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Coronavirus - Couples séparés par une frontière: Ayla n'a pas vu son petit ami américain depuis 8 mois

La jeune femme de 24 ans entretient une relation à distance avec son compagnon américain depuis deux ans. La crise du coronavirus met à mal leur projet de vie.

Ayla, bruxelloise, vit une belle histoire d'amour avec Diego, américain. Jusqu'à présent, ils sont toujours parvenus à surmonter l'obstacle de la distance, en se retrouvant régulièrement pour des vacances ou des week-ends dans différents endroits du globe. Voyage après voyage, le couple franchissait les étapes... jusqu'à ce que la crise du coronavirus paralyse les déplacements à l'échelle planétaire. "Nous n'avons aucun droit de nous voir", déplore Ayla via la bouton orange Alertez-nous. Si le gouvernement belge a bien annoncé de nouvelles mesures pour permettre aux couples sans statut juridique de se retrouver, dans la pratique, leurs retrouvailles restent impossibles, nous a-t-elle expliqué.

Une belle rencontre au bout du monde, un couple qui se construisait

Ayla et Diego se sont rencontrés sur une plage de Corée du Sud. "Fan d'Asie", la jeune femme était dans la péninsule pour les vacances, tandis que Diego y travaillait provisoirement. Les deux jeunes ont voyagé ensemble dans le pays puis ont décidé de se revoir. C'était le début de leur histoire qui les a ensuite menés aux États-Unis, aux Acores, à Lisbonne... Ils se sont vus pour la dernière fois dans la capitale portugaise au mois de février. Diego était censé rencontrer la famille d'Ayla pour la première fois en mars, à Bruxelles.

Une semaine avant ce rendez-vous, le 12 mars, le Conseil national de sécurité a annoncé les premières mesures en vue d'éviter la propagation du coronavirus. Quelques jours plus tard, tous les pays de l'Union européenne décidaient une restriction des déplacements non essentiels effectués au départ de pays tiers à destination de la zone UE. Les frontières se sont fermées les unes après les autres, tandis que les vols d'avion étaient annulés.


Ayla et Diego aux Açores, en 2019

Sans perspective de retrouvailles, leur relation à distance minée

Depuis lors, Ayla échange avec Diego via l'application Messenger, ce qui n'est pas toujours évident à cause des 6 heures de décalage. "C'est souvent à des horaires précis et on n'a pas vraiment le choix que de parler dans ces tranches horaires", raconte-t-elle. Mais le virtuel ne remplace pas les moments passés ensemble : "Ne restons-nous pas des humains ayant besoin de voir nos êtres les plus proches ?", dit Ayla. Et cette période dont on ne voit pas le bout les empêche de se projeter. "En relation à distance, on se dit toujours qu'il y a une date. On peut planifier, on se voit dans deux semaines, dans trois mois... Maintenant avec le coronavirus, on se demande : 'est-ce que les frontières seront rouvertes pour 2021 ?'"

Si le couple a dû tirer un trait sur les voyages et les week-ends en amoureux, la crise du coronavirus met également en péril leur plan sur le plus long terme. Ayla envisageait de rejoindre Diego pour vivre avec lui aux Etats-Unis : "Tout allait bien, tout se mettait en place. Mais avec le coronavirus, c'est un point d'interrogation. On ne sait rien planifier", regrette-t-elle. "Tout cela impacte directement notre vie de couple, nos émotions, notre relation, confie-t-elle. Comment se projeter dans quelque chose de positif, pendant cette situation si négative, quand rien ne nous autorise à le faire ?"

La visite à un partenaire à l'étranger, considérée comme un voyage essentiel depuis le 1er septembre

Lors du dernier Conseil national de sécurité, la Première ministre belge, Sophie Wilmès, a annoncé que les couples sans lien juridique qui habitent dans deux pays différents pourraient se revoir s’ils pouvaient prouver une relation de 2 ans au moins. "Les éléments de preuve peuvent être des documents officiels, des tickets d’avion, des photos, explique Antoine Iseux, porte-parole du Centre de crise. Pour venir en Belgique, le ou la partenaire qui vit à l'étranger devra présenter ces éléments à l’ambassade ou au consulat belge sur place pour obtenir son visa (ou une attestation de déplacement essentiel, si il n’y a pas de nécessité de visa)."

Dans la pratique, la venue de Diego en Belgique s'avère irréaliste

"Quand j'ai vu cette information, je me suis dit 'ah, une porte s'ouvre'", confie Ayla. Mais concrètement, il n'est pas envisageable pour Diego de venir en Belgique. D'une part, de retour aux États-unis, son employeur lui demanderait de prendre sur ses congés pour se mettre en quarantaine pendant 14 jours, explique Ayla. "Tout le monde n'a pas autant de congé. Est-ce que ça vaut vraiment le coup ?", remarque-t-elle. D'autre part, comme de nombreux employeurs aux États-Unis, celui de Diego recommande de ne pas voyager pour empêcher la propagation du virus.

Les États-Unis ne prévoient pas d'exception pour les couples sans lien juridique

Ayla a multiplié les démarches pour tenter de voir Diego. Elle aimerait pouvoir "sauver sa vie, son couple et ses rêves", confie-t-elle. La jeune femme s'est renseignée sur la possibilité pour elle de se rendre aux États-Unis. De manière générale, les déplacements vers les États-Unis sont interdits puisqu'ils sont une zone rouge. "En dehors de l’Europe, tout pays est considéré comme zone rouge par les Affaires étrangères", indique Antoine Iseux. Mais si Ayla présentait les preuves de sa relation de plus deux ans avec Diego, les autorités belges considéreraient son voyage comme essentiel. "’Il faudra bien sûr tenir compte également des mesures en vigueur dans le pays de destination", souligne le porte-parole du Centre de crise.

La Belgique ouvre les portes mais pas les États-Unis

Or, du côté de l'ambassade des États-Unis en Belgique, c'est un "non" catégorique pour un tel voyage. En effet, Donald Trump, a annoncé, dès le mois de mars, la suspension de tous les voyages d’étrangers depuis l’Europe vers les Etats-Unis pour endiguer l’épidémie due au coronavirus. "La décision du CNS n'a aucun effet sur les restrictions actuelles aux Etats-Unis et l’exception ne peut être invoquée que s'il existe un lien juridique entre les couples", indique Mete Öztürk, porte-parole de l'ambassade des États-Unis en Belgique. "La Belgique ouvre les portes mais pas les États-Unis", résume Ayla. "C'est très dommage qu'il n'y ait pas une entente internationale sur ce sujet", déplore-t-elle.

Deux semaines de vacances sans Diego

Ayla et Diego n'ont donc pas d'autre choix que de prendre leur mal en patience. "On est au bout du rouleau. Comme il n'y a pas d'objectif, ça commence à être très très long", souffle-t-elle. La jeune femme, qui travaille pour une société de fret et de logistique, a pris deux semaines de congés au mois septembre. "Je les ai pris le plus tard possible en espérant une ouverture des frontières", raconte-t-elle, dépitée. Je me retrouve à une semaine de mes vacances et je n'ai rien planifié".

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