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"L'IA pourrait écraser des milliers de travailleurs en quelques années": le secteur culturel presse pour une régulation urgente

Plusieurs professionnels du monde culturel belge francophone ont pressé jeudi l'ensemble du monde politique à réguler urgemment l'usage de  l'intelligence artificielle, laquelle menacerait des milliers d'emplois dans leur secteur.

Que ce soit pour la création (comme l'écriture de scénarios, la composition de musique,...), au niveau de la production (comme le mixage, le doublage, le sous-titrage) ou encore la distribution (l'élaboration de stratégies marketing, de campagnes de promotion,...), ce sont aujourd'hui tous les maillons de l'industrie artistique qui sont menacés, ont alerté ces professionnels lors d'une audition devant la commission Culture du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.   Ainsi, à titre d'exemple, dans le seul secteur du doublage de films et séries, "il existe aujourd'hui des machines qui permettent de doubler instantanément n'importe quel acteur dans 120 langues étrangères", a illustré Gaëtan Wenders, comédien, administrateur de l'Union des artistes et membre de l'association belge des acteurs de voix (Belva).    

"Le risque, c'est de voir l'intelligence artificielle écraser des milliers, voire des centaines de milliers de travailleurs, en quelques années!", a-t-il lancé. Face aux défis posés par le développement de cette technologie, il est urgent, non pas de la refuser, mais de l'accompagner et d'en réguler l'usage. Avec pour objectif de continuer à protéger le droit d'auteur et les droits voisins, a insisté de son côté Tanguy Roosen, directeur juridique de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD ) et la Société civile des auteurs multimedia (Scam). Plusieurs mesures concrètes sont possibles, a défendu ce dernier. Ainsi, le pouvoir politique pourrait élaborer un mécanisme de contribution financière des géants de l'intelligence artificielle au profit des créateurs.    

Un tel dispositif existe déjà pour le secteur audiovisuel. Les opérateurs étrangers du type Netflix et autres actifs chez nous sont en effet déjà obligés de contribuer financièrement à la création audiovisuelle en Fédération Wallonie-Bruxelles, a rappelé M. Roosen.   Celui-ci plaide aussi pour un cadre régulatoire imposant l'identification des créations originales utilisées par les outils d'intelligence artificielle générative.    

Enfin, dans un souci de transparence vis-à-vis du public, la loi devrait également imposer la labellisation claire de toutes les oeuvres synthétiques diffusées ou publiées, a-t-il encore plaidé. Si une part de ce travail législatif relève du niveau européen, voire national, la Fédération Wallonie-Bruxelles dispose néanmoins de leviers d'action propres et efficaces, a relevé l'orateur.  

En tant que pouvoir subsidiant de nombreux opérateurs culturels (comme la RTBF par exemple), la FWB pourrait très aisément fixer des règles claires concernant la diffusion d'oeuvres réalisées avec le concours de l'intelligence artificielle, a ainsi suggéré M. Roosen.   Aux Etats-Unis, le monde artistique a entamé différentes actions en justice face aux géants de l'intelligence artificielle. Pour le monde culturel belge, il convient d'éviter ou d'anticiper pareille judiciarisation chez nous.  

"Nous espérons que les politiques prendront les choses en main avant que nous ayons des actions judiciaires entamées ici. Le politique ne doit pas attendre que le judiciaire soit saisi de cette question", a insisté M. Roosen  

Egalement auditionné jeudi par les députés, Olivier Maeterlinck, directeur communication de la SABAM, a lui souligné les énormes défis économiques posés par l'intelligence artificielle pour l'industrie culturelle européenne.    

Celle-ci représente quelque 7,6 millions d'emplois sur le Vieux continent pour un chiffre d'affaires de 640 milliards d'euros, a-t-il indiqué. "Aujourd'hui, l'intelligence artificielle générative ne représente encore que 3,7 milliards de dollars de chiffre d'affaires, mais certains prédisent que ce montant sera multiplié par dix dans les années à venir", et ce très certainement aux dépens de la création et donc de l'emploi culturel, s'est-il inquiété. "Il faut que l'intelligence artificielle reste un outil au service de l'humanité. Et non une arme braquée contre elle", a conclu M. Maeterlinck.

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  • Cela fait longtemps que la machine remplace l'homme. Mais quand elle remplace des métiers manuels et que des milliers de gens perdent leur boulot, vous dites "c'est le progrès, il faut évoluer , s'adapter au monde numérique"

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