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Complications, inflammation et insuffisance rénale: le décès de ce mannequin argentin met en lumière les dérives de la chirurgie esthétique

Quand la beauté se fait fatale. Le décès récent d'une actrice argentine, soupçonné d'être lié aux effets secondaires d'une chirurgie esthétique, met en lumière la forte hausse de ces opérations, parfois hors contrôle.

Silvina Luna avait 43 ans. Révélée dans la version argentine de "Big brother", cette grande blonde aux yeux azur enchaîna sur une carrière mi-mannequin, mi-animatrice TV. Opérée en 2011 pour booster fessier et jambes notamment, elle est allée d'inflammations en complications, hypercalcémie, insuffisance rénale, pour être finalement hospitalisée pendant des semaines en attendant une greffe lorsqu'elle est décédée fin août.

"Aucun être humain ne peut tolérer une telle quantité de matière étrangère dans le corps". Ainsi s'exprimait début septembre Fernando Burlando, avocat de la famille, après l'autopsie de Silvina Luna, d'où il vit "extraire une grande quantité de matière dure" apparemment "mêlée" aux tissus humains. Le chirurgien de la défunte, Anibal Lotocki, a été condamné à quatre ans de prison, en 2022, mais laissé en liberté, ainsi qu'à cinq ans d'interdiction d'exercer pour "mauvaise pratique" sur quatre patientes, dont Silvina.

La mort de l'actrice a fait "émerger" d'autres patients du Dr Lotocki, réputé il y a 10-15 ans comme "chirurgien des célébrités" et invité fréquent des plateaux de télévision.

20% de plus en cinq ans

Une autre personnalité TV, l'ex-danseur Mariano Caprarola, est décédée en août à 49 ans après une grave insuffisance rénale suivie d'une crise cardiaque. Lui aussi avait été opéré des fesses par Lotocki qu'il accusa "de lui avoir injecté la mort". Un polymère, le méthacrylate, a été mis en cause dans le décès des deux anciennes stars du petit écran. Bien qu'autorisé en chirurgie plastique, le produit, au prix élevé, n'est recommandé qu'en quantités minimes et pour des usages bien précis (prothèse dentaire, osseuse). Il n'est aujourd'hui plus commercialisé en Argentine.

Un chirurgien esthétique de Buenos Aires affirme à l'AFP sous couvert d'anonymat avoir reçu d'anciens patients de Lotocki, avec des parties du corps "dures comme de la pierre, sur lesquelles les seringues se tordaient". Le cas Silvina Luna, qui a fortement ému, a révélé quelques angles morts de la chirurgie esthétique en Argentine, de longue date une place forte en Amérique latine, avec Brésil et Colombie. "Il y a eu une croissance ces dernières années, de l'ordre de 20% depuis cinq ans", diagnostique pour l'AFP Edgardo Bisquert, président de la réputée Société argentine de chirurgie plastique (Sacper). Pour plusieurs raisons, en particulier un taux de change peso/dollar avantageux pour les étrangers.

La pandémie de coronavirus et les réseaux sociaux ont en outre "changé la donne", souligne l'expert. "Beaucoup de gens ont vécu confinés, connectés, se regardant beaucoup plus dans le miroir qu'auparavant", explique-t-il. "Et les réseaux sociaux, les téléphones incorporant la technologie de filtres qui peuvent 'changer' un visage sans opérer, ont généré un fort désir de ressembler à ces images", estime-t-il.

Ressembler à une photo

Maximiliano Gil Miranda, chirurgien établi depuis 22 ans, raconte à l'AFP être "fréquemment" confronté à des patients lui montrant une photo et voulant ressembler "à ça". Et devoir expliquer patiemment "que 'ça' n'existe pas, que cette image 'parfaite' a été retouchée". Ou devoir assurer à des patientes mécontentes après une opération du nez réussie, que tout est parfait, mais que l'effet "grand angle" d'un selfie déforme par rapport à une photo normale. "Ça devient difficile à gérer...", dit-il.

Le spécialiste souligne que les prix ont par ailleurs baissé, rendant la chirurgie esthétique "accessible" à "diverses strates sociales", ajoute-t-il. De leurs côtés, les médecins "mal payés" se retrouvent de plus en plus "tentés de se former à cette pratique", plus lucrative. Car des techniques perfectionnées, des produits plus accessibles ont eu aussi pour corollaire "l'intrusion de non-professionnels, qui peuvent avoir juste suivi une formation", estime pour l'AFP Carolina Mariluis, une "radiologue esthétique". Sa spécialité détecte et évalue d'éventuelles complications de chirurgies esthétiques antérieures. "Mon agenda ne désemplit plus, signe qu'avec ces cas médiatisés, les gens sont en train de se réveiller, et solliciter une échographie pour savoir quel produit ils ont réellement sous la peau".

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1 commentaire

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  • Si ce n'est un cas de chirurgie réparatrice, quelle idée absurde de se "faire refaire" le physique pour soi-disant plaire ...

    Alain T.
     Répondre