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Le carrefour Léonard est l'ENFER des navetteurs venant à Bruxelles: peut-on espérer une amélioration dans les années futures?

Le carrefour Léonard est un des pires noeuds du réseau routier belge. Chaque matin, ou presque, ce croisement entre le Ring de Bruxelles et l'autoroute E411 est à l'arrêt. C'est la Flandre qui doit en assurer la gestion, mais depuis 2004, c'est le statu quo. Quand les milliers de navetteurs qui passent quotidiennement par ce carrefour pourront-ils jouir d'un échangeur digne de ce nom ?

"J’habite à Overijse depuis pas mal d’années et je suis confronté au quotidien au fameux carrefour Léonard. Je pars à 6h20 tout les matins. Aujourd'hui, à cette heure-là, quelle ne fut pas ma surprise de voir le Léonard à l’arrêt. Même pas à allure modérée. Vraiment à l'arrêt", s'est insurgé un témoin via notre bouton orange Alertez-nous.

Et il est vrai... qu'il n'a pas tort. Même les personnes qui ne savent pas où il se situe "connaissent" le carrefour Léonard, tant ce nom revient régulièrement dans les infos trafic. Mais pourquoi ? Qu'est-ce qui fait que cet échangeur qui assure la liaison entre la capitale et une partie du Brabant wallon, et, plus loin, les provinces de Namur et du Luxembourg soit devenu la bête noire de bon nombre de navetteurs ?


Quand a été créé ce carrefour ?

Remontons aux origines du "Léonard". Et autant dire qu'il faut faire un sacré saut dans le passé, car c'est dès la création de la Belgique (1830) qu'il a été décidé de créer un carrefour entre la chaussée de Wavre et un chemin qui reliait Waterloo à Tervuren.

Ce croisement a été baptisé carrefour Léonard bien plus tard, en 1983, lors de l'inauguration du second tunnel sous le carrefour. Le nom a été choisi en souvenir de Léonard Boon, qui a tenu un estaminet dans sa roulotte de 1884 à 1912 à cet endroit.


Qui est responsable de cet échangeur ?

À la suite de l'accord du 17 juin 1991 entre les trois Régions de Belgique sur les routes dépassant les limites régionales, le carrefour Léonard est géré par la Région flamande.

Le ministre flamand de la Mobilité, Ben Weyts (N-VA), a décidé de débloquer 5 millions d'euros pour que "De Werkvennootschap" (agence qui gère la coordination des projets flamands pour la Mobilité) réalise une étude sur l'amélioration de la circulation sur le Ring de Bruxelles. Le carrefour Léonard y est repris, de même que les Quatre Bras de Tervuren.

Mais ne nous réjouissons pas trop vite. En 2006, une étude ciblée avait déjà été réalisée pour résoudre ces problèmes mais à l'exception de l'Ecoduct de Groenendaal (dont le chantier s'est achevé récemment), elle est restée lettre morte.


Dernière évolution en 2004: les croisements en surface ont été supprimés

Les dernières modifications réalisées au carrefour Léonard datent de 2004. A cette date, tous les croisements en surface ont été supprimés pour plus de fluidité mais aussi pour la sécurité. Changement majeur pour les automobilistes: impossible de s'engager sur le Ring direction Waterloo en venant de Namur, et impossible de s'engager sur le Ring direction Zaventem en sortant de Bruxelles. Dans les deux cas, il faut aller à la sortie suivante, faire demi-tour, et repartir dans l'autre sens.


Quelles routes "reliées" par le Léonard ?

Quelles sont aujourd'hui les possibilités offertes aux automobilistes dans cet échangeur?

