Si notre pays connait une sévère récession, il devrait éviter la dépression, cad plusieurs années de croissance négative d'affilée, selon la Banque Nationale Belge qui a livré ses prévisions économiques hier. Mais il va falloir se préparer au pire : la BNB prévoit la perte de 140.000 emplois sur le marché belge en 2 ans.
La Belgique est toujours confrontée à une sévère récession dont les effets ne se sont pas encore fait totalement sentir, notamment sur le marché de l'emploi, mais l'économie va plus que probablement éviter une dépression, c'est-à-dire plusieurs années de croissance négative, selon les projections économiques 2009-2010 présentées par la Banque nationale de Belgique (BNB).
Les prévisions économiques de la Banque nationale ont encore été revues à la baisse depuis les dernières projections établies en février. Dans un contexte de récession mondiale et d'une chute du commerce mondial qui n'avait plus été observée depuis les années '30, le PIB belge devrait se contracter de 3,5% en 2009, sa pire performance depuis des décennies, et de 0,2% en 2010, après avoir connu une croissance de 1% en 2008.
"Le premier trimestre 2009 a été le pire. On s'attend à des chiffres moins mauvais mais encore négatifs aux deuxième, troisième et quatrième trimestres 2009. Les chiffres deviendraient positifs sur base trimestrielle à partir du premier trimestre 2010 et positifs sur base annuelle à partir du troisième trimestre 2010 seulement", a expliqué Guy Quaden, gouverneur de la Banque nationale de Belgique, évoquant "une reprise modérée en 2010".
Du "jamais vu"
Toutes les composantes de l'activité économique sont touchées par la crise et notamment la consommation des ménages, qui devrait diminuer de 1% en 2009. Les investissements des entreprises devraient se contracter de 7% et les exportations de 16%, du "jamais vu", insiste-t-on à la BNB. Pour 2010, les trois moteurs de la croissance, dépenses des ménages (+0,2%), investissements des entreprises (-3,3%) et exportations (-2,3%), resteraient largement en panne. "Les chiffres restent mauvais mais seraient beaucoup moins mauvais", a commenté Guy Quaden. "Il y a quatre mois, tous les signaux étaient négatifs. Maintenant, ils sont plus mitigés", a-t-il ajouté.
Bonnes nouvelles : baisse de l'inflation, stabilisation des marchés, ...
Au rayon des bonnes nouvelles, Guy Quaden a pointé la forte baisse de l'inflation, qui joue en faveur du pouvoir d'achat. L'inflation devrait rester négative pendant quelques mois, en raison de la forte baisse des prix des produits pétroliers par rapport à l'année précédente. L'inflation négative pourrait même dépasser 1% pendant l'été mais cette situation devrait rester temporaire. "Selon notre pronostic, cette désinflation n'est pas une délation", a rassuré le gouverneur de la Banque nationale.
Autre motif d'optimisme, les stocks des entreprises, qui ont fortement diminué au cours des derniers mois, devront tôt et tard être reconstitués.
La stabilisation des marchés monétaire et boursier, le fait que la chute du commerce mondial ait sans doute atteint son plus bas niveau et la stabilisation d'une série d'indicateurs de confiance, y compris en Belgique, sont également des éléments positifs.
Mauvaises nouvelles : 140.000 emplois amenés à disparaître
A l'inverse, Guy Quaden a pointé une série de facteurs qui demeurent préoccupants. Il s'agit entre autres du fait que le système financier, en convalescence, ne semble pas avoir été complètement assaini.
Autre gros point noir: l'évolution de l'emploi dans les prochains mois. "Jusqu'à présent, l'augmentation du taux de chômage a été assez limitée en Belgique parce que les entreprises ont mis fin aux contrats intérimaires et aux heures supplémentaires et ont eu recours au chômage économique temporaire. Mais ces éléments de flexibilité ne peuvent pas être utilisés indéfiniment", a encore commenté Guy Quaden.
La BNB s'attend ainsi à la destruction de quelque 36.000 emplois en 2009 et de 80.000 emplois en 2010. "Entre fin 2008 et fin 2010, cela fait 140.000 emplois en moins. La reprise de l'activité se fera probablement au début de 2010 mais la reprise de l'emploi ne se fera pas avant fin 2010", a précisé M. Quaden.
Bravo pour l'interventionisme des gouvernements
Le gouverneur a enfin souligné l'importance de l'intervention des autorités budgétaires (les gouvernements) et monétaires (les banques centrales, dont la BCE), dont les politiques "extrêmement accommodantes" ont permis que l'économie ne sombre dans la dépression. "Ces stratégies, souhaitables à court terme, ne sont pas soutenables à long terme", a-t-il toutefois martelé. "Il faut maintenir la confiance économique des opérateurs mais sortir à un moment donné de ces politiques trop accommodantes via des stratégies de sortie implémentées de manière graduelle et clairement communiquées", a conclu Guy Quaden.
