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Fonds Marianne: "Fiasco", "coup politique", l'enquête du Sénat étrille Schiappa

"Opacité", "désinvolture", "fiasco", "coup politique": la gestion du Fonds Marianne, lancé en 2021 par la secrétaire d'Etat Marlène Schiappa, a été doublement étrillée jeudi, par la commission d'enquête du Sénat et par un nouveau rapport administratif.

"Le manque de rigueur, l'opacité et la désinvolture ont conduit au fiasco" de cette initiative destinée à financer des contre-discours à l'islam radical, a déclaré lors d'une conférence de presse Jean-François Husson (LR), le rapporteur de l'enquête du Sénat consacrée à ce dossier controversé.

"Le constat est sans appel sur la dérive de ce que nous appelons +un coup politique+", a-t-il ajouté, évoquant une "grande opération de communication" de la part de la ministre.

Pour les rapporteurs, le processus de sélection des associations bénéficiaires du fonds de 2,5 millions d'euros, mis en place quelques mois après l'assassinat du professeur Samuel Paty, a été "bâclé, opaque et fragmenté": le délai de l'appel à projets a été ramené de 70 à 20 jours, ce qui ne permettait pas aux associations de "présenter des projets véritablement construits".

Des structures qui ne présentaient "aucune garantie quant à leur sérieux et à la qualité de leur action" ont "non seulement été sélectionnées mais ont également reçu les subventions les plus importantes", insistent-ils.

Ainsi, l'Union des sociétés d'éducation physique et de préparation militaire (USEPPM) présente un "bilan insignifiant au regard de la subvention" de 355.000 euros qui lui a été promise, selon le rapport: elle ne compte que 1.763 abonnés au total sur Twitter, Tiktok et Instagram.

Quant à "Reconstruire le commun", qui a obtenu 330.000 euros, il s'agit d'une "erreur de casting" selon les sénateurs: les vidéos produites et mises en ligne par cette association ont "ciblé des personnalités politiques", ce qui est "inacceptable" de la part d'une structure recevant des financements publics, selon eux.

Au final, la "promesse" inhérente à ce dispositif "n'a pas été tenue, ce qui relève pleinement de la responsabilité politique de la ministre", selon M. Husson.

- "Pertes de mémoire" -

Longuement auditionnée, le 14 juin, par la commission d'enquête, Mme Schiappa s'est "largement défaussée sur (son) cabinet, elle a eu beaucoup de pertes de mémoire", a-t-il critiqué, fustigeant des prises de paroles "consternantes" et "affligeantes".

Lors de cette audition, Marlène Schiappa avait assuré vouloir assumer sa "responsabilité politique", mais souligné qu'elle n'avait pas fait partie du comité de sélection des lauréats et qu'il ne lui incombait pas de suivre l'avancée des projets.

Pour les rapporteurs, au contraire, le cabinet de la ministre "a eu un un rôle actif dans le processus de sélection" des associations, tout en manifestant par la suite "une absence de pilotage et de suivi confinant à l'irresponsabilité".

Figure de la galaxie Macron depuis 2017, Marlène Schiappa a vu son étoile pâlir. Elle est aujourd'hui fragilisée, avec des appels répétés à la démission venus de l'opposition de gauche.

La justice a ouvert une enquête confiée à un juge d'instruction début mai, pour "détournement de fonds publics, détournement de fonds publics par négligence, abus de confiance et prise illégale d'intérêts".

La commission d'enquête du Sénat va transmettre au Parquet national financier "des éléments" pour "permettre à la justice d'effectuer son travail et de qualifier les faits", a dit le rapporteur.

Quant à la question de savoir si Mme Schiappa pourrait être poursuivie pour avoir menti devant la commission, "on aura un débat là-dessus", a commenté dans une interview au Monde le président (PS) de la commission, Claude Raynal.

Ce dossier a également fait l'objet d'une double enquête administrative. Après un premier rapport critique, publié début juin et portant uniquement sur l'USEPPM, l'Inspection générale de l'administration (IGA) a rendu jeudi soir de nouvelles conclusions, sur les autres bénéficiaires des fonds.

Les inspecteurs y épinglent le "processus opaque de sélection des lauréats", qui n'a pas respecté les critères établis.

Ils émettent une "analyse défavorable" sur les contenus produits par les deux principaux bénéficiaires des fonds mais ne relèvent pas d'"irrégularités manifestes" de la part des autres associations. Ces dernières "ont répondu aux attentes qui étaient placées en elles", a observé l'actuelle secrétaire d'Etat chargée de la citoyenneté, Sonia Backès, qui a succédé il y un an à Marlène Schiappa.

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