  • En venant du Ring de Bruxelles, il est possible, dans les deux sens, de bifurquer sur la E411 direction Namur, ou direction Bruxelles en entrant dans la capitale via Auderghem. Il est également possible de rester sur le Ring en passant sous le carrefour Léonard.
  • En sortant de Bruxelles, les automobilistes peuvent passer sous le Léonard (sous le Ring du coup) et se diriger vers le Brabant wallon et Namur. Ils peuvent aussi bifurquer à droite en surface, direction Waterloo. Comme indiqué plus haut, impossible par contre, depuis 2004, de prendre à gauche et de prendre le Ring dans l'autre sens, vers Zaventem.
  • En entrant dans Bruxelles, on a deux possibilités: soit passer sous le Léonard et entrer dans la capitale via Auderghem, soit tourner à droite et prendre le Ring direction Zaventem. Pour ceux qui souhaitent se lancer sur le Ring direction Waterloo, il faut, depuis 2004, s'engager sur le Ring vers Zaventem, rouler approximativement un kilomètre jusqu'aux 4 bras de Tervuren, et y faire demi-tour.

C'est sûr que cela ne se modifie pas d'un coup de baguette magique

Quel est le plus gros problème ?

Le principal souci du carrefour se pose le matin pour les navetteurs qui viennent du Brabant wallon et s'engagent sur le Ring de Bruxelles. Venant de la E411, leur itinéraire est réduit à deux bandes avant de prendre un virage à 90 degrés et de se lancer sur le Ring... où la circulation est déjà parfois sérieusement ralentie.

Inévitablement, cela génère de fameux ralentissements. "Ce sont des carrefours d'un autre siècle, d'un autre temps, qui ont été conçus à une période où la densité du trafic était loin d'être ce qu'elle est aujourd'hui. Mais vu le nombre de gens qui y passent et l'importance du croisement qui est une grosse porte d'entrée dans Bruxelles, c'est sûr que cela ne se modifie pas d'un coup de baguette magique", indique Benoît Godart, porte-parole de l'institut Vias.

En fin de journée, c'est un peu la même galère, mais dans l'autre sens. Les navetteurs qui rentrent vers la Brabant wallon quittent le Ring pour prendre la E411. Cela provoque des files qui se répercutent souvent sur le Ring de Bruxelles, noir de monde du carrefour Léonard à Zaventem aux heures de pointe du soir.


Le bon comportement en arrivant à Léonard: "Inutile de changer de bande au dernier moment"

Pour fluidifier au mieux la circulation et faire en sorte que tout le monde passe plus rapidement, il y a bien un comportement à adapter, inlassablement répété mais si peu exécuté: "Ralentir, cela ne se fait pas en un coup. A l'approche du carrefour, il faut baisser sa vitesse progressivement. Cela évite les coups de frein qui, plus loin, se transforment en bouchons. Aussi, inutile de changer de bande au dernier moment. Vous allez gagner quoi ? 10, 15, 20 secondes ? Par contre, derrière vous, vous allez faire perdre beaucoup plus de temps à tout le monde. Et si vous avez du mal à vous intercaler, vous allez même peut-être générer un embouteillage. Cela n'a aucun sens de faire ça", explique Benoît Godart.


Peu d'accidents graves, mais beaucoup de temps pour évacuer les véhicules

Comme tout point où la circulation est dense, les accrochages sont assez nombreux dans le carrefour Léonard. Par contre, les accidents graves y sont rares. Un seul en 2014, deux en 2015, et aucun en 2016. "Il n'y a pas énormément d'accidents dans le carrefour Léonard, et quand il y en a un, ce n'est généralement pas si grave. Maintenant, il y a du trafic tout le temps là-bas, c'est un gros point noir en termes de mobilité, donc les vitesses de passage ne sont pas trop élevées. Ce qui explique en grande partie que ce n'est pas un point noir au niveau de la sécurité", ajoute Benoît Godart.

C'est vrai que les services de dépannage mettent du temps pour arriver sur place

Puis il y a aussi des pannes, et des voitures à évacuer. Des voitures qui restent longtemps sur place, et qui génèrent de nouveaux ralentissements. "C'est vrai que les services de dépannage mettent du temps pour arriver sur place. Là-bas ou parfois ailleurs. Je pense que le problème, c'est qu'il faut y accéder, et comme pour tout le monde, ce n'est pas évident vu la densité du trafic. Alors une dépanneuse peut parfois utiliser la bande d'arrêt d'urgence, mais sur la E411 c'est compliqué car elles sont souvent entravées à proximité des entrées et sorties sur autoroute", précise Benoît Godart.


