Pandy, le pasteur diabolique (4/5): le procès s'ouvre, Andras Pandy impressionne par sa froideur, son détachement et sa confiance en lui

Le procès s’ouvre le 18 février 2002 devant les assises de Bruxelles, rôle néerlandophone. De multiples pièces à conviction s’étalent devant la cour. Il y a là trois fusils, trois pistolets, une arme de poing, des chargeurs, deux poubelles et les sinistres bouteilles orange de "Cleanest".Le pasteur, alors âgé de 75 ans, continue à impressionner par sa froideur, son détachement, sa confiance en lui et en son innocence, apparemment inébranlable. "Il est combatif, affirme son avocat, et impatient de plaider devant la cour d’assises."Il n’y a pas d’assassinatsL’homme à l’épaisse chevelure grise cache son regard derrière de grandes lunettes aux verres fumés. Ses manies font sourire. Chaque matin, il essuie consciencieusement le banc sur lequel il va prendre place puis il se penche sur ses feuilles. Il note tout, il réagit à tout. Ainsi, Pandy sursaute lorsque le président parle des bâtiments où les assassinats se sont produits. "Il n’y a pas d’assassinats", réagit le pasteur. Le président répète sa phrase au conditionnel.Andras Pandy se dit victime d’un procès en sorcellerie, d’un complot du gouvernement afin de distraire l’attention du public des Tueries du Brabant, toujours non résolues. Pandy déborde d’imagination pour expliquer l’inexplicable. Les membres disparus de sa famille travailleraient pour une société internationale qui est dans le collimateur de Poutine, ils ont subi des opérations de chirurgie esthétique qui les rendent méconnaissables, mais ce n’est plus qu’une question d’heures : ils vont se présenter au procès et mettre un terme à ce simulacre de justice, dit-il. Évidemment, personne ne viendra, pas même Timea, la survivante qui est retournée vivre en Hongrie avec son fils Mark et qui cherche absolument à oublier cette sombre période de sa vie. Le cas d'Agnès au centre des débatsÀ gauche du pasteur, Agnès, sa fille de 44 ans, fait profil bas. Est-elle victime de son père ou bourreau elle aussi ? Elle fut dénonciatrice, mais aussi complice, le cas d’Agnès est au centre des débats. Elle craque lorsqu’elle évoque son frère Daniel qu’elle a tué d’une balle dans la tête après l’avoir invité à déjeuner. "J’ai voulu renoncer, dit-elle, mais Pandy, arme au poing m’a forcée. Oui, je me sens coupable, finit-elle par articuler après un long silence. Ce que j’ai vécu est une punition suffisante, je ne mérite pas plus."L’accusation soutient qu’il s’agit d’un duo infernal à la froide détermination, d’un couple de meurtriers en série. Lui, c’est le tyran, le manipulateur, le dictateur affublé d’un énorme sentiment de supériorité. Elle, c’est la disciple qui choisit la collaboration plutôt que la résistance, une femme soumise sans doute, terrorisée peut-être, mais qui avait d’autres moyens à sa disposition pour échapper à ce père incestueux.Sa défense parle d’un robot, il suffisait que le père enclenche un bouton pour qu’elle exécute servilement ce qu’il voulait, jusqu’à assassiner, dit Me Muls.Coupables tous les deuxL’avocat rappelle les mots de Pandy à sa fille alors qu’ils démembraient une victime : "Tu vois, c’est ce qui arrive quand on ne m’écoute pas." Agnès était sous l’emprise d’une force irrésistible, plaide l’avocat, cette force qui prive de toute volonté et qui, dit la loi, peut "excuser" le crime. Mais l’accusation n’y croit pas. Une contrainte irrésistible ne dure qu’un instant, réplique-t-elle. Pas 28 ans, c’est irréaliste. Les sanglots d’Agnès n’y changeront rien. Elle est reconnue coupable de cinq assassinats et d’une tentative menée sur Timea. Concernant Andras Pandy, tous les faits dont il est accusé sont établis, dit le jury. Soit six assassinats, une tentative d’assassinat, le viol de sa fille Agnès et de deux de ses belles-filles.

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