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"Ils les renvoient au Mexique": au sud de la frontière, des centres pour migrants débordés

Dans une chaleur étouffante, 46 tentes sont agglutinées dans un hangar obscur de Tijuana, ville mexicaine à la frontière américaine: des dizaines de migrants attendent ici de résoudre leur processus de demande d'asile aux Etats-Unis.

Seul le rire des enfants vient rompre le silence léthargique dans lequel est plongé l'endroit. A part faire la cuisine et passer le balai, il n'y a rien à faire, sauf attendre.

La plupart de ces personnes sont originaires d'Amérique centrale. Elles ont fui la violence de leur pays et espèrent que les Etats-Unis leur accorderont le statut de réfugié.

Mais depuis qu'un accord a été conclu entre Washington et Mexico, elles doivent maintenant attendre une réponse sur le sol mexicain.

"Du coup cela signifie que les zones dédiées sont pleines", explique à l'AFP Jose Maria Garcia, qui dirige ce refuge, le Juventud 2000 ("Jeunesse 2000" en français), où sont logés 150 migrants, à quelques kilomètres seulement de la grande barrière cuivrée qui sépare les deux pays.

"Les gens viennent de partout et ceux qui parviennent à entrer sont renvoyés au Mexique, ce qui crée de la surpopulation".

Et cela ne risque pas de s'arranger depuis que le gouvernement républicain de Donald Trump a annoncé lundi qu'il allait refuser les demandes d'asile déposées sur son territoire par les migrants n'ayant pas demandé le statut de réfugié au Mexique.

Aux Etats-Unis, depuis que le Protocole de protection des migrants est entré en vigueur en janvier, la situation est bien différente.

Dans la zone de San Diego, en Californie, les centres pour migrants, pleins à craquer il y a encore quelques mois, "sont en train de se vider", affirme Hugo Castro, de l'organisation de défense des migrants Border Angels (Les Anges de la frontière).

"Ils les renvoient au Mexique comme on jetterait ses ordures", déplore-t-il.

- "Si je reviens, ils me tuent" -

A Tijuana, à l'Institut Madre Asunta, un autre refuge géré par des religieuses, ce sont 130 personnes qui vivent actuellement dans cet espace conçu pour 44 habitants.

Pas de quoi décourager la soeur Salomé Limas, qui y travaille depuis six ans: "On trouvera de la place!", promet-elle.

Cette religieuse de 38 ans est sur tous les fronts: elle supervise l'agrandissement d'une salle de jeux, qui sert de dortoir de la nuit, tout en cajolant un enfant qui regarde passer le menu du jour: 10 kilos de pâtes au jambon avec de la salade.

Dans un autre salon, des volontaires de l'Unicef distribuent peintures, crayons et papier aux enfants.

Brian, 7 ans et appliqué, dessine une maison qui ressemble au refuge dans lequel il habite maintenant.

Lui jure que non, qu'il s'agit de sa maison au Honduras.

Dans le patio central de cette bâtisse aux murs bleu clair, les femmes utilisent la rampe d'un escalier pour étendre des vêtements fraîchement lavés.

La plupart sont des dons reçus par les migrants, qui sont le plus souvent arrivés sans rien.

C'est le cas, par exemple, de Maria, témoin d'un "massacre" commis par le gang ultra-violent MS-13 dans un marché au Honduras.

Quand elle a entendu les coups de feu, elle s'est cachée dans une benne à ordures mais cela ne l'a pas empêchée d'être retrouvée par les membres du gang, qui ont menacé de la tuer et de violer ses filles adolescentes.

Après trois mois d'un difficile voyage, elle est arrivée à Tijuana.

"Je n'ai jamais envisagé d'aller aux Etats-Unis, mais si je reviens, ils me tuent", explique cette femme, identifiée sous un autre nom pour des raisons de sécurité, qui attend toujours une réponse des autorités américaines.

"Je vais demander une chance, s'ils me la donnent, j'en serai éternellement reconnaissante", explique-t-elle.

"Sinon, le Mexique est un très grand et beau pays".

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