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La misère et les espoirs des réfugiés nord-coréens pour ouvrir le Festival de Busan

Avec "Beautiful Days", qui a ouvert jeudi à Busan, en Corée du Sud, le plus grand festival de cinéma d'Asie, le réalisateur Jero Yun livre un portrait sans fard de la vie de misère qui attend parfois, en Chine, les Nord-Coréens qui fuient leur pays.

C'est ici un thème cher au cinéaste sud-coréen formé en France, qui l'avait déjà exploré en 2016 avec le documentaire "Madame B, histoire d'une Nord-Coréenne", lequel avait été présenté au Festival de Cannes dans la sélection parallèle de l'ACID.

"Beautiful Days", dont c'était la première jeudi à l'occasion du Festival international du film de Busan (Biff) raconte l'histoire de Zhen Chen, un jeune Sino-coréen qui part à Séoul chercher sa mère qui l'a abandonné 14 ans plus tôt. Il se fait l'émissaire de son père mourant qui souhaite la revoir une dernière fois.

L'étudiant est cependant séché par l'accueil très froid de sa mère, interprétée par la star sud-coréenne Lee Na-young. Serveuse dans un bar, elle vit dans un logement décrépit avec un truand.

Zhen Chen ne tarde cependant pas à découvrir le lourd secret de sa mère.

Originaire de Corée du Nord, elle fut vendue par des passeurs en Chine à un pauvre paysan sino-coréen vivant du côté chinois et qui deviendra le père de Zhen Chen.

Au départ pleine de ressentiment, la jeune femme s'habituera à cette nouvelle vie, à son époux, avant que son passé ne ressurgisse et la contraigne à être séparée de son mari et de son fils.

- "Nouveau départ" possible-

Noir, le film est également très réaliste quand il plonge dans les horreurs de la traite des êtres humains, du trafic de drogue ou de la prostitution en plein essor à la frontière entre le Nord et la Chine.

L'écrasante majorité des Nord-Coréens fuyant l'un des régimes les plus fermés au monde le font via la Chine. Et nombre de femmes sont vendues à des paysans chinois, ou contraintes de se prostituer.

Refuser cette misère, c'est risquer d'être arrêté par les autorités chinoises et expulsé vers la Corée du Nord, où certains sont emprisonnés, torturés, voire envoyés en camp de travail.

Pour cette fiction, Jero Yun s'est beaucoup inspiré des nombreux Nord-Coréens rencontrés à la frontière pour son documentaire qui racontait l'histoire d'une femme mariée en Corée du Nord et vendue à un paysan chinois avec lequel elle vécut pendant une dizaine d'années avant de fuir en Corée du Sud.

"J'ai toujours voulu raconter les histoires de ceux qui sont en marge de la société (...) y compris ceux qui se trouvent marginalisés du fait de la division Nord/Sud", explique le réalisateur de 38 ans, qui a notamment fait les Beaux-Arts à Nancy et est diplômé de l'Ecole nationale supérieure des arts décoratifs de Paris.

"En racontant l'histoire de cette famille non conventionnelle, je souhaitais aussi poser la question: +Quel est le sens véritable d'une famille?+"

Le sujet du film est lourd, mais le réalisateur choisit de l'achever sur une note d'optimisme prudent qui, explique-t-il, peut renvoyer aussi aux espoirs soulevés par la situation actuelle sur la péninsule coréenne.

Dernier point chaud de la Guerre froide, celle-ci connaît depuis janvier une remarquable détente, après des années de montée des tensions liées aux programmes nucléaire et balistique de Pyongyang.

Le président sud-coréen Moon Jae-in et le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un se sont rencontrés trois fois depuis avril, et ce dernier a même eu un sommet historique en juin avec le président américain Donald Trump.

"Un des messages clés que je veux adresser avec ce film, c'est la possibilité d'un +nouveau départ+, quel que soit le passé", a déclaré le réalisateur aux journalistes.

"Et, coïncidence, il se trouve que les deux Corées sont en train de se rapprocher comme s'il s'agissait d'un nouveau départ dans leur relation naguère tendue", a-t-il dit.

"Je trouve tout cela très positif."

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