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"La situation est catastrophique": Lucien et Etienne, membres de la police fédérale, dénoncent l'état de leurs bâtiments

Des membres de la police fédérale dénoncent l'état "extrêmement préoccupant" de leurs bâtiments à Liège et à Auderghem. Selon eux, un "désinvestissement chronique" a provoqué une dégradation importante de leur lieu de travail ces dernières années. Thierry Belin, le secrétaire national du syndicat national du personnel de police et de sécurité (SNPS), tire la sonnette d'alarme. La Régie des Bâtiments, consciente de la situation, dresse un état des lieux.  

"On se sent abandonnés". Lucien (prénom d'emprunt) travaille à la police judiciaire fédérale de Liège depuis une dizaine d'années. Passionné par les enquêtes sur les escroqueries et le grand banditisme, le trentenaire s'inquiète aujourd'hui fortement face au délabrement des bâtiments dans lesquels les forces de l'ordre doivent exercer leur profession.

"Il y a un désinvestissement chronique de la part de nos dirigeants, sous prétexte qu'un projet à Vottem a été annoncé", dénonce-t-il.

Lucien dresse une liste non-exhaustive des dégradations visibles au quotidien.

"Il y a un manque de sanitaires. Des collègues se trouvent dans des bureaux où les luminaires ne fonctionnent pas, car on ne trouve pas les néons adéquats, ils coûtent trop cher. Il y a deux douches pour 300 membres du personnel. C’est assez difficile au quotidien, car après certaines interventions comme le démantèlement de plantations de cannabis, on a transpiré et il y a de fortes odeurs. Et quand on rentre, il n’y a pas assez de douches. On nous dit aussi interdiction d’utiliser un frigo ou une machine à café personnelle sous prétexte que ça va faire sauter les plombs, car l’électricité n’est pas aux normes... Il y a également de l’amiante, mais malheureusement, ça n’est pas suivi comme la réglementation l’impose. Des collègues vivent un stress permanent et sont dans des infrastructures qui sont en état de délabrement avancé. C’est un danger pour la santé."

Le policier estime que ses collègues et lui doivent actuellement travailler dans des conditions "quasi-inhumaines". "Je pense que dans le privé ou d’autres infrastructures publiques, personne ne l’accepterait. Comme beaucoup de collègues, on fait ce métier par choix et par vocation. Tout doucement, cela donne envie de quitter ce boulot. Dans quel monde est-on ? On est là pour les citoyens et avancer dans des enquêtes. C’est ce qui nous permet de tenir le coup."

Inquiet pour ma santé

Même constat pour Etienne (prénom d'emprunt), qui exerce lui son métier dans les installations d'Auderghem.

"La situation est catastrophique. L’état de notre bâtiment est extrêmement préoccupant. Par exemple, cela fait des mois que notre porte de garage principale est en panne et celle-ci n’est jamais réparée. Il pleut également dans de nombreux endroits du bâtiment. Récemment, nos douches ont été condamnées car il y a un risque important de contracter la légionellose. De nombreux autocollants pour prévenir de la présence d’amiante sont également présents dans notre bâtiment, mais aucun travaux n’est effectué. Cette situation est honteuse et inacceptable. Ce manque de moyens m’inquiète pour ma santé et celle de mes collègues, mais cela nuit aussi à notre efficacité sur le terrain." 

Les bâtiments se dégradent de plus en plus et on ne met pas les moyens

Thierry Belin, le secrétaire national du syndicat national du personnel de police et de sécurité (SNPS), estime également que la situation est "catastrophique".

"Les bâtiments se dégradent de plus en plus et on ne met pas les moyens pour les entretenir. Cela fait des années qu’on laisse aller les choses. Liège est un exemple criant puisque le bourgmestre Willy Demeyer a dû fermer le quartier Saint Léonard, car les plafonds tombaient sur les gens, etc. Le système électrique n’est plus aux normes de rien du tout. On nous annonce le masterplan pour Vottem, pour loger tout le monde là-bas. On nous l’annonçait pour 2028. Aujourd’hui, c’est 2033. Que fait-on durant les 9 années à venir ? Où met-on les gens ? Chez eux ?", s'interroge-t-il.

Thierry Belin évoque par ailleurs d'autres exemples de bâtiments qui devraient d'après lui être rapidement rénovés. "C’est comme ça un peu partout. À Mons, à la police judiciaire fédérale, il y a des seaux dans tous les couloirs car il pleut. Ils ont eu le feu dans un plafond à cause d’une boîte de dérivation. L’eau et l’électricité ne faisant pas bon ménage. À la caserne "de Witte de Haelen" à Bruxelles, l’hiver, ils avaient 8 degrés, car le chauffage tombait souvent en panne", souligne-t-il.