Des améliorations en vue ?

Les bourgmestres des communes environnantes ont, dès 2016, appelé la région flamande à prendre ses responsabilités. Il faut dire qu'à force de faire la file, et voyant les heures de pointe "s'étirer" de 6h30 à 9h30, les automobilistes cherchent des alternatives. Overijse, Tervuren, Hoeilaart, Huldenberg, La Hulpe et Rixensart se plaignent ainsi d'un déplacement du trafic vers leurs voiries communales.

Mis sous pression par l'opposition, le ministre de la Mobilité en région flamande, Ben Weyts, s'attend à ce que l'étude commandée soit achevée d'ici... trois à quatre ans. Il n'y a donc rien à espérer avant 2021, voire 2022. Mais ensuite, il faudra que le budget soit débloqué pour appliquer les résultats de ces études, ce qui n'est pas garanti, Ben Weyts ayant déjà indiqué qu'il "espère qu'il disposera des ressources financières nécessaires".


Les travaux ralentis par les querelles communautaires ?

Incrédule face à la réalité du terrain au carrefour Léonard et à l'absence de réactions politiques, notre témoin se demande quelles peuvent être les causes d'un tel laxisme. "Ma question est surtout de savoir à quel niveau se situe le problème du Léonard depuis tant d’années ? Fuit-on le sujet où est-ce tout simplement encore et toujours un problème linguistique ?", s'interroge-t-il.

D'après les différents ministères, le souci est plutôt d'ordre financier. Car le jour où le carrefour Léonard sera refait, il devra être transformé en un vrai échangeur autoroutier, avec le défi majeur de faire arriver un flux massif d'automobilistes venant de la E411 sur le Ring de Bruxelles sans générer (trop) de ralentissements.

Pour ce qui est de la procédure, c'est à la Flandre de sortir un ou plusieurs projets de son chapeau. Ensuite, la région bruxelloise devra valider ou invalider ce projet sur base du principe de l'accord de coopération entre les régions, vu la proximité et le "rôle" du carrefour qui représente une grande porte d'entrée vers la capitale. "Le principe urbanistique veut que quand une infrastructure a un lien direct avec une autre région, celle-ci doit valider ou approuver le projet. Cela se fait au nom de l'accord de coopération entre les régions, mais ça se limite à ça", a expliqué Marc Debont, porte-parole du ministre bruxellois de la Mobilité Pascal Smet.

Le communautaire ne devrait donc pas intervenir dans ce dossier, Bruxelles ayant tout à gagner à ce que le carrefour soit modifié rapidement. Pourtant, en Flandre, "De Werkvennootschap" qui travaille en lien étroit avec le ministre de la mobilité Ben Weyts a tenu à nous préciser qu'un tel dossier prenait du temps en amont des travaux, notamment parce qu'il devait être élaboré avec Bruxelles. Nous avons essayé d'en savoir plus, mais les intervenants néerlandophones se sont limités à des déclarations du type: "Dès qu'il y a une autre région, tout devient plus compliqué" ou "d'un point de vue administratif et procédurier, c'est beaucoup plus long parce que Bruxelles intervient".

A Bruxelles, on réfute ce discours et le fait que la Région retarde certaines modifications planifiées dans ce "noeud" du Ring de Bruxelles, argumentant que leur rôle se limitait à valider ou non un projet. "Si on ne nous présente pas de projet, on n'a rien à valider. Donc sous-entendre que la région bruxelloise les freine, ce n'est pas correct. Maintenant, c'est vrai que quand on aura quelque-chose sous les yeux, pour le valider, on devra mener un projet urbanistique, avec une enquête publique, etc... et ça prend un certain temps, peut-être de l'ordre de 6 mois. Mais ça c'est la procédure, et pour le moment la Flandre ne nous a rien soumis, donc on ne retarde en rien une adaptation de la circulation dans ce lieu de passage vu qu'il n'y a pas de projet sur la table", insiste Marc Debont.

@ArnaudRTLinfo

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