Accueil Actu

Accident de Pierre Palmade: que dit le droit français sur le statut du foetus de la victime enceinte?

Le parquet de Melun a ouvert une enquête pour "homicide involontaire" dans l'affaire de l'accident routier de Pierre Palmade vendredi, au cours duquel une femme enceinte a perdu son enfant, posant la question du statut du fœtus en droit pénal.

La jurisprudence de la Cour de cassation, qui s'est prononcée à plusieurs reprises sur ce sujet au début des années 2000, est claire: en droit pénal, le fœtus n'existe pas, sa mort ne peut donc être reprochée à quiconque. "La jurisprudence est constante, et considère que dès lors que l'enfant n'est pas né, il ne peut y avoir d'infraction homicide, car il n'y a pas de personne humaine", explique la professeure de droit à l'Institut national universitaire d'Albi Sophie Paricard. "Il fait partie du corps de la femme, il n'a pas d'existence autonome". Pour être considéré comme une personne humaine, "il faut être né, vivant et viable", précise-t-elle.

Dans son arrêt de 2002, le quatrième en ce sens en quelques années, la Cour de cassation dit que "le principe de la légalité des délits et des peines, qui impose une interprétation stricte de la loi pénale, s'oppose à ce que l'incrimination d'homicide involontaire s'applique au cas de l'enfant qui n'est pas né vivant". Ce principe essentiel de la légalité des délits et des peines impose que soient précisément énoncés les actes interdits et les peines qui les sanctionnent.

Dans le cadre de l'affaire Pierre Palmade, le parquet a décidé d'ouvrir une enquête pour homicide involontaire. "L'enquête devra démontrer si l'enfant est né vivant puis est décédé, ou s'il était mort avant l'accouchement", a indiqué à l'AFP le procureur de Melun, Jean-Michel Bourlès. "Il faut déterminer s'il a vécu, même quelques secondes". La femme était enceinte de six mois et demi, a-t-il précisé. "Cela peut aussi être une manière de réinterroger cette jurisprudence, qui a désormais 20 ans, car on sait qu'elle a été critiquée par certains à l'époque", avance Sophie Paricard. "À partir de quand est-on vraiment vivant ? La frontière est parfois délicate, et cela peut être intéressant de réinterroger régulièrement la Cour de cassation", dit-elle. Ce sujet, qui suppose de se prononcer sur le début de la vie, réactive généralement le débat autour de l'IVG, ajoute-t-elle.

En 2014, le tribunal correctionnel de Tarbes s'était démarqué de cette jurisprudence en condamnant un automobiliste pour homicide involontaire sur un fœtus dont il avait renversé la mère enceinte de six mois et demi. S'appuyant sur les expertises médicales, le ministère public avait considéré que le fœtus était "viable" et qu'il n'était "mort que du fait de l'accident", à cause "du choc du fœtus contre la paroi utérine". La décision avait finalement été infirmée en appel. Le fœtus bénéficie toutefois de droits civils, comme le droit de voir sa filiation établie par la reconnaissance par ses parents, de recevoir un prénom et un nom.

 

À lire aussi

Sélectionné pour vous