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A l'hôpital des poupées de Rome, des artisans au chevet de trésors brisés

Dans la vitrine d'une minuscule échoppe s'empilent des fragments de poupées anciennes. Vision d'horreur ou beauté surannée, les passants s'arrêtent souvent devant l'intrigante boutique de restauration de la famille Squatriti, en plein cœur de Rome.

Acteurs de théâtre napolitains poussés à la reconversion par la misère de l'après-guerre, les Squatriti ont ouvert leur boutique en 1953, pour réparer les objets des familles aisées détruits pendant la guerre.

Mais elle s'est assez vite spécialisée dans les poupées anciennes, une niche pour la restauration depuis qu'elles sont devenues des objets de collection. Certaines datent du XIXème siècle.

"Avec le boom économique des années 1960, notre activité a pris de l'ampleur: les premiers collectionneurs font leur apparition, on commence à vouloir réparer les objets anciens, et donc le magasin s'est développé comme ça", raconte Federico Squatriti.

Agé de 56 ans, c'est lui qui tient désormais la boutique où ont oeuvré sa grand-mère, ses parents, son oncle et ses cousins.

Entre porcelaine, nacre, papier mâché ou cire, l'atelier est comme figé dans le temps, débordant d'objets oubliés par les clients: marionnettes et petits soldats de plomb, idoles mexicaines et faïence centenaire s'empilent jusqu'au plafond.

"Leur point commun, ce sont les yeux qui sont renfoncés à l'intérieur. Car les enfants leur enfoncent toujours les yeux avec leurs doigts", raconte-t-il.

Mais il arrive aussi que certaines poupées ne puissent pas être réparées, faute en particulier de pièces de rechange.

Elles viennent alors peupler la vitrine, les étagères et la singulière cave peuplée de bouts de petits corps, que les restaurateurs ont baptisée "les limbes".

Selon les Squatriti, il n'y a qu'une poignée de restaurateurs comme eux en Italie. Et les clients viennent de tous le pays, parfois même de plus loin, de Londres ou d'Afrique.

La petite boutique a vu passer des princesses, des intellectuels, des acteurs, mais elle sait que ses jours sont comptés.

"Les choses changent, se transforment, évoluent et se terminent. Il est normal que chaque époque se termine, nous on a essayé de rallonger la nôtre au maximum mais arrivera le moment où elle aussi touchera à sa fin", reconnaît Federico.

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