Accueil Actu Monde International

Inde: des militantes incendient les maisons d'hommes accusés d'avoir humilié des femmes d'une autre ethnie

Des femmes en colère ont mis le feu aux maisons de deux hommes qui ont été accusés, ainsi que deux autres suspects, d'avoir obligé deux femmes à défiler nues parmi la foule dans l'Etat du Manipur, dans le nord-est de l'Inde, où des mois de violences ethniques ont fait au moins 120 morts, selon une vidéo diffusée vendredi.

Les quatre hommes, qui ont été arrêtés jeudi par la police, ont été identifiés à partir d'une vidéo de l'incident datant de début mai, devenue virale sur les réseaux sociaux mercredi et dont tout le pays s'est indigné.

"Quatre principaux accusés ont été arrêtés dans l'affaire de la vidéo virale", a déclaré la police de l'Etat du Manipur sur Twitter jeudi soir.

La vidéo montre deux femmes, appartenant apparemment à la tribu des Kukis, qu'un conflit interethnique oppose aux Meiteis, marchant nues dans une rue, moquées et harcelées par une foule identifiée comme appartenant à la communauté des Meiteis, l'ethnie dominante.

Le jour de l'arrestation des quatre suspects, un groupe de militantes a jeté des bottes de foin sur la maison de l'un des quatre hommes à Imphal en y mettant le feu.

Au moment où l'incendie faisait rage, les femmes, membres de la communauté des Meiteis, comme les quatre accusés, se sont acharnées sur les murs et le toît de l'habitation avec des bâtons.

Vendredi, un autre groupe de femmes a détruit la maison d'un deuxième suspect, la réduisant en cendres.

L'Inde est un pays généralement conservateur et patriarcal, mais la communauté des Meiteis, où les femmes ont un rôle plus important au sein de la société qu'ailleurs, comprend des militantes de la cause des femmes.

La vidéo montrant les deux femmes dénudées a suscité vendredi des mouvements de protestation dans l'ensemble de l'Inde, les manifestants demandant la démission du chef du gouvernement de l'Etat du Manipur, lui reprochant son inaction.

"Des gens normaux peuvent-ils faire celà? ... Même les chats, les chiens, les animaux n'ont jamais commis d'actes aussi répugnants", déclare une manifestante près d'Imphal, la capitale de l'Etat du Manipur, où se sont rassemblées des centaines de femmes.

Le gouvernement de l'Etat, dirigé par le parti nationaliste hindou au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), a déclaré que la police avait pris des mesures dès que la vidéo est apparue sur les réseaux sociaux, plus de deux mois après l'incident.

Une "enquête approfondie" est en cours, a indiqué sur Twitter le ministre en chef de l'Etat, N. Biren Singh.

"Nous veillerons à ce que des mesures strictes soient prises contre tous les auteurs, y compris en envisageant la possibilité de la peine capitale", a-t-il ajouté.

Les violences en mai au Manipur avaient explosé après une marche de protestation contre l'éventualité que la communauté des Meiteis, pour la plupart hindous, obtienne le statut plus avantageux de "tribu répertoriée" qui leur garantirait des quotas d'emplois publics et d'admissions dans les universités.

Cette hypothèse avait également ravivé les vieilles craintes de la tribu des Kukis, en général chrétiens, de voir les Meiteis autorisés à acquérir des terres dans des zones qui leur sont actuellement réservées ainsi qu'à d'autres groupes tribaux.

Des habitations et des églises avaient été incendiées et des dizaines de personnes obligées de se réfugier dans des camps gérés par le gouvernement.

Dans un rapport présenté devant un tribunal en juin, le groupe de la société civile Manipur Tribal Forum a affirmé que de nombreux et terribles actes de violence, notamment des viols et des décapitations s'étaient produits sans que les autorités de l'Etat n'ouvrent d'enquêtes.

Le Premier ministre indien Narendra Modi a déclaré jeudi que "l'incident du Manipur est une honte pour n'importe quelle société civilisée".

"Cela fait honte à toute la nation", a souligné M. Modi qui s'exprimait pour la première fois sur ces violences.

La Cour suprême indienne a averti le gouvernement de Modi que s'il n'agissait pas, des mesures seraient prises.

À lire aussi

Sélectionné pour vous