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Le loyer de Jessica vient d'être indexé de 40€, et ça tombe au plus mauvais moment: "On mange beaucoup de pâtes..."

Le coût de la vie devient de plus en plus important, tout devient plus cher. Comme tout augmente, certains propriétaires choisissent d'indexer, donc d'augmenter, leurs loyers. Mais pour Jessica, habitante de Beaufays dans la commune de Chaudfontaine, cette indexation tombe au plus mauvais moment. Peut-elle la contester ?

Jessica vit depuis trois ans avec son mari et son garçon de 12 ans, dans une maison qu'elle adore à Beaufays, dans la province de Liège. "C'est un endroit qui nous plaît vraiment bien. Beaufays c'est très beau. On est tranquille, dans un cul-de-sac, c'est magnifique". Ces locataires ont pourtant récemment déchanté lorsqu'une lettre de leurs propriétaires leur est parvenue. Celle-ci exposait le calcul qui fixe le taux d'indexation : le résultat est une augmentation de loyer de 36,89 euros.

Cette somme est un coup de massue pour ce couple. Récemment tombés dans un accident de moto, cette magasinière et ce soudeur de profession sont en incapacité de travail pour une période indéterminée. Ils perçoivent donc tous les deux des indemnités à hauteur de 1.100 euros chacun, soit 2.200 euros par mois pour trois personnes. Aujourd'hui, ils déplorent ces 36 euros de plus à dépenser chaque mois dans le loyer qui était à hauteur, jusqu'ici, de 709 euros, hors charges.

Cette indexation est d'autant plus une surprise pour cette famille que l'année passée, elle était à hauteur de 4,50 euros : "Je ne m'attendais pas à un index pareil. Je suis d'accord pour rajouter 5 euros, mais pas presque 40 ! C'est la première fois que je vois ça" nous explique-t-elle. Pour eux, ces 35 euros, soit près de 440 euros par an, représentent une partie du budget qui n'est pas négligeable.

"C'est pas parce que c'est un droit que c'est une obligation !" se dit-elle. Désemparée, Jessica s'est empressée de téléphoner à sa propriétaire "pour lui dire que pour nous c'est quand même un gros changement. C'est 40 euros qu'on a de moins. On a demandé de diminuer un peu, disons au moins de 20 euros mais elle a totalement refusé, en disant que pour eux aussi, le coût de la vie avait augmenté".

Depuis qu'on a reçu la lettre, on se demande ce qui va nous arriver plus tard, dans les années à venir

Un confort de vie radicalement changé

Depuis l'accident, la pandémie et l'augmentation du prix du mazout, le confort de vie de cette famille a radicalement baissé : "On travaillait, c'était complètement différent. On a changé de télévision, on a fait des travaux, on se meublait. On avait un beau ménage".

Aujourd'hui, ces parents font ce qu'ils peuvent pour joindre les deux bouts, tout en préservant leur fils de 12 ans : "On ne lui fait pas ressentir, mais il voit bien qu'on mange beaucoup de pâtes par exemple. Il voit que quand on fait des courses, on fait attention. On ne mange de la viande qu'une seule fois par semaine. On prend des produits de Colruyt, on essaye d'avoir des promotions".

L'augmentation de son loyer est une difficulté de plus. Depuis cette nouvelle, Jessica et son mari sont inquiets "parce que je ne sais pas comment va se passer l'avenir. Il faut mettre des sous de côté. On vit dans l'incertitude, on est stressés avec ça. Depuis qu'on a reçu la lettre, on se demande ce qui va nous arriver plus tard, dans les années à venir". La famille songe désormais à recourir à la Croix-Rouge ou aux Restos du Cœur pour se nourrir.

Résignée, Jessica nous confie que si le loyer devait encore augmenter à l'avenir, sa famille devrait quitter la maison qu'elle aime tant : "Si ça va au-delà de 800 euros d'ici deux-trois ans, on commencera à chercher ailleurs. On déménage si elle rajoute 40 euros de plus l'année prochaine."

Obligatoire, l'indexation ?

L'indexation est une adaptation du loyer à l'évolution du coût de la vie. C'est une pratique qui n'est pas obligatoire, mais peut-être appliquée selon certaines conditions. Ce montant est calculé selon une formule spécifique : le loyer de base (hors charge), multiplié par le nouvel indice santé (du mois qui précède l'anniversaire du début du bail) et divisé par l'indice de santé de base (du mois qui précède la signature du bail).

Ce calcul dépend donc de "l'indice santé". La porte-parole de Statbel explique que celui-ci "suit l'indice de consommation général, mais on enlève certains produits comme les boissons alcoolisées, le tabac ou les carburants. Donc l'indice santé suit l'inflation". L'indexation du loyer de la famille de Jessica n'étonne donc pas Wendy Schelfaut, puisque "l'inflation évolue de manière historique. L'indice de consommation est comparable à celui de 1983". Selon elle, c'est une conséquence de l'augmentation du prix de l'énergie.

Que peut-on faire lorsque l'on voit, comme Jessica, son loyer exploser ? "Il faut vérifier si l'indexation est faite dans les règles, et est prévue par le contrat" nous explique Aurore Baraillon, juriste en matière de logement. Il convient donc de refaire le calcul pour s'assurer qu'aucune erreur ne s'y soit glissée, et que le propriétaire du bail ne dépasse pas le résultat. Autre règle : "Le propriétaire doit faire une demande écrite", autrement dit, le bail ne peut pas être changé de manière orale. Enfin, depuis le 1er septembre 2018, et seulement en Wallonie, un propriétaire ne peut plus indexer si le bail n'est pas enregistré.

Si malgré toutes ces vérifications, tout est fait dans les règles, il n'y a rien à faire, c'est la loi.

Pas de changement prévenu pour le moment

Le Syndicat des locataires, porté par son secrétaire général José Garcia, déplore la hausse importante des loyers, "quand des loyers dépassent plus de 50% des revenus, ça fait très mal, d'autant plus si on rajoute le prix du gaz et de l'électricité" a-t-il affirmé. "Dans ce cas, nous pensons qu'il faut limiter les augmentations".

Ces demandes ont d’ailleurs reçu un écho au parlement bruxellois, où la secrétaire d’Etat au Logement Nawal Ben Hamou avait proposé de limiter l’indexation à 2%. Une mesure qui a été recalée par DéFi. Le chef de groupe du parti, Emmanuel De Bock a affirmé dans un communiqué que "s'il n'y a pas la moindre mesure équivalente en faveur des bailleurs sur les taxes et le précompte immobilier, cela ne sert à rien que le PS vienne avec ce genre de propositions". Il argumente que cette mesure fragiliserait les bailleurs, et peut-être même les locataires. En effet, selon lui les propriétaires pourraient être enclins à conclure des baux d’un an, renégociés chaque année afin d’intégrer l’inflation.

Finalement, le gouvernement bruxellois n'a pas trouvé de consensus pour cette mesure, selon Belga. En Wallonie, le cabinet du ministre du Logement Christophe Collignon nous a communiqué qu'une réflexion était en cours "dans notre sphère de compétence pour voir comment soulager les ménages".

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