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Jean, qui nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous, s'étonne de la présence d'un insecte ravageur sur ses plants de pommes de terre. À 75 ans, Jean est surpris par le retour de ce petit indésirable qu'il pensait disparu depuis de nombreuses années.
Jean, pensionné, cultive ses propres pommes de terre à Court-Saint-Étienne (dans le Brabant wallon). Depuis près de 50 ans, il récolte entre 50 et 70 kg de pommes de terre. Mais depuis quelques jours, en regardant de plus près ses plants, il remarque qu'un intrus s'est invité sur les feuilles.
Après avoir subi la sécheresse, ses pommes de terre sont désormais devenues la cible des doryphores. "J'ai eu la mauvaise surprise de découvrir cet insecte en grand nombre et sous toutes ses formes sur la plupart des plants. J'ai récolté près de 100 individus et je vais devoir vérifier tous les jours pour en éliminer le plus possible", s'exclame-t-il.
En effet, depuis cette découverte, Jean scrute ses plantations. "Ça peut être très prolifique. Ça mange les feuilles et ça se reproduit en grand nombre", explique Jean. Pour ce passionné, pas question de traiter chimiquement. C'est muni d'un bocal en verre qu'il part à la recherche de ce petit invité qui peut malgré tout faire d'importants dégâts s'il élit domicile trop longtemps. "On sait que c'est épisodique donc je prends la peine de faire une visite dans les rangs de pommes de terre et ramasser les bestioles que l'on trouve", souligne Jean.
À 75 ans, ce pensionné parle d'une réelle surprise, car il pensait que cet insecte avec disparu depuis son enfance. "Quand mes grands-parents étaient enfants, on donnait congé aux enfants pour ramasser les doryphores", se rappelle-t-il. Il s'interroge donc sur cette irruption soudaine des doryphores. "Pourquoi tout d'un coup une éclosion plus importante alors que certaines années, on n'en voit pas. Est-ce que c'est dû au réchauffement climatique ou aux vents chauds qui apportent des insectes de toute sorte ?", se demande-t-il.
Le doryphore est un insecte ravageur qui provient des Etats-Unis. Il est arrivé après la Première Guerre mondiale, après l'importation de pommes de terre. "À ce moment-là, c'était vraiment très problématique, car on avait des parcelles qui n'avaient plus une seule feuille. Ça s'est un peu estompé. Mais depuis une quinzaine d'années, on les retrouve dans les cultures, dont des potagers. Ils peuvent parfois arriver à induire jusqu'à 50 % de feuilles qui disparaissent. Donc là, c'est très surprenant", éclaire Frédéric Francis, professeur à la Faculté agronomique de Gembloux.
Plus il fait chaud, plus l'activité des insectes est importante.
Seule l'observation permet de détecter la présence de ce dernier. "Plus il fait chaud, plus l'activité des insectes est importante et donc plus on aura des dégâts qui sont importants. De plus, quand on est face à des périodes de sécheresse, la plante a moins l'occasion de se développer et produire de nouvelles feuilles. Donc si on se retrouve à des périodes sèches, le phénomène est plus visible et marque davantage le citoyen", indique Frédéric Francis.
Un constat partagé par Louis Hautier, chercheur au Centre wallon de Recherches agronomiques. "On estime qu'au-dessus de 30°C, le doryphore fait son cycle (de l'œuf à la larve au stade final) en 15 jours", précise-t-il.
L'augmentation du nombre de parcelles de pommes de terre en Belgique entraîne également plus de probabilités pour que le doryphore puisse se reproduire. Dans les années 90, on comptabilisait 50.000 hectares de pommes de terre. Aujourd'hui, ce chiffre avoisine 95.000.
C'est un insecte qui hiberne dans le sol.
De son côté, la Fiwap (Filière wallonne de la pomme de terre) est bien consciente de cette recrudescence. Elle sensibilise ainsi les producteurs des dégâts que cet insecte ravageur peut entraîner. Elle travaille également aux côtés du Centre wallon de Recherches agronomiques afin de suivre les populations de doryphores et indiquer aux agriculteurs si un traitement chimique s'impose ou non. "C'est un insecte qui hiberne dans le sol et qui va ressortir l'année prochaine, notamment sur des repousses de pommes de terre sur d'autres cultures. Donc il faut parvenir à casser ce cycle d'une année sur l'autre", explique Pierre Lebrun, coordinateur de la Fiwap.
Endiguer la multiplication des doryphores
À l'origine, la chasse aux doryphores s'effectuait manuellement. Des insecticides ont ensuite été développés et utilisés sur des parcelles. "Il faut parfois traiter chimiquement la parcelle afin d'endiguer la multiplication des doryphores et d'essayer de ne pas aller plus loin que la deuxième génération en route", estime le coordinateur.
Les deux professionnels nous montrent une parcelle attaquée par les doryphores à Gembloux. Ici, pas de doute possible. Des larves au stade adulte, les insectes ravageurs sont clairement visibles. Pierre Lebrun nous explique qu'une expérimentation est en cours sur ce terrain. Une technique de lutte mécanique par brossage va ainsi y être expérimentée. "Le but va être d'essayer de faire tomber les larves et les adultes dans des bacs montés sur une machine de façon à sortir les doryphores de la parcelle sans intervention chimique", renseigne-t-il.
Avant d'ajouter : "Dans les prochaines années, on peut s'attendre à ce que la technique se développe. D'abord dans le secteur de production biologique où il n'y a pas d'insecticides de synthèse qui sont utilisés. Et ensuite certainement dans la culture conventionnelle pour réduire encore l'usage de pesticides".
ce n'est pas nouveau, moi cela fait déjà quelques années que j'en ai sur mes plants de pommes de terre ...;
Ray G