Accueil Actu

Dans le sud-ouest de l'Iran : la solidarité contre les inondations

"Nos jeunes travaillent nuit et jour" pour combattre la montée des eaux, dit Ghassem Arabi, suant sous le poids d'un sac de sable qu'il porte pour renforcer une digue artisanale dans la ville iranienne de Hamidiyeh.

"Avec l'aide de Dieu, cette inondation épargnera les maisons car c'est tout ce qu'il reste aux gens d'ici", affirme cet infirmier de 37 ans.

Beaucoup ont perdu leurs champs dans cette ville agricole du sud-ouest de l'Iran où la population se serre les coudes après le déluge qui s'est abattu sur la région.

M. Arabi vit et travaille à Ahvaz, la capitale de la province du Khouzestan, à une trentaine de kilomètres au sud-est d'Hamidiyeh.

Les pluies ont commencé alors qu'il était en vacances dans sa famille à l'occasion de la fête du Norouz (21 mars) qui marque le Nouvel An iranien. Plutôt que de rentrer chez lui, il est resté prêter main forte.

Autour de lui, les gens s'entraident pour sauver ce qui peut l'être encore. Les cultures sont submergées, tout comme environ 20% de la ville, où l'on ne circule plus qu'en canot.

"Vous voyez cet arbre ?" dit un habitant en jetant une pierre en direction de quelques feuilles émergeant à la surface, "il signale mon jardin".

L'eau affleure presque au niveau du tablier de l'unique pont enjambant le Karkheh, qui traverse la ville et qui est largement sorti de son lit depuis des kilomètres en amont.

- Sauver les meubles -

Les pluies qui ont frappé le Khouzestan depuis le début du mois sont le dernier épisode d'un phénomène météorologique d'une ampleur exceptionnelle ayant frappé 20 des 31 provinces de l'Iran.

Depuis le 19 mars, des averses torrentielles se sont abattues successivement sur le nord, l'ouest et le sud-ouest du pays.

Les intempéries ont fait 70 morts et des dégâts approchant officiellement le milliard d'euros, dont près du quart pour le seul Khouzestan, région où vit une importante minorité arabe et où la population est déjà largement défavorisée.

Comme dans d'autres villes ou localités des environs isolées par les eaux, et face à ce qui est perçu par certains comme un abandon, les riverains d'Hamidiyeh s'organisent par eux-mêmes.

Dans les rues qui résistent encore à la montée des eaux, on ne voit pratiquement que des hommes s'affairant à monter des digues ou évacuer de la boue.

La plupart des femmes et des enfants ont été évacués vers des camps d'hébergement d'urgence, preuves des efforts des autorités pour venir en aide à la population.

Ici, "il nous faut des habits, de la nourriture et de l'eau potable. L'eau courante et l'électricité sont coupées toutes les nuits", dit M. Arabi, l'infirmier, pendant que ses frères mettent à l'abri, sur le toit, le peu de meubles et d'appareils ménagers de la famille.

Nombre d'habitants sinistrés ont trouvé refuge chez des voisins

"On manque d'équipement et de matériel : camions, sacs de sable, monte-charges ou bulldozers. La situation est critique", dit Abbas Mansouri. La maison de cet agriculteur est sérieusement endommagée, mais cela ne l'empêche pas d'offrir nourriture, thé et eau fraîche à qui lui demande.

- "Mon coeur se brise" -

Les travaux d'utilité collective sont assurés par une armée de volontaires hétéroclite : habitants, clercs musulmans enturbannés en habit noir ou blanc, ou encore membres des Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique.

Le soleil accablant n'entrave ni leur bonne humeur ni leur ardeur : pelles et raclettes travaillent dans l'eau boueuse pendant que l'on chante des hymnes révolutionnaires en persan ou des airs arabes entraînants.

Selon des habitants, deux pompes à eau ont été fournies par les Gardiens, et, selon leurs conducteurs, un camion et un bulldozer à l'oeuvre dans les rues appartiennent à l'Etat.

"Le gouvernement ne nous a envoyé que très peu d'aide, et on attend toujours de voir le Croissant-Rouge ou l'armée ici", se plaint un riverain sans vouloir donner son nom.

Le Croissant-Rouge est pourtant loin d'être inactif au Khouzestan, comme l'ont constaté des journalistes de l'AFP, mais du fait de l'ampleur du désastre et de moyens limités, son action vise pour l'heure prioritairement les villages coupés du monde, indiquent certains volontaires.

Selon un pilote, l'organisation ne dispose que de six hélicoptères pour couvrir des milliers de kilomètres carrés touchés par les inondations et ravitailler les sinistrés en nourriture ou produits d'hygiène indispensables.

Dans ces zones, "l'agriculture était toute la vie, et maintenant, tout est détruit", dit Mostafa Torfi, travailleur humanitaire de 35 ans.

"Mon coeur se brise dès que je vois ces villageois qui ont tout perdu", ajoute-t-il, "nous faisons tout ce que nous pouvons pour eux".

À lire aussi

Sélectionné pour vous