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Sur les pancartes, les t-shirts, dans les hauts-parleurs, trois mots se répètent: "Justice pour Nahel". Jeudi, plusieurs milliers de personnes ont défilé à Nanterre lors d'une marche blanche en hommage à cet adolescent de 17 ans tué mardi par un policier, marquée par des échauffourées.
Partis vers 14h00 du quartier Pablo Picasso, où vivait Nahel, les manifestants sont arrivés vers 16H00 près de la préfecture et de la place Mandela, où l'adolescent est mort mardi matin. Ils y ont observé une minute de silence.
Au cœur du cortège, la mère de Nahel avançait assise sur une camionnette blanche, près de proches du garçon et d'Assa Traoré, figure de la lutte contre les violences policières.
Autour du véhicule, les manifestants scandaient en cœur "Police assassins", "Justice pour Nahel" et "La République tue nos enfants".
Sur le trottoir bondé, une femme pousse un landau auquel est accroché un écriteau: "Repose en paix Nahel".
Près d'un abribus tagué en rouge "La police tue" et "RIP Nahel", plusieurs adolescentes, téléphone en main, filment la foule.
"C'est toujours les mêmes qui sont visés, les Noirs et les Arabes, les quartiers populaires. On tue un petit de 17 ans comme ça, pour rien: cette mort nous fout la haine", explique un peu plus loin Ayoub, 16 ans, habillé tout en noir.
Ni lui ni son ami Rayane, 17 ans, ne s'étonnent de voir des voitures brûler et des feux d'artifice tirés depuis deux nuits dans les rues de leurs quartiers.
"Les gens en ont marre, les générations passent et c'est toujours la même chose. En 2005, je n'étais pas né, mais qu'est-ce qui a changé ?", interroge Ayoub.
Des échauffourées ont éclaté en fin de manifestation, avec des tirs de feux d'artifice et lancers de projectiles, auxquels la police a répliqué par des jets de gaz lacrymogènes. Plusieurs feux ont été allumés aux abords de la préfecture et des voitures incendiées.
Parmi les 6.200 participants à la manifestation, "1.000" étaient des "perturbateurs qui ont cherché à faire dégénérer la marche", selon la préfecture de police. Les forces de l'ordre ont procédé à huit interpellations.
- "Gars tranquille" -
Un peu plus tôt, au passage de la camionnette, roulant au pas, klaxons et applaudissements retentissent, des moteurs de scooters vrombissent. Quelques fumigènes rouges illuminent le cortège.
"Nahel, c'était un gars tranquille. Il a commis des infractions, d'accord, mais dans quel monde c'est une raison pour le tuer ? Vous savez comment ils sont les jeunes à 17 ans", soupire Saliha, 65 ans, habitante du quartier Pablo Picasso, qui connaissait de vue l'adolescent.
Aucune des personnes rencontrées par l'AFP n'a souhaité donner de nom de famille.
Appuyée sur sa trottinette, Mélina, 14 ans, est venue rendre hommage à cet "ami d'ami" dont elle a appris la mort sur les réseaux sociaux.
"Quoiqu'il ait fait, il n'y avait aucune raison de pointer une arme vers lui. Je comprends la haine. Et je pleure pour sa mère", affirme l'adolescente, pull clair et cheveux tirés en arrière.
Plusieurs autres villes de France ont connu, comme Nanterre, des incidents la nuit dernière. Des écoles, médiathèques et commissariats ont été visés, ainsi que des bus en région parisienne.
Peu avant la marche, Elsa Faucillon, députée communiste des Hauts-de-Seine, a estimé devant la presse que "la colère est légitime mais ce qui est en train de se passer ne l'est pas", évoquant une "situation extrêmement tendue".
"C'est toute l'Île-de-France qui a cramé", remarque Rayane, en maillot de foot, le cheveu court. Il ajoute: "Evidemment, brûler des voitures ne va pas faire revenir Nahel. Mais il faut entendre la colère."