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Après cinq mois de manifestations contre la réforme des retraites, les syndicats entrevoient la fin du "match" avec une participation au plus bas pour leur 14e journée de mobilisation, deux jours avant l'examen à l'Assemblée d'une loi d'abrogation qui a peu de chance d'aboutir.
Le sursaut n'a pas eu lieu pour ce qui pourrait être la dernière journée d'action à l'initiative de l'intersyndicale. Le ministère de l'Intérieur a compté 281.000 manifestants en France, et la CGT "plus de 900.000", soit les chiffres les plus faibles depuis le début du mouvement le 19 janvier.
A Paris, la préfecture a annoncé 31.000 participants (moins que les 37.000 du 15 mars et du 16 février), et la CGT 300.000 participants, plancher déjà atteint à deux reprises durant l'hiver. En province aussi les chiffres sont souvent descendus sous les plus bas niveaux précédemment enregistrés : 8.000 à 50.000 manifestants à Toulouse, entre 5.500 et 10.000 à Rennes, ou encore 5.000 à 10.000 à Grenoble.
"Le match est en train de se terminer, qu'on le veuille ou non, avec cette inconnue de ce qui se passera jeudi à l'Assemblée", a reconnu mardi Laurent Berger. Le numéro un de la CFDT a appelé les syndicats à "peser dans le rapport de force à venir" sur d'autres sujets comme les salaires ou les conditions de travail.
"Nous voulons de vraies négociations", a prévenu à ses côtés la numéro un de la CGT, Sophie Binet. Soulignant que "les retraites resteront toujours un combat", elle a mis en avant l'objectif de "gagner des avancées concrètes". "L'intersyndicale va rester unie", a-t-elle ajouté, jugeant "probable qu'il y ait d'autres manifestations au vu de la colère dans le pays".
Une colère que "ce mouvement a permis d'exprimer", confirmait à Lille Michel Moulbach, ouvrier en bâtiment de 60 ans. Mais "il faut être réaliste", ajoutait ce militant cégétiste, à l'approche des vacances "ça va être difficile de ne pas faire une pause".
En dehors de quelques actions coup de poing - intrusion au siège du comité d'organisation des JO-2024, coupure d'électricité en banlieue parisienne - les perturbations sont restées limitées, notamment dans l'éducation avec à peine plus de 5% de profs grévistes, selon le ministère.
Dans les transports, la SNCF a fait circuler neuf trains sur dix en moyenne, tandis qu'un tiers des vols ont été annulés à l'aéroport d'Orly.
Beauvau avait déployé 11.000 policiers et gendarmes pour encadrer les foules, dont 4.000 dans la capitale.
Les cortèges ont été émaillés de heurts entre manifestants et forces de l'ordre, notamment à Lyon, Toulouse, Nantes et Rennes, mais plutôt moins que lors des dernières manifestations. A Paris, un CRS a été blessé, et du mobilier urbain dégradé, et la préfecture avait procédé à 28 interpellations à 18H45.
Un homme suspecté d'avoir incendié un cabanon de chantier sur le parcours parisien a été interpellé , selon une source policière.
Le défilé parisien est cependant passé sans accrochage devant l'Assemblée nationale, les manifestants redoublant de huées et collant à même le sol, en lettres majuscules: "Ci-gît la démocratie". Signe de leur désillusion après les "passages en force" de l'exécutif au Parlement, malgré la tentative d'abrogation des oppositions.
Le camp présidentiel entend continuer à avancer, comme en témoigne la publication dimanche au Journal officiel des deux premiers décrets d'application, dont celui portant progressivement l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans.
- "Enorme anomalie" -
Jeudi, la présidente de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet, devrait dégainer l'article 40 de la Constitution - qui interdit aux parlementaires de déposer des amendements ayant un impact financier - pour faire obstacle au texte déposé par le groupe Liot.
A l'unisson de la gauche et des députés Liot, Sophie Binet a plaidé qu'il est "indispensable de laisser le Parlement voter" au risque d'une "énorme anomalie démocratique". Mais pour Laurent Berger, "ce n'est pas bien parti".
"Le match est joué", a estimé le chef des sénateurs LR Bruno Retailleau sur Sud Radio.
Jean-Luc Mélenchon (LFI) a promis mardi que "la lutte continuera(it)" contre la réforme même s'il a admis ne pas savoir "sous quelle forme".
Le débat doit se tenir "dans le cadre démocratique et le respect de la Constitution", avait de son côté affirmé lundi le président de la République, Emmanuel Macron. "Les annonces viendront en temps voulu", a-t-il dit mardi en marge des commémorations du Débarquement.
Le gouvernement prévoit la tenue mi-juin d'une réunion multilatérale, soit à Matignon, soit à l'Elysée, avec syndicats et patronat.
Une perspective qui n'enchante pas les leaders syndicaux, qui devraient se réunir en visio mardi prochain. Frédéric Souillot (FO) a déjà fait savoir qu'il "n'irait pas", tandis que François Hommeril (CFE-CGC) n'a "pas envie d'aller à une opération de communication".
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