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Pass sanitaire étendu en France: tension à l'hôpital, "peur" de perdre des clients pour les cafetiers, "rassurant" pour d'autres

"Rassurant" ou source de frustrations: le pass sanitaire est mis en place depuis ce lundi dans le quotidien des Français, pour boire un café, se déplacer en train ou encore accompagner des personnes à l'hôpital. Les contrôle étaient aléatoires ce matin, à la mise en place du dispositif.

Sur la terrasse quasi déserte du café du Temple, dans le XIe arrondissement de Paris, Mirela Mihalca, serveuse de l'établissement depuis un an, explique à deux clients tout juste installés qu'elle ne peut pas les servir. "Ils n'ont pas de pass sanitaire, je ne peux rien faire", explique-t-elle, vérifiant d'un oeil que les deux hommes ne s'éternisent pas à leur table.

Pour être valide, le pass sanitaire anti-Covid, déjà en vigueur dans plusieurs pays européens, doit témoigner soit d'un schéma vaccinal complet, soit du rétablissement du malade à travers un certificat de test positif d'au moins 11 jours et de moins de 6 mois, soit enfin d'un test négatif datant de "moins de 72 heures".

Dans les cafés, la peur de perdre des clients de Paris à Bordeaux 

"Si je commence à habituer les gens à la tolérance je suis foutu". À la Brasserie du passage Saint-Michel de Bordeaux, le patron, Stéphane Latour, vient de refuser de servir en terrasse une jeune femme, cliente habituelle, qui n'a pas encore reçu sa deuxième dose de vaccin, et tente de calmer son mécontentement. "A part quelques-uns, les gens comprennent. S'ils n'ont pas le pass, ils prennent des cafés à emporter", confie-t-il en accueillant les commerçants du marché préparant leurs étals sur la place voisine, des habitués pour la plupart.

Quelques rues plus loin, Mathilde Cotto, serveuse à la Villa Tourny, brasserie de la très élégante allée de Tourny, s'inquiète: "On perd des clients et ce midi pour l'instant (en début de matinée, ndlr) on a aucune réservation alors que normalement nous sommes complets à chaque fois."

A Paris, dans un quartier très fréquenté du XIe arrondissement, la crainte est aussi présente pour Mirela Mihalca, serveuse depuis un an au café du Temple: "on le ressentira sûrement sur les pourboires. En plein mois d'août c'est déjà pas très animé", déplore-t-elle.

"Certains comprendront vite, d'autres pas. Ca va être difficile, on n'est pas la police", soupire la serveuse de 30 ans, qui redoute l'effet de la mesure sur la fréquentation de l'établissement, installé dans un quartier pourtant très fréquenté de la capitale.

Mêmes inquiétudes à Bordeaux, où les premières chaises sont déjà alignées en terrasse du café Sainte-Croix, en face de l'église du même nom. "J'ouvre car je ne veux pas perdre de sous pour rien", explique le gérant David Fourton. "C'est une plaie pour nous, car je vais devoir embaucher quelqu'un en plus pour faire les contrôles. Et si on dit non aux clients sans pass quelle va être leur réaction ?", dit-il, craignant "un gros bazar en cas d'affluence".

"Ce n'est pas mon rôle", déplorent les cafetiers qui, débordés, n'ont pas le temps de contrôler tous les clients en cas d'affluence 

A Versailles, l'ambiance est un peu plus détendue. Avec ou sans masque, pas encore besoin de montrer patte blanche pour un café noir. "Je suis tout seul, comment voulez-vous que je serve tout le monde et que je contrôle en même temps ?", demande José, qui dégaine les expressos pour un comptoir rempli d'habitués. "Ce n'est pas son rôle, c'est la vie privée des gens", soupire l'un d'eux.

Dans un autre café près de la gare des Chantiers, la télévision allumée sur une chaîne d'informations en continue rappelle les nouvelles mesures. Christina, la gérante, n'a pas le temps d'y jeter un oeil. "On contrôlera après le rush, quand les gens seront assis et qu'ils prendront vraiment le temps". Les sanctions administratives - jusqu'à 9.000 euros d'amende et un an d'emprisonnement pour trois manquements constatés en 45 jours - lui font peur, mais aussi tôt le matin, elle ne craint pas trop les contrôles de police.

Trains: contrôles "massifs, pas systématiques"

Le pass est aussi obligatoire pour les transports longue distance: les contrôles "seront massifs, ils ne seront pas systématiques" pour les 400.000 voyageurs par jour dans les trains, a déclaré lundi le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebbari sur France Inter, en espérant que la mesure "suscite l'adhésion".

A la gare de Dijon, l'application du pass ne suscitait aucune attente supplémentaire. Il est vrai qu'il n'y a "pas de contrôle pour l'instant en gare mais seulement dans les trains", indiquait un employé SNCF préférant conserver l'anonymat.

"Je trouve ça rassurant le pass. Car me retrouver dans un espace clos, enfermé dans une boîte, je préfère que ce soit avec des gens vaccinés", explique Cédrine Gidon, 52 ans, arrivée "très en avance" pour prendre son TGV pour Paris "au cas où il y aurait eu de l'attente".

Mustapha, lui, ne décolère pas: "on n'est plus libre", lâche-t-il, visiblement très frustré d'avoir été "obligé" de faire un test pour prendre le train. Comme tous les lundis et tous les samedis, il fait l'aller-retour vers les villes où il supervise des chantiers, en l'occurrence Toulouse ce lundi. "Je ne suis pas antivax mais contre le fait qu'on m'impose des choses", continue-t-il.

Un peu de tension à l'hôpital

Devant l'hôpital européen Georges Pompidou à Paris, une altercation survient entre un visiteur et les contrôleurs du pass sanitaire. "Ça me dégoûte, j'aurais honte à votre place !", crie à travers les barrières de sécurité Bernard François, un septuagénaire qui n'a pas pu accompagner à l'intérieur pour un scan sa femme Nicole, malade du cancer, faute de pass sanitaire.

"C'est un monde de fou, le serment des médecins est de soigner, pas de dire 'toi tu peux rentrer, toi non'", fustige-t-il, tandis que sa femme a fait un test PCR pour se présenter à son rendez-vous. Le pass sanitaire n'est pas nécessaire pour accéder aux soins d'urgence dans les hôpitaux.

De son côté, Coline Martin entre sans problème avec sa carte professionnelle. Médecin dans le service de diabétologie, elle pense qu'il y aura "pas mal" d'annulations pour les consultations. "Je pense que les patients ne sont pas forcément au courant, qu'ils vont venir, se faire refuser et revenir plus tard avec un test. Ça va être assez compliqué cette semaine", déplore-t-elle.

Le pass étendu aussi aux grands centres commerciaux

Le pass, qui pourra aussi être exigé sur décision préfectorale dans les commerces de plus de 20.000 m2, ne sera pas demandé pour une visite chez un médecin généraliste. 

Déjà en vigueur pour les lieux de culture et de loisirs (musées, cinémas, parcs à thème, festivals, foires, stades, salles de gym...)

Il était déjà exigible depuis le 21 juillet à l'entrée des lieux de culture et de loisirs (musées, cinémas, parcs à thème, festivals, foires, stades, salles de gym...) accueillant plus de 50 personnes.

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