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L'élève qui a poignardé à mort sa professeure d'espagnol mercredi à Saint-Jean-de-Luz a été mis en examen vendredi pour assassinat et placé en détention provisoire mais son avocat s'interroge sur son degré de responsabilité pénale.
Les "motivations personnelles" de l'adolescent de 16 ans, inconnu des services judiciaires, "ont besoin d'être sondées, appréciées, testées par des psychiatres", afin de déterminer si son discernement était "entier", ou "au contraire aboli, ou éventuellement altéré", a déclaré à la presse Me Thierry Sagardoytho à la sortie du tribunal judiciaire de Bayonne.
En garde à vue, l'élève de seconde qui a poignardé sa professeure Agnès Lassalle, 52 ans, avec un couteau de cuisine caché dans un rouleau de papier essuie-tout, "a mis en avant une petite voix qui lui parle", avait déclaré jeudi le procureur de la République à Bayonne, Jérôme Bourrier.
Selon les premières déclarations de l'adolescent, qui a été placé en détention dans un établissement pénitentiaire pour mineurs selon un communiqué du parquet, elle "l'incite à faire le mal et lui aurait suggéré la veille de commettre un assassinat", avait ajouté le magistrat.
M. Bourrier avait également indiqué qu'un premier examen de l'élève en garde à vue avait révélé "une forme d'anxiété réactionnelle pouvant perturber son discernement" et "des éléments de dépression évoluant depuis une année", mais "aucune maladie mentale de type schizophrénie, état maniaque, mélancolie ou retard mental, ni décompensation psychiatrique aiguë".
"L'adolescent apparaît accessible à une responsabilité pénale sous réserve des expertises qui devront être ordonnées et d'une possible altération de son discernement", avait ajouté le procureur.
- "Ravagé" par son geste -
Pour l'avocat, cette expertise "fait totalement l'impasse sur la tentative de suicide" de l'adolescent en octobre 2022, évoquée par le procureur, "et les prescriptions médicales dont il était l'objet".
Cette tentative de suicide "questionne considérablement au regard de ce qui lui est aujourd'hui reproché", a-t-il poursuivi. "La prise en charge était-elle adaptée ? Des signes avant-coureurs ont-ils été décelés ? Visiblement non."
"Lorsqu'il raconte les faits, à mon sens ce n'est pas lui qui agit. Lorsqu'on parle à la troisième personne de soi-même, je m'interroge sur une possible dissociation de personnalité", ajoute Me Sagardoytho.
L'adolescent "est évidemment ravagé par le geste qu'il a commis et qui lui est reproché", a également souligné l'avocat dressant le portrait d'un "garçon brillant dans les disciplines scientifiques, visiblement moins à l'aise dans la langue espagnole".
Selon le procureur, l'adolescent a admis en garde à vue "une forme d'animosité à l'égard de sa professeure" mais aussi évoqué des "faits de harcèlement" subis dans son précédent établissement, un collège public de la ville, et "une dispute" la veille avec un autre élève.
Une de ses ex-camarades de troisième l'a décrit comme "un garçon timide" qui avait "deux ou trois amis mais pas beaucoup plus". "Parfois arrogant" ou "colérique", il n'aimait "pas trop se faire reprendre par les professeurs en classe", selon elle.
Jeudi après-midi dans les collèges et lycées qui ne sont pas en vacances, une minute de silence a été observée en hommage à l'enseignante, décrite comme "très dévouée" par le ministre de l'Education Pap Ndiaye, "très gentille" et "à l'écoute" par un de ses élèves.
Elle "adorait ses élèves, aimait son boulot", a de son côté témoigné Stéphane, le compagnon de Mme Lassalle au micro de France Inter. "Et elle était adorée d'eux."
- "Reprendre une vie normale" -
Sa mort a bouleversé la communauté éducative, un peu plus de deux ans après l'assassinat de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie décapité par un jeune islamiste radicalisé.
Vendredi matin, à 08H00, les élèves du collège-lycée Saint-Thomas d'Aquin, établissement catholique privé réputé pour son calme et ses résultats scolaires, ont à nouveau afflué à l'heure de l'ouverture du portail, sous les yeux de trois policiers postés à l'entrée.
De rares élèves avaient une fleur à la main.
"Tous les élèves reviennent aujourd'hui, dans une ambiance toujours très recueillie et un soutien toujours en place, avec la médecine scolaire et les psychologues de l'Education nationale. La cellule d'urgence d'aide psychologique se tient aussi à disposition, pour revenir si besoin", a fait savoir Vincent Destais, directeur diocésain de l'enseignement catholique de Bayonne.
"On essaie de reprendre une vie normale et des enseignements dans la mesure du possible avec les élèves", a-t-il également déclaré à une correspondante de l'AFP.
Les agressions contre des professeurs sont fréquentes en France mais l'AFP a recensé moins d'une dizaine de meurtres sur les quatre dernières décennies.
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