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L'étoile de Gabriel Attal pâlit légèrement au seuil des 100 premiers jours à Matignon, mais le Premier ministre entend continuer d'opposer son volontarisme au malaise social qui grandit et à la censure qui menace à l'Assemblée nationale, sur fond de dérapage budgétaire et de campagne européenne mal engagée.
Un peu plus de trois mois après son arrivée rue de Varenne, le plus jeune Premier ministre de la Ve République -il a fêté ses 35 ans le 16 mars- n'est "pas surpris par la difficulté de la fonction". Fonction, explique-t-il mercredi, "la plus intéressante, au moment le plus difficile".
Crise agricole, dégradation budgétaire, camp présidentiel secoué par la réforme des retraites et la loi immigration: l'état de grâce n'était pas vraiment de mise pour le successeur d’Élisabeth Borne, toujours sans majorité à l'Assemblée. Et donc sous la menace constante d'y être renversé, récemment ravivée par le président (LR) du Sénat Gérard Larcher.
Mais pas question d'être tétanisé, entend-on rue de Varenne, pour un chef du gouvernement qui veut répondre au "sentiment de l'impuissance publique" et à la "demande très claire d'autorité", thème de son discours des 100 jours jeudi à Viry-Châtillon (Essonne), où un jeune de 15 ans a récemment perdu la vie, passé à tabac près de son collège.
Autorité, éducation... des sujets inscrits dans sa déclaration de politique générale -"Tu casses, tu répares"-, en bonne place au côté du "travail", valeur cardinale d'un Premier ministre décidé à pousser les feux pour atteindre le plein-emploi, notamment en durcissant encore les règles de l'assurance-chômage.
Autant de marqueurs politiques pour un Premier ministre qui "a encore du mal à trouver son accroche", juge un influent parlementaire pourtant bienveillant à son égard.
Éternel objet d'étude en Ve République, ses rapports avec le chef de l’État sont scrutés. "Comme souvent, le président occupe beaucoup d’espace. Et s'impatiente... déjà", observe cet élu.
Des reproches venus de l’Élysée, relayés dans Le Canard enchaîné, sur une implication jugée trop faible dans la campagne des européennes où la liste de la majorité, distancée par le Rassemblement national, glisse dangereusement vers celle du PS de Raphaël Glucksmann ? "Des gens malveillants, qui ont envie d'enfoncer un coin" entre les deux têtes de l'exécutif, juge un des soutiens du Premier ministre.
Au contraire, explique Gabriel Attal, "ça se passe très bien. Dans mes découvertes (à Matignon), il y a le fait que cela fonctionne vraiment comme un couple exécutif, ou un duo exécutif. On s'écoute. On peut faire évoluer la position de l'autre. Beaucoup de décisions se prennent à deux".
-"Efforts" à venir-
Choisi pour son audace et sa capacité à communiquer, Gabriel Attal "s'aperçoit que, sur les épaules, il a beaucoup de choses" qui n'avancent peut-être pas aussi vite qu'il le souhaiterait ou suscitent de vives oppositions, nuance un allié de la majorité.
"Le costume est difficile. C'est pas un gars qui a dirigé une administration", avance de son côté un macroniste historique.
Sur l'éducation, son ancien portefeuille, il n'a pas convaincu les syndicats sur les groupes de niveau. Et la crise agricole dans laquelle il a été plongé dès son arrivée n'est pas complètement résolue, en dépit de concessions inédites du gouvernement qui ont suscité en retour la colère des organisations écologistes.
La situation budgétaire, qui peut potentiellement fracturer la majorité, a suscité des tensions avec le ministre de l’Economie Bruno Le Maire. Mais l'hypothèse d'un budget rectificatif ayant été écartée par l’Élysée, les annonces d'économies supplémentaires attendront les européennes.
Au-delà, pour un budget 2025 qui s'annonce explosif, Gabriel Attal a concédé de taxer "les rentes" mais prévoit aussi des "efforts" avec des "réformes de structures" (assurance-chômage, fonction publique) qui tendent déjà le climat social.
Dans ce contexte, la liste présidentielle conduite par Valérie Hayer continue de se faire distancer dans les sondages par celle de l'extrême droite pour le scrutin européen du 9 juin.
Gabriel Attal, présenté dans son camp comme une "arme anti-Bardella", doit-il s'impliquer davantage ? La macronie est d'abord suspendue au discours sur l'Europe que doit prochainement prononcer le président. Un "discours de la Sorbonne 2" qui lancera véritablement la campagne, juge-t-on de toutes parts au sein de la majorité, jusqu'à l'hôtel de Matignon.