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Mélenchon joue la carte de l'unité et veut dialoguer avec la gauche, divisée

Tournant stratégique et prélude à une convergence des gauches ? Jean-Luc Mélenchon, qui n'avait de cesse depuis des mois de mettre à distance la "vieille gauche" en "décomposition", appelle désormais au "dialogue" au sein de la "mouvance progressiste".

Signe ostensible de cette ouverture, le député LFI, qui n'avait pas accordé d'interview à "Libération" depuis 2012, pose cravaté à la Une du quotidien pour un entretien de six pages. Pile le jour de la "marée populaire" qu'il a longtemps appelée de ses voeux et où il a exhorté les manifestants, depuis Marseille, à former "ce front populaire dont le peuple a besoin".

"Depuis le début, je sais qu'il y a des temps. Le premier: il fallait passer en tête dans notre espace politique. C'est fait. J'ai une nouvelle étape à franchir. Par vous, j'ouvre un dialogue", explique l'ancien candidat à la présidentielle, qui s'était déjà attaché ces dernières semaines à se rabibocher avec le monde syndical.

Se voyant une "responsabilité" nouvelle vu cette place "en tête" à gauche, Mélenchon appelle les autres formations politiques à un "dialogue respectueux et responsable", et en même temps à reconnaître son leadership.

"Acceptez-vous le fait que La France insoumise, dont le président du groupe parlementaire se nomme Jean-Luc Mélenchon, à une nouvelle responsabilité dans notre espace politique commun ?", demande-t-il en s'adressant aux lecteurs de "Libé".

Sur le fond, le député des Bouches-du-Rhône et ancien eurodéputé s'efforce de polir son discours européen. "Nous allons envoyer le signal dynamisant d'une alternative européenne crédible", affirme-t-il, en rappelant que la France insoumise est "partie prenante et fondatrice d'une coalition européenne qui s'appelle +Maintenant, le peuple+" avec les Espagnols de Podemos et le Bloco portugais.

"Face au chauvinisme, nous sommes internationalistes", proclame-t-il pour contrer les critiques de souverainisme.

- +Découper puis rassembler+ -

Comme en écho à cette interview, le député Insoumis François Ruffin a développé auprès du média en ligne reporterre.net la stratégie que doit, selon lui, assumer la France insoumise.

"Je n'ai pas de problème à penser que la France insoumise doit être hégémonique à gauche (...) Il faut que les autres organisations aient l'intelligence de l'accepter et que la France insoumise ait l'intelligence de s'allier avec d'autres composantes à gauche".

Défendant comme Jean-Luc Mélenchon l'idée d'un "Front populaire", le député de la Somme souligne qu'il ne pourra advenir que s'il est acté que "le centre de gravité de la gauche a basculé (du Parti socialiste) vers la France insoumise". Les élections européennes seront, selon lui, un "marqueur" de ce basculement.

Interrogé par l'AFP, un député LFI reconnaît un changement d'"état d'esprit" du chef de file de la France insoumise, se manifestant par "une tonalité plus ouverte et un raccordement à la gauche plus net". "Il faut savoir découper, puis rassembler. On change d'étape", a-t-il résumé.

Au sein du cortège parisien, les différents responsables politiques se montraient prudents vis-à-vis de cette nouvelle posture de l'ancien candidat à la présidentielle. "Aujourd'hui, je parle du 26 mai", a répondu Pierre Laurent. "Je n'ai pas lu l'interview", a botté en touche Olivier Besancenot. "Je vous dirai lundi", a esquivé Benoît Hamon.

"S'il considère qu'il faut se remettre dans le champ politique de la gauche tant mieux ", a réagi auprès de l'AFP Pascal Cherki. Mais pour l'ancien député PS, désormais membre de Génération-s, le "préalable au rassemblement ne peut pas être d'accepter le leadership de tel ou tel".

"La première place à la présidentielle de Jean-Luc Mélenchon lui donne une responsabilité, celle de réfléchir à une méthode pour construire le rassemblement", a-t-il jugé.

L'ancien Premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis, interrogé par téléphone, s'est montré sceptique: "Mélenchon oscille entre deux attitudes: aujourd'hui front populaire de combat, mais le 5 mai avec François Ruffin c'était le front populiste".

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