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L'économie européenne a mieux résisté que prévu l'an dernier à la guerre en Ukraine, échappant à une récession au dernier trimestre, mais la flambée des prix continue de freiner la croissance qui s'annonce très faible en 2023.
Défiant les pronostics, le produit intérieur brut (PIB) de la zone euro a continué de progresser sur les trois derniers mois de l'année 2022, malgré un net ralentissement. La croissance a atteint 0,1% par rapport au trimestre précédent, a annoncé Eurostat mardi.
"Bonne nouvelle: la zone euro a évité une contraction", s'est réjoui le commissaire européen à l'Economie, Paolo Gentiloni, qui prédisait encore en novembre une récession pour cet hiver.
"Nous continuons à faire face à de multiples défis", mais les perspectives pour 2023 "semblent un peu plus positives aujourd'hui qu'à l'automne", a-t-il souligné.
La croissance marque un net ralentissement en fin d'année, après avoir atteint 0,3% au troisième trimestre et 0,9% au deuxième, mais les analystes tablaient sur un chiffre légèrement négatif pour les 20 pays partageant la monnaie unique.
- Baisse du pouvoir d'achat -
L'activité économique européenne plie mais ne rompt pas face aux vents contraires déclenchés par la guerre en Ukraine, en particulier la hausse des prix de l'énergie qui réduit le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité de l'industrie.
Le début d'hiver a été doux, réduisant la consommation de gaz et d'électricité, et l'inflation a marqué le pas depuis novembre. L'amélioration des chaînes d'approvisionnement et la réouverture récente de l'économie chinoise ont aussi aidé.
Le marché de l'emploi est toujours au beau fixe, avec un taux de chômage historiquement bas.
Sur l'ensemble de l'année 2022, la croissance de la zone euro a atteint 3,5%, selon Eurostat, mieux que la Chine (3%) et que les Etats-Unis (2,1%). La performance est supérieure à la prévision de 3,2% publiée en novembre par la Commission européenne.
La tendance est la même pour l'ensemble de l'Union européenne, avec un PIB stable au quatrième trimestre et en progression de 3,6% sur l'année complète.
Lundi, le Fonds monétaire international (FMI) a revu en hausse de 0,2 point sa prévision de croissance pour la zone euro en 2023, mais elle devrait plafonner à seulement 0,7%.
- "Résilience incroyable" -
"Les pires scénarios pour cet hiver ont été évités, mais l'économie reste dans un état léthargique" même si elle a fait preuve d'une "résilience incroyable", souligne Bert Colijn, économiste pour la banque ING. Il n'exclut pas une chute du PIB au premier trimestre.
Si les chiffres macroéconomiques détaillés manquent encore, "il est probable que la consommation des ménages se soit contractée" au dernier trimestre, estime Rory Fennessy, pour Oxford Economics. Selon lui, la croissance s'est surtout maintenue grâce à une chute des importations, ce qui révèle un coup de frein de l'activité. La croissance pour 2023 "sera probablement faible", prévient-il.
Andrew Kenningham de Capital Economics est un peu plus sombre encore et prévoit une récession en zone euro au premier semestre à cause des hausses de taux de la Banque centrale européenne (BCE) qui devraient affaiblir l'investissement en renchérissant le coût du crédit. "Les données se sont détériorées vers la fin du dernier trimestre et la politique monétaire plus restrictive continue à se répercuter sur les ménages et les entreprises", met-il en avant.
Parmi les grandes économies européennes, l'Espagne (0,2% de croissance) et la France (0,1%) ont joué le rôle de locomotive. Mais les économies plus industrielles comme l'Allemagne (-0,2%) et l'Italie (-0,1%) ont amorcé un recul qui pourrait signaler le début d'une récession.