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Un homme se balade à Bruxelles avec un T-shirt qui a choqué Amélie: "Certains jeunes lui ont couru après"

"L'avortement est un crime: choisissez la vie". C'est le message auquel a été confrontée Amélie la semaine dernière dans le quartier Trône, à Bruxelles. Le message est inscrit sur le T-shirt d'un homme, en pleine distribution de prospectus anti-avortement.

Il est aux alentours de 14h30 quand Amélie s’arrête à la station Trône et sort du métro bruxellois : "J’ai d’abord vu un groupe d’étudiants. Ce qui m’a interpellé, c’est que certains étaient regroupés autour d’un homme", nous a-t-elle confié via le bouton orange Alertez-nous. Au premier abord, Amélie voit un homme souriant, distribuant des flyers : "A ce stade, je n’avais rien remarqué d’anormal. C’est en y regardant de plus près que j’ai vu qu’il portait un t-shirt avec un slogan anti-avortement." Sur le T-shirt, les inscriptions suivantes sont mentionnées : "L’avortement est un crime : choisissez la vie". Une situation inattendue pour Amélie : "Je suis énormément la presse anglophone et ce genre de choses, j’ai surtout l’habitude de les voir dans les médias américains. Je n’aurais jamais imaginé voir ça à Bruxelles, dans la capitale de l’Europe. C’est tout un symbole."

Les gens autour de moi étaient tout aussi choqués que moi

La jeune fille de 24 ans est encore plus troublée lorsqu'elle voit l'homme distribuer publiquement des prospectus: "Le voir tout souriant, avec cette apparence sympathique, distribuant des prospectus à des jeunes… ça m’a fait froid dans le dos. Heureusement, j’ai été rassurée de voir que les gens autour de moi étaient tout aussi choqués que moi. Certains jeunes qu’il avait accostés lui ont couru après pour lui rendre ce qu’il leur avait distribué. Ils lui ont dit que c’était une honte." A la vue de la scène, Amélie, est malgré elle, complètement figée sur place :  "Je suis d’habitude quelqu’un qui va très vite dans la confrontation. Mais là, j’étais complètement sidérée. Je ne savais pas comment réagir, alors j’ai pris une photo pour immortaliser ce moment, tellement ça me semblait invraisemblable. Je me suis dit, personne ne va me croire."

Mais pour Amélie, c’est bien plus qu’une simple photo d’un homme distribuant des prospectus anti-avortement : "On ne peut qu’être horrifié de se dire qu’en 2023, encore une fois, les droits des femmes sont toujours menacés et remis en question. Encore un homme, qui pense mieux savoir que nous, ce que ça implique de devoir avorter." D'après Amélie, c’est une véritable prise de conscience qu’il faudrait avoir : "Ce genre de propagande, c’est vraiment fait pour décrédibiliser le combat de plusieurs générations de femmes qui ont lutté pour leurs droits. Ce n’est pas un choix léger que d’avorter. Ça peut être pour des questions médicales, ou financières, ou même un viol ! Ça ne devrait même pas être remis en question."

Si Amélie a une opinion ferme sur le sujet, c’est qu’elle a pu voir son entourage être à plusieurs reprises en proie à des difficultés pour avorter : "Je n’ai jamais dû me faire avorter, mais j’ai des amis qui ont dû passer par là. De la famille aussi. Ma tante a dû faire ça dans des conditions complètement atroces. Elle vivait à l’étranger, dans un pays où c’était interdit de pratiquer l’avortement. J’ai encore en mémoire le récit de ma maman qui me raconte l’histoire de sa sœur, qu’elle a dû accompagner dans une petite ruelle. Là-bas, des femmes les attendaient avec un seau, des aiguilles et des cintres." À la suite de cet avortement clandestin, la tante d’Amélie a dû être hospitalisée. Une expérience traumatisante pour la jeune femme : "Elle est restée à l’hôpital pendant près d’un mois parce qu’elle a été contaminée par une bactérie. Même si j’étais petite, je me souviens l’avoir vu extrêmement malade. Heureusement, elle s’en est sortie, mais ça n’en reste pas moins traumatisant."

