cheminées ou encore les chauffe-eau dans les salles de bains. "Si vous mettez un miroir à côté de la cheminée, ou un endroit où vous pouvez passer votre main, et qu'il y a de la condensation sur le miroir, c’est qu’il y a un refoulement de gaz", explique-t-il. 

Chauffe-eau, feu ouvert, poêle à charbon, chauffage au mazout... Chaque habitation est différente. Le centre antipoison a développé un site internet très complet et détaillé qui permet de se renseigner sur ce qui doit attirer votre attention en fonction de l'installation qu'il y a chez vous. 

Il existe également des détecteurs de CO, de différentes gammes de prix, commençant à 30€. S'ils constituent un moyen supplémentaire de vigilance, leur taux de fiabilité reste aléatoire, et ils n'empêchent pas le monoxyde de carbone de se former. "Le placement de détecteurs CO ne vous dispense pas d’observer les autres mesures de prévention (installation correcte, entretien régulier des appareils et des cheminées)", rappelle le centre.



Quand s'inquiéter?

Le CO est un gaz inodore, incolore et insipide, qui ne peut pas être détecté par l’homme mais qui peut pourtant causer sa mort. On l’appelle pour cette raison le "tueur silencieux". Marijke Fortuin est médecin au centre antipoison, où elle est responsable du registre des intoxications au CO. En 2014, le centre antipoison a répertorié 387 accidents et ils ont touché 841 victimes. 22 d’entre elles sont mortes suite à une intoxication. Le médecin nous explique quels sont les signes d’une possible intoxication au monoxyde de carbone. 

"Les premiers signes sont très vagues. Ce sont des maux de tête, un vertige, un peu de fatigue, chez des enfants souvent des problèmes digestifs (douleur au ventre et vomissement). On doit s’alerter surtout si plusieurs personnes qui sont dans la même pièce développent ce genre de symptômes et qu’il y a une installation qui peut y donner lieu. Lorsqu’on a un chauffage central avec une chaudière loin de l’habitation il y a peu de chances que ce soit ça, c’est surtout lorsque c’est un poêle individuel qui chauffe une pièce, où dans une salle de bain où il y a un chauffe-eau".

Comment réagir?

Que faire si vous soupçonnez une intoxication au monoxyde de carbone ? "Dès qu’on soupçonne qu’il s’agit de CO, ça devient critique, parce que la concentration continue à augmenter. A partir d’une certaine concentration, la personne devient inconsciente et trop faible pour pouvoir réagir. La réaction doit être immédiate. Arrêtez l’appareil en question et ouvrez les portes et fenêtres", explique le docteur Fortuin.

Si vous arrivez sur les lieux d’une possible intoxication, surtout, n’entrez pas dans la pièce. "On ouvre les portes si possible mais il ne faut pas entrer parce que la personne qui veut secourir va s’intoxiquer elle-même". Appelez le 112: les pompiers, eux, auront de quoi se protéger. "Ils ont un masque avec une réserve d’air, ils respirent de l’air d’une bombe comme les plongeurs".

Intoxication au CO: qu'est-ce qui se passe dans le corps?

Car ce qui se passe, lorsqu’une personne est intoxiquée au CO, c’est que celui-ci va prendre la place de l’oxygène dans le sang. "Le CO a une structure moléculaire qui ressemble beaucoup à la structure de l’oxygène, et se lie à l’hémoglobine dans les globules rouges, et a pour effet de diminuer la quantité disponible pour les tissus. Les plus sensibles vont être le cerveau et le cœur, qui consomment le plus d’oxygène, c’est pourquoi on aura vite des symptômes comme des maux de tête et du vertige".


Comment ça se soigne?

D’après les pompiers de Wavre, le dégagement de CO survenu dans la rue de Geoffrey n’a pas nécessité d’hospitalisation. "Si les maux de tête disparaissent tout de suite lorsqu’on sort, ce n’est pas nécessaire d’être ausculté, mais une personne qui a perdu conscience, de même que les femmes enceintes et les enfants qui sont plus sensibles, doivent toujours être auscultés", indique Marijke Fortuin. 

Lorsqu’une personne perd conscience, elle sera emmenée à l’hôpital où on lui donnera de l’oxygène. "Selon la gravité du cas, on va donner l’oxygène avec un masque, dans n’importe quel hôpital, ou emmener le patient dans un centre de médecine hyperbare, où il va recevoir une cure d’oxygène dans un caisson où la pression est trois fois plus élevée que la normale".

Deborah Van Thournout 

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