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"Bonjour Madame, Yohann Nédélec, maire du Relecq-Kerhuon. Je viens vous déposer les chèques alimentaires": la petite commune aux portes de Brest exprime ainsi, en cette période de crise sanitaire et économique, sa solidarité envers les familles les plus modestes.
"Vous pouvez m'ouvrir la porte s'il vous plait?" demande à travers l'interphone le maire de 42 ans, masque en tissu sur le visage. Une silhouette apparaît dans la pénombre de la cage d'escalier de ce petit immeuble situé sur les hauteurs de la ville. "Excusez-moi pour la tenue...", balbutie la jeune femme à qui l'on vient de tendre une enveloppe, visiblement gênée de ne pas avoir eu le temps de s'apprêter davantage. "Merci, merci beaucoup", glisse-t-elle dans un large sourire avant de disparaître de l'étroit hall d'entrée.
Depuis mercredi, le maire socialiste depuis 2008 de cette commune de près de 12.000 habitants, située à l'embouchure de l'Elorn et à flanc de rade, sillonne avec d'autres élus les rues pour distribuer les bons d'un montant total de 150 euros par enfant et par mois, avec effet rétroactif sur mars.
Les chèques sont destinés aux familles d'enfants mangeant habituellement dans les restaurants scolaires de la commune et dont les quotients familiaux ne dépassent pas la 3e tranche.
Le coût pour la collectivité de cette opération: 63.000 euros pour mars et avril, puis 42.000 euros par mois supplémentaire de confinement. Au total, ce sont 282 enfants, de la maternelle au CM2, des écoles publiques et privées de la commune, qui vont être concernés par cette mesure.
"Avec la crise du coronavirus il y a une dépense supplémentaire pour les familles qui va au-delà du cout payé à la collectivité pour la restauration scolaire", assure à l'AFP Yohann Nédélec. "Si certains ne savaient pas pourquoi ils payaient des impôts, là ils vont vite le comprendre!" s'amuse l'élu, évoquant le "principe de solidarité".
- "les larmes aux yeux" -
"C'est difficile, c'est vrai que là c'est un peu compliqué...", témoigne une maman, accompagnée sur le pas de sa porte de sa fillette de six ans, en recevant l'enveloppe de la main de l'élu. "Je suis seule donc c'est pas évident", confie la jeune femme, également mère d'un petit garçon de quatre ans.
"C'est des chèques de 5, 10 et 20 euros qu'on ne peut dépenser que dans les commerces de la commune et que pour de la nourriture, mais c'est un sacré montant!" se réjouit une autre bénéficiaire auprès de l'AFP. "On dirait que j'ai gagné au loto, je n'en reviens pas, limite j'avais les larmes aux yeux quand le conseiller m'a parlé à l'instant, j'étais émue", poursuit-elle. Salariée d'une entreprise du secteur du tourisme, cette jeune maman de deux enfants, qu'elle élève seule, s'est retrouvée au chômage partiel dès le début du confinement mi-mars. "Le salaire s'en ressent...", regrette-t-elle.
"Les gens sont très surpris, certains ont pu le voir ou le lire dans la presse, mais beaucoup d'entre eux n'avaient pas l'information, donc c'est une excellente nouvelle parce que les temps sont durs pour beaucoup de familles", note Tom Héliès, conseiller municipal de la majorité.
Depuis deux jours, il enchaîne les appels téléphoniques pour s'assurer de l'adresse des bénéficiaires et leur annoncer la bonne nouvelle. "Pour certains c'est un peu Noël", confie Yohann Nédélec, également deuxième vice-président de Brest métropole.
Une initiative similaire a été mise en place de manière concomitante à Brest, pour un montant total de 300.000 euros par mois. En Italie, c'est le gouvernement qui a décidé fin mars de distribuer des bons alimentaires aux plus démunis, du jamais vu depuis la Seconde guerre mondiale.
Sans aller jusque-là, Yohann Nédélec espère que d'autres communes suivront l'exemple de la pointe bretonne.