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En retard à cause de trains annulés, Alexandre est surpris par la demande de son employeur: "Est-ce qu'il a le droit?"

A la suite de l’"annulation de trains", Alexandre (prénom d’emprunt) est arrivé plusieurs fois en retard au travail depuis le mois de décembre dernier. Le Bruxellois raconte qu’après s’être montré indulgent, son employeur a décidé de réagir.   

"Il dit que mes retards sont prévisibles et me demande de prester le temps de retard. Pourtant, lorsque vous pouvez établir que votre retard au travail est dû à une cause imprévue et indépendante de votre volonté, survenue sur le chemin du travail, vous avez droit à votre rémunération complète sans devoir prester le temps de retard. Est-ce que mon employeur a le droit de considérer les annulations de train comme une cause prévue ?", s’interroge-t-il.

Quotidiennement, Alexandre prend les transports en commun pour se rendre sur son lieu de travail. 1h de trajet au total, en combinant bus et train.

Alors que la relation avec son employeur est "au beau fixe", la confiance entre les deux parties s’est légèrement effilochée ces derniers temps. "Je suis très content de ma hiérarchie, cela se passe généralement très bien, mais je pense qu’ils se braquent un peu par rapport aux horaires", indique-t-il. "En 4 ans, j’ai eu 4 retards dû à une annulation de train le jour-même", assure-t-il. 

Alexandre raconte qu'un récent événement a fait réagir son patron: "Je me suis retrouvé à devoir attendre le train sur le quai quelques fois. Ils ont accepté trois fois des retards depuis décembre, mais la quatrième fois, début mai, ils ont considéré que ça faisait de trop. Selon eux, l’imprévu devient prévu. Il faut que je prenne un train d’avance. A chaque fois, j’ai eu 45 minutes de retard donc je dois faire 45 minutes supplémentaires pour rattraper mon retard. Ils ne jouent pas sur le salaire, mais sur les heures. Je regrette qu’ils ne respectent pas la loi. Je vais devoir faire des heures supplémentaires pour rattraper un retard qu’ils sont censés prendre en compte car l’annulation d’un train est un imprévu. Ils m’ont proposé de prendre un train plus tôt et arriver 45 minutes plus tôt quand il y a une annulation de train. Je ne suis pas fâché sur ma hiérarchie, mais c’est plutôt une question sociétale. La loi du travail est importante pour garder un équilibre psychique", souligne-t-il.

Ce monsieur ne devrait pas prester les 45 minutes de retard

Au-delà de la situation vécue par ce Bruxellois, quelles sanctions l'employeur peut-il prendre à l'égard de ses employés en cas de retards à répétition ? Pour répondre à cette question, nous avons interrogé Giussepe-Henri Torreni, avocat spécialiste en droit du travail.

Par rapport à la situation décrite par Alexandre, l’article 27 de la loi du 3 juillet 1978 dit que le travailleur "a droit à la rémunération qui lui serait revenue s’il avait pu accomplir sa tâche normalement. Le travailleur apte à travailler au moment de se rendre au travail ne parvient qu'avec retard ou n'arrive pas au lieu du travail, pourvu que ce retard ou cette absence soient dus à une cause survenue sur le chemin du travail et indépendante de sa volonté."

"Imaginons que la personne commence à travailler à 8h. Elle n’arrive qu’à 8h40 et sa journée était de 8h à 16h. Les 40 minutes manquantes seront quand même rémunérées et donc in fine, il n’y a pas lieu de la faire prester plus car l’absence et le retard est dû à une cause involontaire, un cas de force majeur", souligne Giussepe-Henri Torreni. "Le fait que l’employeur de ce monsieur demande de prester les 45 minutes de retard, ce n’est pas ce que l’article 27 dit. La rémunération est due pour ces heures, et il n’y a pas lieu de les récupérer car c’est un cas de force majeur."

Retards systématiques : quelles sont les sanctions possibles?

Giussepe-Henri Torreni explique par ailleurs que le règlement de travail de l’entreprise peut prévoir des sanctions en cas d’arrivées tardives répétées.

"Tout est cas d’espèce. Si vous avez quelqu’un qui est un habitué du réveil oublié ou autre, ça pourrait finir vers un licenciement. A l’employeur de décider s’il considère ça comme étant une faute grave. Ce qui serait osé. Cela peut être un licenciement simple car en réalité, ça désorganise le travail. L’employeur pourrait dire, je dois compter dans une agence bancaire, un magasin ou autre, sur 4 travailleurs présents ou un travailleur présent, je ne peux donc pas poursuivre la relation. Tout dépend de ce qu’on n’entend par systémique. Si c’est 4 retards en 5 mois… Au bout de trois retards de 5 minutes, on ne devrait pas être mis dehors. Mais il est vrai que les habitués du retard pourraient être sanctionnés comme ça, c’est une évidence", indique l'avocat spécialiste en droit du travail.

