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Les députés ont repris mercredi l'examen de la proposition de loi "sécurité globale", dont la partie sur l'image des policiers et la liberté de la presse continue de cristalliser passions et antagonismes.
Si les débats dans l'hémicycle portaient sur les nouvelles prérogatives des polices municipales, la polémique s'est poursuivie mercredi après les échauffourées de la veille à proximité de l'Assemblée, entre force de l'ordre et une partie des manifestants qui s'étaient massés pour dire leur opposition à un texte jugé "liberticide".
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a fustigé "des violences inacceptables": "Alors que des représentants du peuple allaient légitimement discuter d'un texte de loi, il y avait une pression sur les représentants de la Nation pour ne pas discuter librement".
Lacrymogènes, canons à eau, mobilier urbain détruit: 33 personnes ont été interpellées à la suite des heurts qui ont fait "dix blessés légers dont neuf parmi les forces de sécurité intérieure", selon la préfecture de police.
Le député LR Marc Le Fur a dénoncé mercredi une manifestation d'"une extrême violence", et demandé qu'il soit mis fin aux fonctions du préfet de police Didier Lallement.
Plusieurs journalistes ont déploré avoir été empêchés de filmer des interpellations mardi soir et certains ont été "molestés ou interpellés" selon le syndicat national des journalistes. Un journaliste de France Télévisions est resté 12 heures en garde à vue sans "aucun motif", a dénoncé le groupe mercredi soir, fustigeant une "arrestation arbitraire".
M. Darmanin a affirmé mercredi que les journalistes "doivent se rapprocher des autorités" en amont pour "pouvoir rendre compte, faire (leur) travail". Cible de vives critiques, il s'est repris dans la soirée, affirmant dans un tweet, que le schéma national du maintien de l’ordre qu'il a présenté en septembre "prévoit que les journalistes peuvent, sans en avoir l’obligation, prendre contact avec les préfectures en amont des manifestations".
D'autres rassemblements ont eu lieu dans des grandes villes comme Lyon, Rennes, Marseille.
- En quête d'"équilibre" -
La défiance des opposants à la proposition de loi de LREM et son allié Agir se focalise sur cet article 24 qui prévoit d'encadrer l'image des forces de l'ordre.
Débattu sans doute en fin de semaine, il prévoit de pénaliser d'un an de prison et 45.000 euros d'amende la diffusion de "l'image du visage ou tout autre élément d'identification" d'un policier ou d'un gendarme en intervention, lorsque celle-ci a pour but de porter "atteinte à son intégrité physique ou psychique".
Soutenue par les syndicats policiers, la mesure fait bondir représentants des journalistes et défenseurs des libertés publiques.
La semaine dernière, Gérald Darmanin avait plaidé pour un durcissement de la mesure, en voulant imposer le floutage obligatoire des forces de l'ordre, une orientation plus proche de LR que des positions des "marcheurs". Avant de mettre sa proposition sous l'éteignoir.
Désireuse d'évacuer "les caricatures", la majorité paraît faire un pas en direction des opposants, dont font partie ses alliés du MoDem qui veulent supprimer cet article 24.
Le chef de file des députés LREM Christophe Castaner a dressé mardi un inventaire des cas de figure où cette mesure ne s'appliquerait pas, assurant que "le respect des libertés fondamentales est total".
Le député LREM Roland Lescure a suggéré de "peut-être faire évoluer la rédaction" pour rappeler la "liberté de la presse".
"Il y a un droit évidemment absolu dans le cadre d'une manifestation à filmer et à diffuser des opérations de maintien de l'ordre", a aussi assuré le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. "Sans doute les débats parlementaires permettront de le reconfirmer".
Pour tenter de trouver un "équilibre", la majorité a dans sa manche plusieurs amendements déposés par Sacha Houlié et d'autres députés LREM, garantissant explicitement la liberté de la presse.
En attendant dans l'hémicycle, les députés ont plongé dans les prérogatives des polices municipales. Gérald Darmanin a écarté l'hypothèse d'un armement obligatoire, voulant laisser le choix aux collectivités.
Cette première lecture doit se poursuivre jusqu'à vendredi, avant un vote solennel mardi.