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Equateur: référendum sur la sécurité, un directeur de prison assassiné

L'Equateur s'est prononcé dimanche sur plusieurs mesures proposées par le gouvernement pour lutter contre la criminalité, un vote assombri par l'assassinat d'un directeur de prison dans l'ouest du pays.

Quelque 13,6 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes pour répondre par oui ou par non à onze questions posées par le président Daniel Noboa. Selon l'autorité électorale (CNE), 72% des électeurs équatoriens se sont rendus aux urnes.

Les premiers résultats officiels seront publiés à partir de 19H00 locales (0H00 GMT).

Le vote en lui-même s'est déroulé sans incident notable sur tout le territoire. Mais la journée a été marquée par l'assassinat du directeur du pénitencier N.4 de Manabi (sur la côte Pacifique), "victime d'un attentat", selon l'administration pénitentiaire. L'homme a été exécuté par balles par des inconnus alors qu'il était attablé à un restaurant.

L'Equateur, gangréné par le narcotrafic et la corruption, devenu la principale plateforme de l'exportation de cocaïne produite en Colombie et au Pérou voisins, fait face depuis mi-janvier à une grave crise sécuritaire provoquée par les gangs.

L'un des épicentres de cette crise est le système carcéral, que le pouvoir tente de prendre en main, théâtre de massacres récurrents et de luttes de pouvoir des groupes criminels.

Le président Noboa, élu en novembre pour 18 mois et qui devrait briguer un nouveau mandat en 2025, a déclaré le pays en "conflit armé interne" et a déployé l'armée pour neutraliser une vingtaine de ces groupes.

Depuis, près d'une quinzaine d'hommes politiques, maires, responsables locaux, ou encore procureurs ont été assassinés. Vendredi, un nouveau maire a été tué par balle.

- Oui à l'extradition -

Parmi les principales propositions de cette consultation qui définira notamment "la direction et la politique d'Etat (...) contre la violence, le crime organisé, la lutte contre la corruption" selon le chef de l'Etat, figurait l'extradition des ressortissants équatoriens liés au crime organisé, notamment vers les Etats-Unis, une mesure particulièrement crainte par les narcos.

La proposition a été approuvée par 72% des votants, selon des sondages réalisés à la sortie des bureaux de vote.

Mauricio Lopez, 36 ans, employé à Quito, confie avoir "voté oui, en particulier à l'extradition". "L'idée est que les criminels aient plus peur, c'est aussi une façon plus rigoureuse de les punir."

Dulce Negrete, 61 ans, juge de son côté que l'extradition "ne sert à rien" et a "voté non à tout".

Les Equatoriens se prononçaient sur la participation de l'armée au contrôle des armes, sur l'alourdissement des peines pour les délits liés au crime organisé et sur la possibilité pour les forces de sécurité d'utiliser des armes saisies.

Sur toutes ces questions sécuritaires, les électeurs semblent avoir appuyé les demandes du président Noboa, toujours selon les sondages publiés par les médias en fin de journée, affichant 9 oui aux 11 demandes de Noboa, une "victoire" pour ce dernier, en concluait dimanche soir la presse nationale.

Les Equatoriens ont en revanche rejeté deux propositions, d'après la même source: l'une sur la formalisation d'un travail payé à l'heure, mesure qui était vivement critiquée par les syndicats et les organisations indigènes. L'autre sur la reconnaissance de l'arbitrage international pour résoudre les litiges en matière d'investissement et de commerce.

L'Equateur avait mis fin aux traités bilatéraux et s'était retiré d'organismes d'arbitrage sous le gouvernement de l'ancien président socialiste Rafael Correa (2007-2017), aujourd'hui opposant en exil après sa condamnation pour corruption.

Cette consultation se déroulait dans un contexte particulièrement complexe pour le pays.

En plus du défi sécuritaire, l'Equateur connaît depuis début avril une tempête diplomatique provoquée par un assaut policier sur l'ambassade du Mexique à Quito pour capturer un ancien vice-président de Rafael Correa, Jorge Glas (2013-2017), qui fait l'objet d'une enquête pour corruption.

Malgré une image écornée à l'étranger, M. Noboa, 36 ans, affirme qu'il n'a "aucun regret" concernant ce raid, qui a coûté au pays un procès - toujours en cours - devant la Cour internationale de justice (CIJ), et une condamnation internationale et des gouvernements de gauche d'Amérique latine particulièrement fâchés.

Au niveau national, l'urgence du moment est énergétique, avec de sévères rationnements d'électricité (jusqu'à 13 heures par jour) et une revue en urgence des installations hydroélectriques.

Conséquence de la sécheresse, du phénomène El Niño, mais aussi d'une mauvaise gestion administrative, de l'aveu même des autorités, cette pénurie d'électricité serait aussi le fait de "sabotages" liés à ses ennemis politiques, selon le président Noboa.

Un décret présidentiel vendredi a ordonné la mobilisation de la police et de l'armée "pour garantir la sécurité des infrastructures énergétiques".

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