Il poursuit: "Les sanctions disciplinaires dépendent de ce qui est prévu dans le règlement de travail propre à chaque employeur. Dans l’absolu et de manière générale, on partira d’abord sur un avertissement écrit, un préalable nécessaire. L’employeur, qui du jour au lendemain, déciderait de licencier, même s’il y a 40 retards derrière, n’a pas averti et donc mis en garde le travailleur quant au faut que ce n’était pas acceptable, serait mal pris en cas de licenciement. Il y a d’abord un avertissement, et si au-delà de l’avertissement, le retard systémique se poursuit, alors l’employeur pourra envisager de licencier le travailleur : soit un licenciement simple (préavis ou avec indemnités compensatoires), soit éventuellement un licenciement pour motif grave mais je ne le conseillerais pas en tant qu’avocat."

La loi ne fixe en tout cas aucun critère quant à la limite des retards au travail.

"C’est à l’appréciation de l’employeur. Tout est un cas d’espèce. Par exemple, vous avez une entreprise avec 300 travailleurs. Vous avez un travailleur qui arrive de temps en temps en retard. C’est embêtant, mais ça ne justifie pas de licencier", souligne Giussepe-Henri Torreni.

"Si vous avez un commerce avec un employé qui est souvent en retard et le commerce doit ouvrir à 9h... Et imaginons la situation où le commerce doit être ouvert pour que d’autres travailleurs puissent rentrer dedans, à ce moment-là, l’employeur n’appréciera pas de la même manière que lors de mon premier exemple. L’impact du retard sur la relation de travail est tout autre. C’est pour ça que c’est assez compliqué. Il n’y a pas de règle dans la loi qui dit qu’après x retards, on peut arriver à un licenciement. L’employeur prend ses responsabilités et puis le juge appréciera la question de savoir si ces retards peuvent conduire à un licenciement. On ne peut jamais comparer deux situations."

Peut-on aller jusqu'à un non-paiement de certaines heures ? "Si c’est dans le cadre d’un retard fortuit, l’article 27 protège le travailleur. Si c’est un retard dû à la faute exclusive du travailleur (réveil qui n’a pas sonné), alors à ce moment-là, le travailleur ne sera pas rémunéré pour les heures qu’il n’aura pas prestées."

Renégocier les heures sur le contrat ? "Le retard n’est pas souvent lié à l’horaire. Le travailleur qui devait commencer à 8h et qui arrive en retard à 8h30, car il a oublié de mettre son réveil. S’il commence à 9h, il aura oublié de le mettre pour cette heure-là aussi vous savez. Si c’est dû aux trains, les parties peuvent s’accommoder sur un aménagement de l’horaire qui conviendrait mieux." 

Giussepe-Henri Torreni conclut que pour éviter toute tension, il faut que chacune des parties soient de bonne foi. "C’est au travailleur à limiter ses retards. Ce sont des choses qui ne doivent pas arriver. Et l’employeur doit apprécier adéquatement les retards, et ne pas se comporter comme un tyran à l’égard de ses travailleurs. C’est la seule manière selon moi d’arriver à un résultat satisfaisant. L'employé doit penser au fait que le retard peut désorganiser et devenir totalement incontrôlable et inacceptable pour l’employeur."

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Commentaires

8 commentaires

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  • 4 fois en 5 mois. Pour vous c'est régulier ça ? Donc le mec il devrait perdre 45 min et venir plus tôt tout les jours pour être à l'heure 1 jours sur 37 ?

    Kevin Vercaemer
  • 4 fois en 5 mois. Pour vous c'est régulier ça ? Donc le mec il devrait perdre 45 min et venir plus tôt tout les jours pour être à l'heure 1 jours sur 37 ?

    Kevin Vercaemer
  • 4 fois en 5 mois. Pour vous c'est régulier ça ? Donc le mec il devrait perdre 45 min et venir plus tôt tout les jours pour être à l'heure 1 jours sur 37 ?

    Kevin Vercaemer
  • Et voilà le type même de l'employez gens foutre il sait que le train est souvent en retard mais ne prend pas un autre pour arriver a l'heure . Moi je serais son patron c'est la porte qu'il prendrait

    D J
     Répondre
  • Et après, certains s'étonnent que les patrons hésitent à engager... Pourquoi l'employeur devrait payer les retards réguliers d'Alexandre? Il dit que ce n'est pas de sa faute, mais c'est encore MOINS de la faute de son employeur! Si Alexandre payait les services d'un peintre, d'une femme de ménage ou autre pour 8h et que la personne arrivait avec 40min de retard, est-ce qu'il accepterait de payer quand même les 8 pour 7h20 de travail? Je parie que non... Fainéantise égocentrique.

    Thierry Frayer
     Répondre
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