Peut-on tout écrire sur un t-shirt ?

Il existe des affaires dans lesquelles des mentions sur un t-shirt ont fait l’objet d’une condamnation. En France, le 25 septembre 2012, un enfant de maternelle s’est rendu dans son école avec un t-shirt portant l’inscription : "Je suis une bombe". Des mots, qui ont eu une forte résonnance puisque les faits se sont déroulés quelques mois après la série d’attentats de mars 2012, qui a couté la vie à sept personnes. Une procédure pénale a été ouverte à l’encontre de l’oncle qui avait offert le t-shirt à l’enfant. Il a écopé de deux mois d’emprisonnement avec sursis et 4000 euros d’amende.

Mais selon l’avocat Jacques Englebert, les condamnations ne sont pas systématiques. Dans le cas d’Amélie, plusieurs facteurs doivent être pris en compte : "La première question à se poser c’est : où était la personne quand elle portait ce T-shirt ? Il y a une différence entre porter ce genre de message devant un planning familial, ou le porter dans un lieu neutre de tout symbole. Il faut réussir à prouver que le contexte et le lieu sont inappropriés, ou encore que les personnes présentes sur place aient été heurtées."

En Belgique, la liberté d’expression est une liberté fondamentale. Elle est énoncée par l’article 19 de la déclaration universelle des droits de l’Homme. Cet article stipule que "Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression". C'est l'un des fondamentaux démocratiques les plus essentiels. Mais cette expression a des limites. Les propos racistes, négationnistes, ou incitant à la discrimination, à la haine ou la violence sortent du cadre légal de la liberté d’expression en Belgique. De même que la diffamation et l’injure. La responsabilité de déterminer ce qui relève ou nom du cadre légal de la liberté d'expression incombe à la Justice et aux magistrats. En résumé, cette liberté est fondamentale, mais pas absolue.

Droit à l’avortement en Europe : de grandes disparités entre les états

En Belgique, l’avortement est un droit fondamental. Il est autorisé par la loi belge, et est reconnu comme un acte médical remboursé par les mutuelles. Et ce, sans besoin de justification de la part de la femme qui a décidé de recourir à une interruption volontaire de grossesse. Les principales différences se situent au niveau des délais maximaux pour y recourir. Au Portugal, il est de 10 semaines, tandis qu’aux Pays-Bas, la limite est fixée à 24 semaines. Dans la moitié des pays, les délais sont de 12 semaines maximum. Mais certains pays ont choisi d’adopter une autre politique. En Pologne, par exemple, la pratique est encore fortement restreinte. À Malte, elle est complètement interdite.

En Europe, sur 27 Etats membres, 24 pays de l’Union européenne ont légalisé ou dépénalisé l’avortement.

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Commentaires

24 commentaires

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  • Pauvres bébés, on vit dans un monde de fous...La réaction de cette Amélie prouve bien l'inversion dès valeurs Bravo à ces courageux étudiants

  • Le droit de chaque personne de gérer son corps. Les arguments du "droit à la vie" ou du "droit du bébé" sont mauvais. Chaque jour, en ne donnant pas votre argent à des organisations humanitaires, vous empêchez des bébés d'être sauvés. Vous seriez donc une criminelle également. Et vous allez me dire que "il suffit de se protéger" pour ne pas avoir d'enfant, sauf que la majorité des femmes qui avortent utilisaient un moyen contraceptif!

    Thierry Frayer
  • Oui, il semble que le droit des bébés soit inexistant...

  • Mais c'est complètement débile comme argument. Vous parlez d'un fœtus ! Vous savez au moins ce que c'est ?

    Gauthier Piep
  • et le droit des bébés ? Non juste le droit des femmes...

    Agnes Pirard
     Répondre
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