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Presse en ligne: la TVA à 2,1% adoptée à l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté mardi à l'unanimité une proposition de loi ramenant la TVA sur la presse en ligne à 2,1% au lieu de 20%, comme pour la presse imprimée, au risque d'être en infraction vis-à-vis des règles européennes.

Sans même attendre, l'administration fiscale a déjà publié lundi une directive qui, rétroactivement au 1er février, stipule que la TVA applicable à ces services est désormais de 2,1%.

Le texte de loi qui régularise cette décision, déposé par le groupe socialiste et qui va maintenant partir au Sénat, concrétise l'engagement du gouvernement qui a promis le 17 janvier d'aligner au plus vite la TVA de la presse en ligne et de la presse papier. Le gouvernement a d'ailleurs déclaré l'urgence sur ce texte (une seule lecture par chambre).

Soucieux de mettre fin à "une inégalité de traitement" entre presse en ligne et presse sur papier et d'accompagner la "révolution" d'une presse en quête d'un modèle économique loin de Gutenberg, tous les groupes se sont déclarés pour. Face au risque que la France se retrouve exposée à un contentieux européen par non-respect des règles, évoqué par plusieurs députés, la ministre Aurélie Filipetti a évoqué une position "courageuse" de Paris et une évolution de l'Allemagne dans le sens français.

Cette mesure était réclamée depuis des mois par les sites d'informations en ligne, en tête desquels Mediapart, dirigé par Edwy Plenel.

La demande était devenue urgente car les éditeurs Mediapart, Indigo (éditeur de La Lettre A) et Terra Eco, trois sites d'info piliers du jeune Syndicat de la presse en ligne (Spiil), font l'objet depuis décembre d'un redressement fiscal pour s'être auto-appliqués cette TVA réduite depuis plusieurs années.

Le redressement est tel -- le fisc réclame déjà 1 million à Mediapart, et pour une seule de ses années d'infraction -- qu'il risquait de les mettre en faillite. Le site Arrêt sur Images est également poursuivi pour cette même raison depuis trois ans.

Alors que les députés avaient demandé au gouvernement d'effacer le redressement fiscal de Mediapart, le rapporteur du texte Patrick Bloche (PS) a indiqué mardi qu'"il n'existe pas de précédent de modification rétroactive de loi fiscale pour éteindre des contrôles en cours".

Fronde fiscale inédite

Toutes les fédérations professionnelles de la presse papier soutenaient cette demande: ils sont également concernés, puisque tous ont développé des sites d'info en ligne.

Et depuis cet été tous les grands quotidiens nationaux ont décidé eux aussi de s'auto-appliquer le taux réduit de 2,1% sur leurs activités en ligne, sans attendre le changement de loi, une fronde fiscale inédite dans le secteur.

Cette mesure s'appliquera uniquement à la vente d'information en ligne par les sites d'informations (généralistes ou spécialisés) reconnus comme tel, et non sur leurs recettes publicitaires ni pour les autres types de sites internet. Il ne s'agit donc que d'une petite partie des recettes de la presse en ligne dont l'immense majorité est pour l'instant gratuite, tirant ses revenus de la publicité.

Mais la TVA réduite pourrait aider certains sites à augmenter le nombre d'articles payants, qui pourront ainsi être moins chers. Plusieurs grands titres ont accru ces derniers mois la partie payante de leurs informations.

La presse en ligne, très consultée par les internautes, reste pour l?instant économiquement marginale face au papier, en raison du faible nombre d'abonnés et du bas prix de la publicité en ligne.

Les sites d'information attirent chaque mois des millions de visiteurs uniques, alors que les journaux imprimés se vendent de moins en moins.

Ainsi en décembre, les trois premiers sites d'infos français, ceux du Figaro, du Monde et du Parisien, ont attiré 23,9 millions de visiteurs uniques, selon les derniers chiffres de Médiamétrie.

En décidant unilatéralement de ce taux réduit, au nom de "la neutralité entre les supports", la France prend le risque de sanctions européennes, car en principe tout changement de TVA doit être décidé au niveau européen. La France avait déjà pris la même décision pour le livre numérique et encourt des sanctions de Bruxelles.

Paris applique en effet depuis le 1er janvier 2012 une TVA réduite, de 7% puis de 5,5% actuellement, sur les livres numériques comme sur les livres papier. Le Luxembourg lui a emboîté le pas et l'Allemagne soutient la position française.

En face, la Commission européenne, qui estime que la France et le Luxembourg contreviennent aux règles de l'UE (directive TVA), a ouvert en juillet 2012 une procédure d'infraction contre ces deux pays.

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