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Il voulait aller vite et passer "comme une comète" dans l'univers musical. Mais quarante ans après, le batteur et compositeur Christian Vander est toujours derrière ses fûts, aux commandes de Magma, cet ovni persistant sur la scène française.
Né en 1969, le groupe mythique aux titres d'albums imprononçables ("Kohntarkosz Anteria", "Mekanik destruktiw kommandoh", "Wurdah Itah") va célébrer ses quarante ans par une tournée en France, en Belgique et au Japon à partir de vendredi.
Son fondateur Christian Vander fait partie des jeunes gens qui ont marqué l'imaginaire des années 70. Cheveux longs, regard clair halluciné, marquant ses distances par rapport au monde de la pop music, il ressemble à un chevalier teutonique hautain et moqueur égaré au pays des hippies.
A 60 ans, le physique s'est un peu épaissi, la voix est douce et posée, mais la verve est intacte pour défendre une musique faites d'incantations répétitives posées sur des rythmes complexes, où affleurent des accords évoquant Carl Orff ou Stravinsky. Une musique jugée formidablement neuve par les uns, franchement inécoutable par d'autres.
40 ans d'existence, Vander en semble le premier surpris. "L'idée n'était pas forcément celle-là. J'avais comme exemple John Coltrane qui est passé comme une comète. Je voulais également aller vite. Le temps montre que ce n'est pas forcément comme cela pour tout le monde", constate-t-il, presque déçu.
Christian Vander a fondé Magma deux ans après la disparition de John Coltrane, qui vient alors de révolutionner le jazz. 42 ans après, ce batteur d'une grande finesse, également chanteur et pianiste, parait toujours aussi inconsolable de la disparition du géant du saxophone ténor, qu'il appelle "John" comme on évoque la mémoire d'un grand frère adulé trop tôt disparu.
"John nous a laissés sans question, avec une musique claire. On avait un manque terrible, la discographie de John Coltrane s'était arrêtée là. Et pourtant il fallait continuer. Donc j'ai imaginé une musique. Ce qui me semble manquer, je le compose", analyse-t-il.
Christian Vander a pris son parti de durer. Magma a été une extraordinaire pépinière de talents, d'où sont sortis une centaine de musiciens dont des "pointures" comme Jannick Top, Claude Engel, Bernard Paganotti, Didier Lockwood ou Michel Graillier.
Une quasi affaire de famille également: l'épouse de Christian, la chanteuse Stella Vander, a créé le label seventh records qui édite le groupe, et qui vient de sortir un coffret anniversaire ("studio Zund"). La formation a accueilli la chanteuse et le chanteur-batteur Himiko et Antoine Paganotti, les enfants d'un des piliers du groupe, le bassiste Bernard Paganotti.
Les polémiques -- certains détracteurs croyaient déceler des sous-entendus fascisants dans le sigle en forme de griffe et les tonalités gutturales de la pseudo-langue "kobaïenne" inventée par Vander -- ont fait long feu.
Mais pas les difficultés matérielles à faire vivre une musique dont les compositions ne passent jamais à la radio ou à la télé.
"On n'a pas les moyens de se déplacer avec notre matériel, on me demanderait plutôt de ne pas prendre ma batterie en tournée pour économiser, mais ça me parait insensé de ne pas jouer sur mon instrument !", s'indigne Christian Vander.
Sans entamer ses ambitions artistiques: "à la limite 40 ans c'est peu quand on entre dans cet océan de musique. Notre musique évolue en permanence, je souhaite que le meilleur reste à venir".
