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Avec un déluge de feu et des explosions en série, "Act of Valor" a tout du film d'action hollywoodien. Mais les balles sont réelles et les acteurs sont de vrais Navy Seals, bien loin de la discrétion dont ce corps d'élite se flatte.
Le film glorifie le patriotisme et les valeurs américaines en mettant en avant le "courage, la loyauté, l'honneur" des forces spéciales de la Marine américaine, les Navy Seals. L'unité, qui tire son nom de l'acronyme Sea, Air, Land (mer, air, terre), a connu son heure de gloire avec le raid contre Oussama Ben Laden en mai dernier. A l'origine du projet en 2007, ce ne devait être qu'un clip vidéo pour une campagne de recrutement afin de couvrir les besoins de la "guerre contre le terrorisme". C'est devenu une fiction de 90 minutes qui sort sur grand écran le 24 février et dont la bande annonce a été diffusée lors du Superbowl, le plus grand événement télévisé de l'année aux Etats-Unis. Pas question de parler de propagande pour le grand patron des forces spéciales américaines, l'amiral William McRaven: "nous pensons qu'il représente avec exactitude les actes de bravoure des dix dernières années des équipes Seals". John Wayne avait incarné autrefois le courage des "Bérets verts" dans un film. Mais point d'acteur, cette fois, pour incarner les sept soldats d'élite sur lesquels se concentre le film, mais des Navy Seals en activité. "Quand on rencontre un Navy Seal, il a une intensité dans le regard et une aura qui est quasiment impossible à reproduire. Il s'entraîne et est en service parfois depuis 20 ans. Comment un acteur pourrait-il reproduire ça", justifie Scott Waugh, coréalisateur du film. Images léchées, couleurs saturées, les Seals sont montrés dans toute la panoplie de leur métier: extraction d'un sous-marin en plongée, saut en chute libre à haute altitude, prise d'assaut d'un yacht. Les séquences ont été tournées lors de séances d'entraînement avec les moyens de la Marine. Par souci de réalisme, les tirs sont à balles réelles. Le scénario a été écrit autour des scènes d'action: les Seals délivrent un agent de la CIA kidnappé et mettent au jour le projet d'un jihadiste tchétchène déterminé à se faire exploser aux Etats-Unis. "Le plus dur a été les dialogues. Courir, tirer (...) c'est banal, c'est rien. S'asseoir et parler à quelqu'un sans que ça sonne faux, c'était vraiment difficile", confie le second-maître Anjay, dont seul le prénom est utilisé dans le film, comme pour tous les Seals impliqués. Le film fait grincer les dents et a engendré des "réactions mitigées" dans la communauté militaire, selon plusieurs responsables de la défense interrogés par l'AFP. Sa conception s'est affranchie des autorisations du Pentagone mais a été gérée directement par les forces spéciales. "Les Seals sont les Seals", reconnaît diplomatiquement Vince Ogilvie, qui assure la liaison avec Hollywood pour le Pentagone. Il est fréquent que l'armée mette à disposition d'Hollywood des équipements et des hommes pour servir de figurants, comme pour "Black Hawk Down" ou "La guerre des mondes". Mais "c'est une chose de filmer un soldat sauter en parachute, c'en est une autre qu'il atterrisse sur le tapis rouge" comme une vedette, dénonce un haut responsable de la défense qui n'apprécie pas de voir des militaires tenir les premiers rôles. D'autant que les forces spéciales appartiennent au monde de l'ombre. Après l'opération contre Oussama Ben Laden au Pakistan, l'amiral McRaven s'était plaint de la couverture médiatique qui risquait selon lui de mettre en danger la sécurité des opérations. Mais montrer des Seals en action pendant une heure et demie ne semble cette fois pas le troubler, quand il affirme qu'il n'y a "pas d'inquiétude pour leur sécurité" et qu'aucune "tactique ou technique sensible" n'est révélée. Quitte, comme le dénonce un responsable militaire à l'AFP, à tomber dans "l'hypocrisie".
