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"C'est scandaleux": Ségolène Royal dénonce le renouvellement du glyphosate pour 10 ans dans l'Union européenne

Désherbant controversé mais abondamment utilisé dans le monde, le glyphosate, dont l'autorisation sera prolongée de dix ans dans l'Union européenne (UE), fait l'objet de restrictions voire d'interdictions dans plusieurs pays à travers le monde.

Invitée dans notre émission des Puncheurs ce dimanche midi, Ségolène Royal ancienne ministre socialiste française, dénonce cette décision de renouveler le glyphosate. "C'est scandaleux. Le glyphosate qui vient d’être réautorisé par la Commission européenne. J’ai interdit le glyphosate il y a quelques années. Je suis venue à Bruxelles au conseil des ministres de l’environnement. Il y avait beaucoup de femmes ministres de l’environnement. C’est peut-être pour ça qu’on a été plus énergiques", dit l'ancienne candidate à la présidentielle française. "On l’a interdit à Monsanto, qui avait déjà eu 10 ans pour mettre sur le marché des produits non cancérigènes et non polluant. En 2007, mon successeur a détruit ce que j’ai fait et a réautorisé le glyphosate. Moi, ministre, je n’ai jamais détruit quelque chose de positif, même d’un ministre de droite, si je pensais que c’était bon pour le pays."

Substance active du célèbre Roundup de Monsanto (Bayer), le glyphosate a été classé en 2015 comme "cancérogène probable" par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

L'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a au contraire, jugé en 2022 que les preuves scientifiques disponibles ne permettaient pas de le classer comme cancérogène.

Tour d'horizon non exhaustif des interdictions et restrictions d'usage du glyphosate:

EUROPE 

Dans l'UE, le glyphosate fait débat depuis des années mais n'est pas interdit: la Commission européenne a annoncé jeudi qu'elle allait renouveler pour dix ans son autorisation. En juillet 2023, un rapport de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait ouvert la voie à ce prolongement, indiquant n'avoir pas identifié de "domaine de préoccupation critique". 

En France, Emmanuel Macron s'était engagé en 2017 à sortir du glyphosate "au plus tard" début 2021, avant de revenir sur sa promesse.

Depuis, Paris s'est fixé comme objectif de sortir de l'essentiel des usages du désherbant. En 2020, l'agence sanitaire française Anses a annoncé des restrictions progressives pour son usage dans l'agriculture, son utilisation par les particuliers étant prohibée depuis 2019. 

La France a dit jeudi "regretter" que ses propositions pour encadrer "plus strictement" le glyphosate dans l'UE n'aient pas été retenues. Paris a précisé que l'usage de l'herbicide continuerait à être limité dans le pays, restant autorisé dans l'agriculture "là où il n'existe pas d'alternative".

Aux Pays-Bas et en Belgique, l'utilisation du glyphosate est interdite pour les particuliers. Au Portugal, son usage est interdit dans les espaces publics. En République tchèque, il est limité depuis 2019.

En Allemagne, le contrat de coalition signé fin 2021 par les sociaux-démocrates (SPD), les Verts et les libéraux (FDP) stipulait que le glyphosate serait "retiré du marché d'ici à la fin 2023". Des premières limitations sont entrées en vigueur en 2020 avec une interdiction dans les espaces publics (parcs, terrains de sports, cours d'école, etc.) et dans les jardins des particuliers.

Le Luxembourg, qui avait interdit la commercialisation du produit fin 2020, a été contraint de lever l'interdiction en 2023 sur décision de justice.

Situation comparable en Autriche: un vote du parlement pour bannir le glyphosate a été annulé fin 2019 en raison d'un vice de procédure.

ETATS-UNIS 

Monsanto et sa maison-mère allemande Bayer sont empêtrés dans de multiples et coûteuses procédures judiciaires aux Etats-Unis, liées à l'utilisation du désherbant Roundup. Le groupe a conclu en 2020 un accord à 10 milliards de dollars pour solder les poursuites de ses anciens utilisateurs.

Mais dans ce pays le glyphosate demeure en vente, même si des restrictions locales limitent son usage. En 2019, l'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA) avait réaffirmé que le glyphosate n'était "probablement pas cancérigène pour les humains".

AMERIQUE LATINE 

Le Mexique s'est engagé début 2021 vers une interdiction progressive du glyphosate jusqu'à un bannissement total à compter du 31 mars 2024.

En Colombie, les épandages de glyphosate pour détruire les plantations de coca ont été suspendus pour raison sanitaire en 2015 puis réautorisés sous conditions à partir de 2020. 

Au Brésil, le glyphosate a été l'objet d'une brève bataille judiciaire en 2018, une juge suspendant les nouveaux produits à base de glyphosate avant qu'un tribunal saisi par le gouvernement n'annule sa décision.

Au Salvador, l'herbicide a fait partie d'une liste de 53 produits pour l'agriculture interdits en 2013. Mais l'interdiction a ensuite été levée.

ASIE 

Au Sri Lanka, l'herbicide, soupçonné de provoquer une nouvelle maladie, chronique, des reins parmi les habitants des zones de production de riz, a été interdit à partir de juin 2015. 

Mais face à l'absence d'études associant directement le glyphosate à cette maladie, l'interdiction a été partiellement puis totalement supprimée en novembre 2021.

En avril 2019, le Vietnam a annoncé une interdiction de l'utilisation du glyphosate, entrée totalement en vigueur à la mi-2021.
 

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