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Personnage énigmatique en diable, Christophe a un parcours singulier: d'abord estampillé "chanteur à minettes" yéyé, il est aujourd'hui une icône pour la jeune génération branchée et prouve que ce statut n'a rien d'usurpé avec un nouvel album magnifique.
"Aimer ce que nous sommes" (AZ/Universal) sort lundi, sept ans après "Comm' si la Terre penchait", qui avait été encensé par la critique.dandy
Ultra-perfectionniste, Christophe a mis cinq ans avant de terminer cet album, qui n'est que le neuvième en quarante années de carrière.
Sa sortie a été plusieurs fois repoussée et il bénéficie d'un casting impressionnant : les actrices Isabelle Adjani et Sara Forestier, Daniel Filipacchi (voix de l'émission de radio "Salut les copains" puis patron de presse), l'écrivain Florian Zeller, le trompettiste Erik Truffaz, le DJ mexicain Murcof, l'arrangeur brésilien Eumir Deodato (Björk, Frank Sinatra...), le batteur américain Carmine Appice, le guitariste flamenco espagnol Moraito ou, à la réalisation, Christophe Van Huffel, du groupe Tanger.
Enregistré à Paris, en Angleterre et en Espagne, "Aimer ce que nous sommes" contient treize chansons aux textures électro atmosphériques et rêveuses teintées d'influences arabo-andalouses (cordes, guitare...), sur lesquelles Christophe déclame des textes mystérieux de sa voix de tête nimbée d'écho.
L'ambiance est très élégante et la structure des morceaux riche et complexe, loin de tout formatage. De quoi nourrir un peu plus le mythe et l'aura de ce dandy de 62 ans, réputé pour vivre la nuit et être un fou de femmes, de bolides et de cinéma.
"Il est fantastique, c'est un dieu de la musique française. Sa musique est sexy, il est romantique à bloc, pour moi c'est un grand poète de l'époque du marquis de Sade", assurait récemment à l'AFP le chanteur électro Sébastien Tellier, qui avait repris "La dolce vita" de Christophe dans son album "Sessions" (2006).
Tellier, 33 ans, est une icône branchée mais s'est fait un plaisir de représenter la France à l'Eurovision. Un grand écart entre culture populaire et underground qu'on retrouve dans le parcours de Christophe, ce qui explique en partie l'admiration que lui porte la jeune génération, en plus de son goût pour le risque et l'expérimentation.
De son vrai nom Daniel Bevilacqua, il est révélé par le slow "Aline", carton de l'année 1965 (un million d'exemplaires vendus), suivi de "Les marionnettes" ou "Excusez-moi monsieur le professeur".
Après une période d'éclipse, il troque le costume de jeune chanteur yéyé contre celui de dandy décadent avec ses albums des années 70, les premiers de sa carrière alors qu'il se cantonnait jusque-là aux 45 tours : "Les paradis perdus" (1973) et "Les mots bleus" (1974), dont les textes sont pour la plupart signés par Jean-Michel Jarre, alors inconnu, "Samouraï" (1976) puis "Le beau bizarre" (1978).
Leur lyrisme romantique, leur musique sophistiquée et novatrice classent Christophe dans une catégorie à part de la chanson française, la plus respectée car composée d'artistes capables de rivaliser avec les Anglo-saxons, comme Serge Gainsbourg, Michel Polnareff, Nino Ferrer, Gérard Manset ou Alain Bashung. La maison de disques Dreyfus a réédité ces albums en 2004.
France 2 a conclu un partenariat avec Universal pour la sortie de "Aimer ce que nous sommes". La chaîne diffusera tout l'été des programmes courts consacrés à trois des chansons, "Mal comme", "Tonight tonight" et "Parle-lui de moi".
