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FAUSSE INFO: non, la grippe n'a pas "totalement disparu" depuis l'hiver dernier

Plusieurs publications très relayées sur les réseaux sociaux affirment que la grippe saisonnière n'a provoqué que 73 décès l'hiver dernier en France puis que l'épidémie a "totalement disparu comme par enchantement" cette année.

En réalité, le bilan de l'épidémie de grippe lors de l'hiver 2019/2020 s'élève à 3.680 morts selon les estimations officielles françaises, tandis que cette année le virus pourrait circuler de manière très limitée, expliquent des spécialistes à l'AFP, l'agence de presse française.

Ce que l'on vérifie

Le chiffre de 73 décès "causés par la grippe" durant l'hiver dernier circule abondamment sur Twitter, où il nourrit des suspicions, certains internautes affirmant que des morts de la grippe ont été comptabilisés dans la catégorie "Covid-19" afin de gonfler les chiffres.

En réalité, le chiffre de 73 décès est erroné et la "disparition" de la grippe cette année, une affirmation prématurée.

Ce que l'on sait

Un chiffre très proche (72 décès) apparaît dans un bulletin hebdomadaire sur la grippe saisonnière publié par Santé publique France le 4 mars 2020, mais celui-ci correspond uniquement au nombre de décès parmi les patients "admis en réanimation", et non à l'ensemble des décès causés par la grippe.

En réalité, selon le bilan de la saison grippale 2019-2020 publié en octobre par Santé Publique France, "la grippe aurait causé 3.680 décès tous âges confondus".

Il s'agit d'une estimation car le bilan de l'épidémie de grippe est difficile à chiffrer, les autorités sanitaires se fiant plutôt à la surmortalité qui peut lui être attribuée.

"Il y a relativement peu de certificats de décès qui mentionnent la grippe en cause principale de mortalité", explique Pascal Crépey, épidémiologiste à l'Ecole des Hautes études en Santé publique (EHESP).

Ce bilan reste toutefois largement inférieur à la moyenne d'environ 10.000 décès par an sur la période 2010-2019.

L'épidémie de grippe saisonnière de l'hiver dernier "fait partie des épidémies les plus courtes depuis 2010", et sa surveillance a été stoppée plus tôt en raison du Covid-19, rappelle Santé Publique France dans son bilan d'octobre.

"L'épidémie de grippe aussi s'est arrêtée sous l'effet du confinement du mois de mars, alors qu'elle était déjà dans sa phase finale", juge l'épidémiologiste Pascal Crépey.

Ce que l'on peut en conclure pour cette année

"Les mesures que l'on applique pour contrôler l'épidémie de Covid-19", tels que le port du masque, la distanciation physique et le lavage des mains, "vont avoir un impact sur la circulation des virus respiratoires en général", affirme l'épidémiologiste.

Seuls sept cas de grippe ont été "détectés en milieu hospitalier" depuis fin septembre, selon Santé publique France, soulignant dans le bulletin hebdomadaire du 9 décembre, qu'il n'y a "pas de circulation active des virus grippaux identifiée par les réseaux de surveillance dédiés".

L'épidémie de grippe pourrait toutefois arriver plus tardivement, notamment si les mesures de contrôle du coronavirus venaient à se relâcher.

D'ici-là, la réduction du trafic aérien mondial diminue le risque d'une importation de la grippe en France en provenance d'autres pays, ce qui advenait les autres années.

En parallèle, les appels à la vaccination contre la grippe pourraient permettre de réduire l'incidence du virus.

"Quand vous avez un virus qui est très installé d'un point de vue épidémique, comme le Sars-Cov-2, il n'y a pas la place pour qu'un deuxième virus vienne co-circuler en même temps de façon aussi abondante", expliquait le 9 décembre sur France 2 Bruno Lina, professeur de virologie et membre du conseil scientifique.

S'il est faux d'affirmer que "la grippe a totalement disparu par enchantement", tous ces facteurs font que, selon Pascal Crépey, "la probabilité qu'on n'ait pas d'épidémie de grippe cette année est loin d'être négligeable".

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