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Une journaliste qui avait déclaré au président qu'elle craignait pour sa vie il y a trois ans a été assassinée dimanche à Tijuana, deuxième meurtre d'un professionnel des médias en une semaine dans cette ville du nord-ouest du Mexique à la frontière des Etats-Unis, ont annoncé lundi les autorités.
Lourdes Maldonado Lopez a été tuée par "arme à feu alors qu'elle se trouvait à bord d'un véhicule", a indiqué le parquet général de l'Etat de Basse-Californie dans un communiqué. Elle "travaillait comme journaliste", a ajouté le parquet en annonçant l'ouverture d'une enquête.
Un autre journaliste, le photoreporter Margarito Martinez, avait été tué lundi dernier dans la même ville. Il collaborait avec l'hebdomadaire Zeta, le quotidien Jornada et des journalistes étrangers en reportage dans la région. Le parquet a déclaré qu'il n'écartait aucun mobile dans son enquête.
La journaliste assassinée dimanche avait travaillé pour Primer Sistema de Noticias (PSN), chaîne de télévision appartenant à Jaime Bonilla, gouverneur de l'Etat de Basse-Californie de 2019 à fin 2021, et proche du président Andres Manuel Lopez Obrador.
La victime avait gagné il y a quelques jours un procès contre PSN, qu'elle poursuivait depuis neuf ans pour licenciement abusif.
- "Aide et justice" -
Elle avait demandé en mars 2019 au président Lopez Obrador, "appui, aide et justice" affirmant avoir "peur pour (sa) vie", selon une vidéo republiée sur les réseaux sociaux à l'annonce de son assassinat.
"Je suis en procès depuis six ans avec lui", ajoutait-elle au sujet du gouverneur Bonilla, en interpellant le chef de l'Etat lors de l'une de ses conférences de presse. "Avec ce personnage puissant, je ne peux rien faire ou si peu sans son soutien, monsieur le président".
Le président Lopez Obrador a qualifié lundi matin de "lamentable" l'assassinat de la journaliste. "Il faut faire une enquête à fond", a-t-il ajouté lors de sa conférence de presse quasi-quotidienne.
Il a indiqué être resté en contact avec la journaliste après son intervention début 2019.
"On ne peut pas, de manière automatique, lier une plainte en droit du travail à un crime", a-t-il prévenu.
"N'oublions pas, c'est tout ce que je demande, que nous sortons d'une période de décadence, et que la violence a commencé à se manifester il y a 20 ou 30 ans", a conclu le président de gauche investi fin 2018 en promettant de rompre avec le néo-libéralisme de ses prédécesseurs qu'il accuse de tous les maux (corruption, inégalités, violences).
Une mobilisation de journalistes a été annoncée pour mardi soir à Tijuana et dans de nombreuses villes (Mexico, Ciudad Juarez, Cancun, Monterrey, Acapulco...) sous le slogan "#NiSilence,nioubli, On ne tue pas la vérité, journalisme en danger".
- "Choqué" -
La déléguée de l'ONG Reporters sans frontière (RSF) au Mexique, Balbina Flores, a déclaré à l'AFP qu'il restait à confirmer si Mme Maldonado disposait d'une protection officielle.
La représentante de RSF a demandé aux autorités d'enquêter de manière exhaustive et transparente, alors que la plupart des assassinats de journalistes restent non élucidés.
Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) s'est déclaré "choqué" par ce dernier assassinat.
Au moins sept journalistes ont été tués en 2021 au Mexique, d'après un décompte de l'AFP, qui tente à chaque fois d'établir si la victime était encore en activité, et si elle a été tuée à cause de son travail journalistique.
Cela semble être le cas dans l'Etat du Veracruz (sud-est), où un homme présenté comme un journaliste, José Luis Gamboa, a été retrouvé mort poignardé le 10 janvier, ont indiqué lundi plusieurs sources. "Gamboa avait dénoncé et critiqué fortement les autorités locales pour leur relation avec le crime organisé", d'après RSF.
Sur son compte suivi par 1.070 abonnés, la victime se présentait comme le "directeur général" de trois publications en ligne. Dans l'un de ses derniers articles fin décembre - en fait un long éditorial -, José Luis Gamboa dénonçait des acteurs politiques "liés au crime organisé".
Le Mexique est considéré comme l'un des pays les plus dangereux au monde pour les journalistes, exposés aux représailles des cartels de narcotrafiquants à l'oeuvre dans plusieurs des 32 Etats du pays.
Une centaine de journalistes ont été tués depuis 2000, d'après des chiffres de la Commission des droits de l'homme.