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Présidentielle au Paraguay: le candidat conservateur en avance à mi-décompte

Le candidat du Parti Colorado (conservateur) au pouvoir, Santiago Peña, a une nette avance dimanche soir à mi-parcours du décompte de la présidentielle au Paraguay sur son principal rival de centre-gauche, Efrain Alegre, selon les chiffres officiels.

Santiago Peña, un économiste de 44 ans, totalise 44,99% des voix et son principal adversaire Efrain Alegre 27,95%, après dépouillement de 52% des votes, selon les chiffres préliminaires du Tribunal de Justice électorale, près de trois heures après la fermeture des bureaux de vote.

L'élection présidentielle se déroule sur un seul tour.

Les sondages des dernières semaines avaient donné les deux principaux candidats dans un rare coude-à-coude pour des élections au Paraguay, où le Colorado domine la vie politique quasiment sans interruption depuis 76 ans, hormis une brève parenthèse à gauche sous Fernando Lugo entre 2008 et 2012. Plusieurs analystes évoquaient un scénario "imprévisible".

Santiago Peña, un ancien ministre des Finances sous la présidence d'Horacio Cartes (2013-2018), se présente pour la première fois à une élection nationale. En 2018, il avait été défait aux primaires du Colorado par l'actuel chef de l'Etat, Mario Abdo Benitez. Le président sortant ne peut briguer la réélection immédiate.

Face à lui, Efrain Alegre, un avocat de 60 ans, se présentait pour la troisième fois à une élection présidentielle, à la tête de la Concertacion Nacional, une coalition de centre-gauche, après ses échecs en 2013 en 2018.

Le candidat "anti-système", Paraguayo Cubas, pointait en 3e position avec 20,43% des voix à mi-parcours du décompte.

Le scrutin de dimanche s'est déroulé sans incident majeur, selon le chef de la police paraguayenne Gilberto Fleitas, qui en fin de journée, a rapporté quelques cas d'échauffourées, et six personnes détenues à l'échelle du pays.

- Corruption des élites à l'index -

Le social et la répartition des richesses ont été un thème fort de la campagne, dans un Paraguay agro-exportateur à la prospérité enviable en Amérique latine (4,5% de croissance prévus en 2023), mais aux criantes inégalités (24,7% de pauvres), et au système de santé public notoirement défaillant.

Dans le "Bañado sur", un de ces bidonvilles régulièrement inondés sur les berges de la rivière Paraguay à Asuncion, des habitants affirmaient cette semaine leur désintérêt pour le scrutin, faute de "proposition sérieuse pour les pauvres". Mais une file d'attente compacte suggérait bel et bien dimanche une mobilisation des 12.000 électeurs du bidonville, a constaté l'AFP.

Efrain Alegre, jadis militant contre la dictature d'Alfredo Stroessner (1954-1989), s'est posé en pourfendeur de ce qu'il appelle la "mafia" clientéliste du Colorado "liée au crime organisé", un système à présent "effondré", selon lui.

La corruption était un thème majeur de l'élection, le pays est 137e sur 180 dans le classement de la perception de la corruption de l'ONG Transparency International.

M. Peña a dû se défendre du stigmate associé à son mentor, l'ex-président (2013-2018) et magnat du tabac Horacio Cartes, que Washington a qualifié en 2022 de "significativement corrompu" et interdit d'entrée ou de transactions aux Etats-Unis, pourtant historiquement allié indéfectible d'Asuncion.

Car dans un Paraguay aux frontières poreuses (enclavé entre Brésil, Argentine et Bolivie), lieu de transit de la cocaïne andine, la corruption gangrène, et tue désormais: un procureur, un maire anti-drogue et un journaliste ont été assassinés en 2022.

- Jérusalem, Taipei -

Dans un pays à 90% catholique, à forte influence guaranie (langue amérindienne officielle, comme l'espagnol), M. Peña comme M. Alegre se rejoignaient sur les thèmes sociétaux, opposés tous deux au mariage pour tous et à l'avortement.

"Nous sommes une société conservatrice, c'est profondément enraciné en nous (...) et ça nous rend prudents face aux grands changements de société", assume auprès de l'AFP M. Peña, se présentant en garant des traditions et de la famille, face à un monde "déshumanisé".

A des années-lumière des préoccupations des Paraguayens, le scrutin pourrait avoir aussi un impact géopolitique marginal.

M. Peña a affirmé qu'il transfèrerait -de nouveau- l'ambassade paraguayenne en Israël de Tel Aviv à Jérusalem. Comme l'avait fait le président Cartes en 2018, avant que son successeur ne revienne sur le transfert quelques mois plus tard.

A l'inverse de son rival, Santiago Peña a par contre assuré qu'il maintiendrait les relations d'Asuncion avec Taipei --le Paraguay est l'un des 13 Etats au monde qui reconnait officiellement Taïwan. M. Alegre a dit qu'il "analyserait" le devenir de ces relations au nom de l'intérêt commercial supérieur que revêtirait un rapprochement avec la Chine.

Près de 4,8 millions d'électeurs désignaient président, vice-président, députés, sénateurs, et 17 gouverneurs provinciaux.

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