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Une maire empêchée de prononcer un discours sur un ring de sumo, alors que ses homologues masculins le font régulièrement, s'est engagée à combattre le sexisme de ce sport traditionnel japonais.
"Cette fois je ne lâcherai pas (...) Je suis déterminée à faire une pétition tous les six mois", a déclaré Tomoko Nakagawa dans un entretien avec l'AFP avant de présenter le dossier aux autorités du sumo à Tokyo.
"Je veux qu'ils ne restent plus jamais vagues sur la question. Je veux que l'association entende clairement ma voix et entame le débat sur une révision" de cette pratique interdisant aux femmes d'accéder au dohyo, la piste d'argile où se déroulent les combats.
Cette question a récemment fait les grands titres des médias japonais et internationaux après que des femmes, dont au moins une infirmière, eurent été appelées à quitter le ring alors qu'elles s'étaient précipitées pour faire un massage cardiaque à un homme pris d'un malaise.
- 'Nationalisme' -
Les origines du sumo remontent à plus de 2.000 ans et il conserve de nombreux rituels religieux shinto. Le ring est ainsi considéré comme un lieu sacré et l'accès aux femmes, jugées "impures", y est interdit.
Pour Mme Nakagawa, maire de la ville de Takarazuka, près de Kobe (ouest), il s'agit ni plus ni moins de "discrimination".
"Ils mettent en avant le prestige du sumo et le fait qu'il s'agisse du sport national et chassent les femmes pour promouvoir le nationalisme", dit-elle.
Ce mois-ci, Mme Nakagawa a perdu sa bataille et n'a pu parler depuis le dohyo mais plus bas, au pied de celui-ci. Elle a profité de l'occasion pour protester contre cette différence de traitement entre responsables officiels masculins et féminins.
- Absence de débat -
"Je suis une élue femme mais je suis un être humain", a lancé Tomoko Nakagawa. "Même si je suis maire, parce que je suis une femme, je ne peux faire de discours dans l'arène. C'est regrettable et humiliant", a-t-elle dit, sous les applaudissements de la foule.
Deux jours plus tard, un maire de sexe masculin prononçait un discours depuis une arène.
Le chef de l'association du sumo, qui se fait appeler Hakkaku, a présenté des excuses au sujet des femmes secouristes appelées à quitter le ring, "un acte déplacé" dans une situation où la vie d'une personne était en danger.
Mais l'association a rapidement déclenché une autre controverse en demandant que les filles soient exclues d'activités de sumo destinées aux enfants, évoquant "des questions de sécurité".
"Le sumo n'est pas pour des gens d'une religion spécifique. C'est un sport national", a souligné Mme Nakagawa. Parler de la "tradition" n'est qu'une façon de clore tout débat sur cette habitude, estime-t-elle.
"La société japonaise n'a cessé de remettre à plus tard des discussions sur des questions qui devraient être soulevées", a dit l'élue, une des 19 femmes maires dans un pays qui compte environ 700 villes. "Si on ne change pas les choses qui sont abusives, le Japon sera éternellement en retard sur autres en ce qui concerne la question des femmes", a-t-elle déclaré à la presse après avoir rencontré des responsables de l'association de sumo.
"Ce n'est que le début d'une bataille (...), les hommes prononcent des discours sur le dohyo et les femmes le font en contrebas. C'est embarrassant", lance-t-elle.