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Pierre, un propriétaire liégeois, héberge une victime des inondations depuis 2 ans: "Pas moyen de le faire partir"

"Je voulais héberger un sinistré des inondations durant 6 mois. 2 ans plus tard, pas moyen de le faire partir". Pierre, un habitant du centre de Liège, se sent impuissant car l'homme qui vit dans son logement refuse de quitter les lieux.

En 2021, le propriétaire a publié une annonce sur la plateforme "Solidarité inondations" en vue d'héberger une victime des inondations du mois de juillet. "J'ai acheté cette maison il y a 3 ans. Elle est encore en rénovation, et je me suis dit que c’était l’occasion de la mettre à disposition de quelqu'un puisque je n’y habitais pas encore."

Pierre est alors contacté par un étudiant dont le logement situé à Angleur a été sinistré. "Avec la cellule de crise, un contrat d’occupation précaire pour une durée de 6 mois a été conclu (de novembre 2021 à avril 2022), précise-t-il. Mais comme il n’a pas d’argent, il est toujours là. Si je le mets dehors, il est à la rue. Je suis un peu coincé à ce niveau-là. Au départ, il devait me verser une rente de 200 euros (+ 50 euros de charges). Après, avec l’explosion des prix de l’énergie, il n’a plus pu payer les charges. Et maintenant, cela fait 4 mois qu’il ne verse absolument plus rien."

Pour récupérer son bien, le Liégeois dit avoir déjà fait appel à la Justice de Paix pour introduire une procédure en conciliation. 

"J’ai essayé de contacter le CPAS, et la cellule de crise a disparu sans laisser de nouvelles. J’ai aussi contacté la police, qui m'a conseillé de faire appel au juge de paix, ce que j’ai fait. Depuis début décembre, j’attends une réponse. C’est une demande de conciliation. Si on dit à mon locataire qu’il ne peut pas rester, il n’a nulle part où aller. Je ne vois pas comment je pourrais le mettre dehors", dit-il. 

La procédure en conciliation n’étant pas contraignante, si l’occupant du logement ne se présente pas à l’audience fixée par le juge, le propriétaire ne pourra pas obtenir un jugement, qui pousserait l'étudiant à quitter l'hébergement. Une procédure d'expulsion pourrait permettre à Pierre de récupérer son habitation. Mais ce recours n'est pas gratuit. Le propriétaire espère donc un dénouement à l'amiable.

"J’aimerais pouvoir rénover mon logement et le remettre en location. Il y a l’électricité, le gaz,… mais il n’y a aucune décoration. Il faut repeindre, remettre du parquet. C’est une maison qui n’est pas meublée. Tant que mon locataire est là, je ne sais rien faire", conclut-il.

Quels sont les droits de Pierre? Quelle est la réglementation ? Nous avons posé la question à Hans Van de Cauter, un avocat spécialisé en droit immobilier.

"En droit civil, il y a les droits réels, comme la propriété ou l’usufruit, et les droits personnels comme le bail. Normalement, chacun de ces droits trouve sa source dans un écrit qui stipule les droits et obligations des parties", rappelle l'avocat.

Dans la situation vécue par Pierre, "il n’y a sans doute pas d’écrit (ndlr: depuis avril 2022) et pas de location car pas de loyer. Si un loyer est payé ou une contrepartie est fournie (par exemple des travaux) sans contrat écrit, on a un contrat de bail de 9 ans qui ne peut être résilié que moyennant un préavis et éventuellement une indemnité, indique Hans Van de Cauter. Si l’occupation est gratuite, elle se base sur une simple tolérance du propriétaire. Si le propriétaire y met fin, l’occupant est sans titre ni droit et doit quitter le bien. Pour ne pas être accusé d’un abus de droit, le propriétaire doit cependant donner suffisamment de temps à l’occupant pour quitter son logement (par exemple une semaine)." 

Et d'ajouter: "Si l’occupant sans titre ni droit refuse de partir, le propriétaire peut s’adresser au juge de paix pour demander son expulsion sur base du titre de propriété. On peut héberger qui on veut, mais il vaut mieux établir un écrit qui stipule les modalités d’hébergement."

Quand on héberge temporairement quelqu'un, faut-il prévenir l'assurance? Nevert Degirmenci, la porte-parole d'Assuralia, énumère les différentes assurances qui poursuivent leur couverture dans une situation comme celle vécue par Pierre.

L’assurance RC (Responsabilité Civile), plus connue comme l’assurance familiale: Elle couvre la responsabilité civile des membres d’un foyer contre le dommage matériel ou corporel causé à un tiers. L’assurance familiale s’applique également aux personnes séjournant temporairement chez vous. "Pour s’assureur de l’étendue de la couverture, de la durée, etc., il est recommandé de contacter son interlocuteur habituel d’assurance (courtier, agent d’assurance ou l’entreprise d’assurance en ligne directe) sachant que les conditions générales d’un contrat peuvent varier en fonction de l’entreprise d’assurances", indique Nevert Degirmenci.

L’assurance Incendie: il s’agit d’une sorte d’assurance omnium pour le bâtiment. Le propriétaire sera indemnisé lorsqu’un péril couvert par le contrat (ex : incendie, dégât des eaux, explosion, catastrophe naturelle, etc.) endommage son bien. Le contrat poursuit ses effets même lorsqu’une personne est hébergée temporairement par le propriétaire. "Attention : tous les contrats d’incendie excluent l’acte intentionnel", souligne Nevert Degirmenci.

- L’assurance Protection Juridique (PJ) existe principalement sous 2 formats. 

  • Soit l’assurance Protection Juridique comme garantie complémentaire à une police d’assurance principale (ex : assurance RC auto, assurance Incendie, assurance Familiale, …). Dans ce cas, sa couverture s’applique aux litiges couverts par la police principale.
  • Soit l’assurance Protection Juridique étendue qui, elle, intervient dans un très grand nombre de litiges relevant du droit fiscal, immobilier, administratif, droit social, etc. 

"Dans tous les cas, cette assurance permet de défendre et faire valoir ses droits. L’assureur s’engage à fournir son aide afin de résoudre le litige. Dans 80% des cas, l’assureur PJ parviendra à dégager lui-même une solution amiable en ayant recours à la médiation. Cela coûte moins cher, représente un gain de temps et moins de stress, ajoute la porte-parole d'Assuralia. "Lorsque la solution amiable n’est pas possible, l’assureur prendra en charge les frais des procédures judiciaires ou administratives auxquelles l’assuré est confronté à concurrence des montants fixés dans le contrat."

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  • Ce cas, est l'exemple, type du frein actuel de l'altruisme; la générosité devient de plus en plus souvent un piège tendu par des profiteurs, et dans lequel tombent de braves personnes: quand le mot "méfiance" s'allie à l'élan charitable, le monde vacille sur ses bases.

    Jacki Collard
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