Partager:
Le Royaume-Uni a enregistré une croissance nulle au quatrième trimestre après une contraction de 0,3% au troisième, selon de premières estimations, lui permettant d'éviter en 2022 une récession même si les prévisionnistes l'anticipent pour cette année, pendant que le pays traverse une profonde crise du coût de la vie.
Pour le seul mois de décembre, le produit intérieur brut (PIB) a en outre reculé fortement de 0,5% après une croissance de 0,1% en novembre, selon les chiffres préliminaires de l'Office national des statistiques (ONS) publiés vendredi.
L'ONS souligne qu'une large partie du recul de l'activité en décembre est due aux mouvements de grève qui secouent le pays dans de nombreux secteurs dont la santé, les transports, la poste, l'éducation, pour demander non seulement des hausses de salaires mais aussi de meilleures conditions de travail.
Ces revendications sont favorisées par un taux de chômage qui demeure extrêmement bas au Royaume-Uni à 3,7% fin novembre.
Sur l'ensemble de 2022, le PIB britannique a augmenté de 4,1% après 7,4% l'année précédente, ajoute l'ONS.
L'économie britannique était tombée en 2020, au plus fort de la pandémie de Covid-19, plus bas que les autres économies du G7. Le Royaume-Uni reste le seul pays de ce groupe à n'avoir pas retrouvé son niveau de PIB d'avant pandémie.
"Le fait que le Royaume-Uni ait affiché la plus rapide croissance du G7 l'an dernier tout en évitant la récession montre que notre économie est plus résiliente que beaucoup le craignaient", s'est cependant félicité le chancelier de l'Echiquier Jeremy Hunt.
"Nous ne sommes toutefois pas sortis d'affaire, particulièrement en ce qui concerne l'inflation. Si nous gardons notre plan pour diviser par deux l'inflation cette année, nous pouvons compter sur des perspectives de croissance parmi les meilleures en Europe", assure le ministre des Finances britannique, dans un communiqué.
Selon le FMI, le Royaume-Uni sera cependant la seule grande économie à subir une récession en 2023, en enregistrant une performance plus mauvaise qu'en zone euro ou aux Etats-Unis, mais également qu'en Russie, pourtant visée par de nombreuses sanctions internationales.
- Redresser la barre -
L'inflation britannique a ralenti à 10,5% en décembre, contre un sommet à plus de 11% en octobre, mais reste nourrie par des prix de l'énergie et de l'alimentation élevés, des tensions sur le marché du travail et des difficultés de chaine d'approvisionnement qui ont été aggravées par le Brexit.
Le Royaume-Uni a "évité une récession d'un cheveu" en 2022, commente Paul Dales, économiste de Pantheon Macro (la définition généralement admise est d'au moins deux trimestres successifs de contraction). "Nous nous attendons cependant à ce que l'inflation et les taux d'intérêt élevés en génèrent une cette année", ajoute-t-il.
"Même si on ne peut pas poser l'étiquette 'récession' sur l'économie, il est clair que le Royaume-Uni est en difficultés et tout le monde ressent le malaise économique du pays", remarque Laura Suter, analyste d'AJ Bell.
Elle relève en outre que "Noël a été sombre et n'a pas amené le coup de pouce économique habituel" ce qui présage selon elle d'un mois de janvier "déprimé", d'autant que les mouvements sociaux s'intensifient.
Les économistes de la Banque d'Angleterre (BoE) tablent sur une baisse de 0,5% du PIB britannique en 2023 et estiment qu'une récession de cinq trimestres a débuté en janvier.
Jeudi, le gouverneur de la Banque d'Angleterre (BoE) avait admis que l'inflation a commencé à reculer au Royaume-Uni, mais que l'institut monétaire a besoin de plus d'indications sur le fait que cette baisse va se poursuivre avant d'arrêter les hausses de taux d’intérêt. Elle en a pour l'instant enchaîné dix.
Ces resserrements monétaires combinés aux hausses de taux d'emprunt générées par le tumulte des marchés dans la foulée d'un budget massif et non financé du précédent gouvernement contribuent à une activité plombée au Royaume-Uni.
Le gouvernement du conservateur Rishi Sunak, dont le parti est largement distancé par l'opposition travailliste dans les sondages, est sous pression pour redresser la barre à l'approche d'élections générales attendues fin 2024.
Entre-temps, il doit annoncer vendredi devant quelque 200 hommes et femmes d'affaires vendredi la tenue cet automne d'un "sommet mondial de l'investissement" pour stimuler la croissance.