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Le Mauritanien Abderrahmane Sissako, qui est devenu vendredi le premier Africain à recevoir le César du meilleur réalisateur pour son film "Timbuktu", est l'une des figures de proue du cinéma africain. Dans son discours, il a tenu à remercier la France et a affirmé, dans un discours plein d'humanité, qu'il n'existait pas de "choc des civilisations", parlant plutôt de "rencontre de civilisations".
"La France est un pays ouvert aux autres"
Le réalisateur primé a relevé le rôle primordial que la chaîne Arte a joué dans sa vie de cinéaste avant d'évoquer l'immigration en France. "Je pense à l'extraordinaire capacité de ce pays d'inclure beaucoup de gens et je pense que cette France extraordinaire vient de prouver, encore une fois qu'elle est un pays ouvert aux autres, a estimé le réalisateur. Sinon, nous n'aurions pas eu tant de César. Cette France extraordinaire c'est cette académie du cinéma, qui nous a inclus".
"La France est un pays magnifique, parce qu'elle est capable de se dresser contre l'horreur, contre la violence, l'obscurantisme", a dit Abderrahmane Sissako, en référence aux immenses manifestations dans le pays qui ont suivi les attentats du 7 au 9 janvier à Paris.
Une pensée pour l'Afrique "dont on parle rarement dans sa beauté"
"Au-delà de la Mauritanie, c'est l'Afrique qui nous regarde aussi ce continent extraordinaire, dont on parle rarement dans sa beauté et sa force, un continent beau et fort qui nous regarde aujourd'hui", a lancé en recevant son prix le cinéaste de 53 ans, dont le film retrace l'occupation djihadiste de la ville de Tombouctou en 2012. Le réalisateur a également eu une pensée pour le million de spectateurs, français et étrangers, qu'il ne connaît pas et qui ont vu son film.
Sa dernière phrase: "Il n'y a pas de choc des civilisations"
Il a tenu à terminer son discours par cette phrase: "Il n'y a pas de choc des civilisations, ça n'existe pas. Il y a une rencontre des civilisations. Ça c'est important", a ajouté celui qui est devenu le premier cinéaste d'Afrique noire à recevoir le César du meilleur réalisateur.
"Il faut croire que l'Humanité est capable d'un sursaut" face à l'horreur, a-t-il encore dit devant la presse. "Le cinéma joue son rôle dans ce ce sursaut là et c'est merveilleux".
Les ministre français, élogieux
Le Premier ministre français Manuel Valls a salué samedi sur son compte Twitter le "sacre mérité" du film, soulignant qu'il fallait "résister à la barbarie". La ministre de la Culture et de la Communication, Fleur Pellerin, a adressé ses "chaleureuses félicitations" aux lauréats et a déclaré dans un communiqué que "Dans un monde qui tend à s'uniformiser, la France fait entendre une autre voix, celle de la diversité de la création, de l'audace, de l'ouverture".
"Après l'épreuve que la France vient de traverser, le dialogue des cultures, la découverte de l'autre, la création sous toutes ses formes sont une réponse forte au sectarisme, à l'intolérance et à tous les fanatismes", a-t-elle ajouté.
Timbuktu résiste face à l'horreur
"Timbuktu", éclairage sur l'extrémisme qui trouve une résonance politique particulière dans l'actualité, est également en course pour l'Oscar du meilleur film étranger décerné dimanche. Célébrant la tolérance face à l'obscurantisme, le film est inspiré de faits réels: le nord du Mali est bien tombé en 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, qui en ont été chassés en grande partie par l'opération militaire "Serval", à l'initiative de la France.
Nommé à huit reprises, "Timbuktu" -qui a aussi reçu les César du scénario, du montage, du son, de la photo et de la musique-, était le grand favori de la soirée face à "Saint Laurent" de Bertrand Bonello sur la vie du couturier français, qui est reparti presque bredouille.
Film le plus souvent cité, avec dix nominations, il n'a remporté que le César des meilleurs costumes, éclipsé par le raz-de-marée Sissako.
Dany Boon avait donné le ton : "Nous nous devons de montrer l'exemple et de faire preuve d'ouverture d'esprit"
Dès le début de la cérémonie au théâtre du Châtelet à Paris, son président Dany Boon avait donné le ton, en soulignant que "en ces temps troublés, nous nous devons de montrer l'exemple et de faire preuve d'ouverture d'esprit, de tolérance, de respect, de générosité et d'amour".
"Le monde a bien besoin en ce moment qu'on lui raconte des histoires, de belles histoires pour que le monde continue de croire en son humanité", a-t-il ajouté.
