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Rapport Thiriez: une "réflexion saine" pour les élèves, qui regrettent l'abandon du nom "ENA"

"Une réflexion saine": à Strasbourg, des élèves de l'ENA ont accueilli plutôt favorablement mardi le rapport Thiriez sur la refondation de l'école, même si certains regrettent l'abandon de son nom, véritable "marque de l'administration publique française".

Socle d'enseignement commun pour les administrateurs civils, les magistrats, les commissaires ou encore les ingénieurs de l'Etat; introduction d'une préparation militaire; ouverture aux élèves d'origines modestes... Le rapport remis mardi au Premier ministre par l'avocat Frédéric Thiriez propose une refondation de l'Ecole nationale d'administration (ENA), sévèrement critiquée pendant la crise des "gilets jaunes" pour fabriquer des élites "hors sol".

"C'est bien qu'on modifie la structure, le contenu de certains enseignements, je crois que c'est une réflexion saine", explique Charles, 25 ans, devant l'entrée de la prestigieuse école, installée dans une ancienne prison, à un jet de pierre du quartier touristique de la Petite France.

"C'est bien aussi qu'on parle de manière apaisée et publique de comment on veut former les hauts fonctionnaires de ce pays", estime-t-il.

- La marque "ENA" -

A ses côtés, un de ses condisciples, 25 ans également, préfère rester anonyme. Il salue l'introduction, proposée par le rapport, d'une formation militaire (trois semaines de "préparation militaire" et autant d'encadrement de jeunes du service national universel): "c'est une bonne chose, ce sont des axes que l'ENA explore déjà avec des partenariats avec l'Ecole de Guerre", se félicite-t-il.

"C'est bien que les deux mondes se parlent. Avec la fin du service militaire (en 1997, ndlr), c'est vrai qu'il y a eu un manque dans la formation de la haute fonction publique", estime-t-il.

Jacob Ross, étudiant allemand de 28 ans en cycle international, est quant à lui frappé par la proposition de rebaptiser l'ENA en "Ecole d'Administration Publique": "le changement de nom c'est peut-être le plus grand point parce que l'ENA, à l'étranger, c'est vraiment le nom qui porte la marque de l'administration publique française".

Le rapport propose toutefois de conserver la "marque ENA" à l'international, via une filiale ENA internationale (ENAi) qui proposerait des formations, précise le rapport.

Pour Jacob, l'introduction d'un tronc commun est "logique": "ça fait sens de former les gens ensemble. (...) En ce moment, on est en formation avec les (étudiants) de l'INET (l'Institut national des études territoriales, ndlr), la semaine dernière avec des magistrats"...

L'abandon du nom "ENA", Charles confie le regretter "un petit peu. Les institutions tirent notamment leur force d'une forme de durée et d'inscription historique, je trouve que c'est bien de garder le même nom".

- "Obstacles"? -

"Je comprends l'attachement (...) au nom" mais le modifier est "une étape un peu nécessaire" afin de "marquer l'évolution" de l'école, tempère Maud, 31 ans. Issue du concours interne, cette membre de la promotion Hannah Arendt (2019-2020) préfère insister sur les créations de nouvelles classes préparatoires, notamment pour les élèves de milieux modestes, à ses yeux une "annonce forte" du rapport Thiriez.

L'idée d'introduire un tronc commun et travailler avec des élèves d'autres grandes écoles est "bonne", estime Charles, même si "ce sont des choses qui existent presque déjà : on se fréquente avant de rentrer dans telle ou telle école de service public, on s'est fréquenté qui à Sciences Po, qui dans une école de commerce, qui dans une école d'ingénieur..."

Étudier avec "les grands corps de l'Etat, je trouve ça assez intéressant, c'est avec eux qu'on a le moins de relations, avec les ingénieurs alors qu'on sera amenés à les retrouver dans les ministères techniques", abonde son collègue anonyme.

L'idée de travailler avec des magistrats le rend plus dubitatif: "ça peut poser des problèmes au niveau de la séparation des pouvoirs, je ne sais pas s'il y aura des obstacles réglementaires. (...) Nos carrières sont assez différentes, je ne vois pas très bien ce qu'on pourrait partager en termes de formation de fond".

L'ENA est une école qui a connu "beaucoup" de changements, "mais à bas bruit", relève Maud. En ce sens, le rapport Thiriez est l'occasion de "faire le bilan" de ces changements. "On a hâte de savoir" ce que le gouvernement "va en faire".

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