L’état des bâtiments a selon lui un impact direct sur les tâches des policiers au quotidien. "A St Léonard, on a dû laisser les policiers chez eux, en télétravail. On ne peut pas convoquer les gens pour une audition ou un interrogatoire à son domicile. C’est vraiment n’importe quoi. (...) Pour l’investissement, on parle de plusieurs centaines de millions d’euros. Cela fait plusieurs législatures qu’on a sous investi ou pas investi du tout. On a laissé aller les choses. A la Régie des Bâtiments, on nous répond que si on ne leur donne pas d’argent, ils ne peuvent pas réaliser de travaux."

Johan Vanderborght, le chef du service communication à la Régie des Bâtiments (le gestionnaire immobilier de l'État fédéral), a réagi aux problèmes évoqués par des policiers à Liège et à Auderghem.

Concernant les installations la commune bruxelloise, Johan Vanderborght annonce des actions en cours et à venir, pour réparer les dégradations.  

"Les douches ont été condamnées que récemment (début février) car il y a un problème au niveau de la boucle sanitaire (se trouvant dans la partie du bâtiment réservé à la STIB (voir ci-dessous)). Par peur de légionellose, la police fédérale a décidé de condamner ces douches en attendant le résultat des prélèvements. La STIB a été informée et c’est elle qui doit effectuer les rectifications au niveau de cette boucle sanitaire", précise le chef du service communication à la Régie des Bâtiments.

Johan Vanderborght répond aussi aux autres inquiétudes des policiers basés à Auderghem. 

"Par rapport aux problèmes d’éclairage, la Régie n’a pas d’information au sujet de problèmes d’éclairage à l’heure actuelle. Mais en cas de problème, on peut réagir assez rapidement. Quant à la présence d’amiante, la Régie n’a pas reçu de signalement de la part de la police fédérale concernant la dégradation d’amiante dans le bâtiment. Par ailleurs, avec les fortes pluies de ces dernières semaines, des infiltrations en toiture sont apparues et seront résolues le plus rapidement possible (annonce faite le 15 février dernier). Le problème de porte de garage est très récent et une intervention dans le courant du second semestre 2024 est prévue."

Au sujet des installations électriques, une demande de la Régie des Bâtiments a été introduite afin que la police fédérale puisse bénéficier d'une alimentation autonome, permettant ainsi en cas de coupure de pouvoir intervenir directement.
 

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Concernant la situation à Liège, dans l’attente de la réalisation du méga-projet de Vottem, la Régie des Bâtiments indique que des budgets "importants" ont été débloqués pour rénover les sites de la police fédérale.

"Le rassemblement de l’ensemble des services de la police fédérale est prévu à Vottem. Des travaux sont prévus entre 2025 et 2031. En attendant, la Régie des Bâtiments continue à investir dans le site de Saint-Léonard afin d’assurer la sécurité du personnel sur place", précise Johan Vanderborght.  

Voici les travaux annoncés pour le site de Saint-Léonard:
-    la rénovation des sanitaires est prévue (investissement de 770.000 euros) et les travaux devraient débuter très prochainement
-    les travaux de rénovation de la chaufferie sont en cours (investissement de 470.000 euros)
-    les travaux de rénovation électrique sont terminés (investissement de 170.000 euros) 
-    des douches sont disponibles et un projet de containers douches avait été prévu, mais n’a finalement pas été confirmé par la autorités locales de la Police Fédérale 
-    des travaux de sécurité incendie sont prévus (un investissement d’environ 1 million d’euros) à partir du printemps 2024 (cela concerne 3 blocs).
-    L’installation de préfabriqués de bureaux est prévue (procédure marché public en cours)

"Concernant la présence d’amiante, les mesures sont prises systématiquement pour ne pas exposer le personnel aux applications rencontrées dans les bâtiments dans l’attente d’un traitement adéquat lors de la démolition des bâtiments concernés. Dans les cas problématiques, des marchés sont prévus pour l’enlèvement des applications d’amiante dans le respect des normes", conclut Johan Vanderborght.

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Commentaires

2 commentaires

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  • C'est une honte !

    Claude OLIVIER
     Répondre
  • Pourtant l'état à de l'argent à gogo, une petite grève du zèle en arrêtant de flasher et de mettre des procès pour une durée illimitée fera changer très vite la situation car seul en touchant le portefeuille du gouvernement ça pourra bouger.

    keykeybe greg
     Répondre