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A Harvard, étudiants et profs espèrent la fin de la polémique "politique" sur l'antisémitisme

Etudiants et professeurs de l'université américaine Harvard espèrent que le maintien en poste de leur présidente éteindra la polémique "politique" sur des accusations d'antisémitisme au sein de cette institution à la renommée mondiale secouée par les conséquences de la guerre entre Israël et le Hamas.

Mardi, le campus historique au coeur de Cambridge, charmante bourgade à l'allure coloniale britannique toute dédiée à Harvard, était calme sous une jolie lumière hivernale, très loin des tensions des manifestations pro-palestiniennes du mois d'octobre.

Vestiges de ces protestations, quelques affichettes appellent à un "cessez-le-feu" à Gaza et affirment que "critiquer Israël" ou "dénoncer un génocide" sont "différents de l'antisémitisme".

Dans cette petite ville de l’agglomération de Boston, une des premières cités historiques du XVIIe siècle dans le nord-est des Etats-Unis, le peu d'étudiants et de professeurs qui acceptent de parler à l'AFP disent déplorer la "politisation" extrême -- alimentée aux Etats-Unis et en Israël -- d'accusations d'antisémitisme au sein de leur université.

Cette controverse a failli coûter son poste à la présidente de Harvard Claudine Gay, une professeure de sciences politiques de 53 ans d'origine haïtienne devenue cet été la première dirigeante noire américaine de ce temple du droit et de l'économie fondé il y a 368 ans.

- "Barre plus haut" -

"Qui devrait démissionner ou qui devrait rester? Je ne suis pas habilitée à donner mon avis mais je crois qu'en tant qu’institution on attend de nous un niveau d'exigence plus élevé, qu'on mette la barre plus haut" que des prises de positions polémiques pro-palestiniennes ou favorables à Israël, réagit ainsi Marisa Gann, étudiante de 19 ans venue du Mississippi.

Défendant la "réputation" d'excellence de Harvard, la jeune femme espère que la crise va s'apaiser avec le maintien en poste de Mme Gay.

De fait, la Corporation de Harvard, son instance dirigeante, lui a renouvelé mardi son "soutien" et sa "confiance" après qu'elle eut tenu des propos jugés ambivalents sur les questions liées à l'antisémitisme et à la sacro-sainte liberté d'expression aux Etats-Unis, lors d'une audition devant la Chambre des représentants du Congrès le 5 décembre.

Ryan Enos, professeur de sciences politiques, et l'un des 700 soutiens de Mme Gay, ne décolère pas face aux "pressions politiques venues de parlementaires du Congrès et d'Israël".

"Personne ne devrait politiser ces questions très graves (...) de la guerre au Moyen-Orient où des milliers de personnes meurent", tonne-t-il auprès de l'AFP.

De fait, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu -- allié militaire et diplomatique des Etats-Unis, pays qui compte six millions de juifs -- avait dénoncé dimanche une "flambée d'antisémitisme sur les campus" américains.

Le mémorial de la Shoah, Yad Vashem, a fustigé un "cancer".

- Harvard et les Etats-Unis "neutres" -

Pour Daniel Awgchew, un Afro-américain de 20 ans rencontré avec ses copains étudiants qui comme lui ne cachent pas leurs sympathies palestiniennes, Harvard et les Etats-Unis devraient rester "neutres" sur la guerre à Gaza entre Israël et le Hamas.

"Notre pays devrait se tenir à l'écart des conflits d'autres pays. Tout comme la présidente" de l'université, répond le jeune homme en taxant quand même Mme Gay de "soutien présumé au gouvernement israélien".

Prenant acte du maintien en poste de la présidente, l'organisation estudiantine américaine et internationale juive Harvard Hillel a exigé dans un courriel à l'AFP d'avoir "une administration qui (la) soutienne, qui nomme, dénonce et lutte contre l'antisémitisme partout où il survient".

Un groupe juif radical, "Jewish National Project", continuait lui de faire rouler mardi dans les rues ensoleillées de Cambridge son camion publicitaire équipé de panneaux électroniques lumineux accusant Mme Gay d'"antisémitisme" et d'être une "honte nationale".

Pour Tad Elmer, un retraité de Cambridge, "les universités ne devraient pas être politisées".

"Je ne vois pas pourquoi elles ressentent le besoin de donner leur avis sur les affaires du monde. Qu'elles éduquent" les étudiants, s'emporte le septuagénaire.

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