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Cofondateur et premier chef militaire du maquis du Vercors, le général Alain Le Ray est décédé lundi à l\'âge de 96 ans. Il était l\'un des derniers grands témoins de la Résistance.
\"Les amis fidèles de cette époque sont presque tous morts et je suis l\'un des derniers survivants de cette génération\", disait-il en 1999 dans un entretien avec Georges-Marc Benamou (\"C\'était un temps déraisonnable\", Robert Laffont).
Ce passionné de montagne et d\'alpinisme avait arrêté de skier à 75 ans, car, expliquait-il à un journaliste de l\'AFP : \"Si les jambes vont bien, je ne vois plus très clair et je suis un danger pour les autres skieurs\".
Né le 3 octobre 1910 à Paris, Alain Le Ray commence à grimper dès l\'âge de 13 ans. Au début des années 30, il s\'initie en Allemagne aux techniques de l\'escalade moderne. Il y croise de brillants alpinistes allemands, comme l\'officier SS Heinrich Harrer, membre de l\'expédition sur la Nanga Parbat (Himalaya) et héros controversé du film de Jean-Jacques Annaud \"Sept ans au Tibet\", adapté du récit de ses aventures.
C\'est d\'ailleurs l\'un des camarades d\'escalade allemands d\'Alain Le Ray qui l\'alertera sur les dangers de l\'idéologie nazie véhiculée par certains de ses compagnons.
Le 4 mai 1940, le lieutenant Le Ray épouse Luce Mauriac, la fille de l\'écrivain. Six jours plus tard, il se bat sur l\'Ourcq avec le 159e régiment d\'infanterie alpine. Fait prisonnier, il ne reverra sa femme qu\'onze mois plus tard après une évasion spectaculaire.
Le 11 avril 1941, Alain Le Ray réussit la première évasion de la forteresse de Coldtiz en Saxe où les Allemands enfermait les officiers alliés récidivistes de l\'évasion. Réputé comme le camp d\'où l\'on ne pouvait s\'évader, cet oflag connu de fait l\'évasion de 18 officiers alliés seulement, dont six Français, jusqu\'en 1942.
De retour en France, il intègre l\'armée d\'armistice avant de rejoindre la Résistance en novembre 1942, sous les noms de \"Rouvier\" et de \"Bastide\". Début 1943, Alain Le Ray rencontre l\'architecte Pierre Dalloz, qui avait imaginé avec l\'écrivain Jean Prévost et le journaliste Yves Farge, de transformer le plateau du Vercors, grand comme un département français, en bastion de la Résistance.
Chargé du projet par le général Charles Delestraint, chef de l\'Armée secrète, Pierre Dalloz fait appel à Alain Le Ray qui rédige le plan \"Montagnards\" visant à faire du Vercors une plate-forme de recueil des jeunes gens réfractaires au Service du travail obligatoire (STO) et de préparation à la venue de forces aéroportées alliées.
Premier chef militaire de ce maquis mythique, Alain Le Ray démissionne de son poste en décembre 1943 à la suite d\'un désaccord avec le chef d\'état-major de la zone sud-est. Le maquis a été anéanti en juillet 1944 et Alain Le Ray a toujours reproché aux \"gens d\'Alger\" (gouvernement provisoire, ndlr) de ne pas avoir pesé sur les Alliés pour secourir le maquis.
Commandant des Forces françaises de l\'Intérieur (FFI) de l\'Isère en mai 1944, Alain Le Ray libère le département en liaison avec les forces alliées. Puis, à la tête de la 3e demi-brigade de chasseurs alpins, il livre les derniers combats d\'avril 1945 en Haute-Maurienne.
Il poursuit sa carrière en Indochine, puis en Algérie où il commande la division alpine (1962) avant d\'être promu général de corps d\'armée en 1968 et de prendre sa retraite en 1970.
Grand croix de la Légion d\'honneur, le général Le Ray était l\'auteur du livre \"Première à Colditz\" et président d\'honneur des Anciens du Vercors.
