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Lors de l'hommage du nouveau roi Philippe au soldat inconnu à la Colonne du Congrès dimanche, un homme a crié "Vive la République!". Il a raconté sa journée au blogueur Marcel Sel.
Dimanche dernier, jour de Fête nationale, le prince Philippe prêtait serment et devenait roi. Alors que pour ses deux prédécesseurs, les prestations de serment avaient été entachées par un "Vive la République !", crié à chaque fois par un député (Julien Lahaut pour Baudouin et Jean-Pierre Van Rossem pour Albert), celle de Philippe a été beaucoup plus calme. Mais la journée ne faisait que commencer et c’est lorsqu’il s’est rendu à la Colonne du Congrès pour rendre hommage au soldat inconnu que le nouveau roi Philippe a eu droit à son "Vive la République !". Cette fois pas de député, juste un quidam présent dans la foule. Ce cri a été directement suivi de huées de la part du public et de "Vive le roi !", "Vive la Belgique !". Tout aussi rapide que la réponse du public, celle de la police. L’homme, P.L., s’est confié sur le blog de Marce Sel. Il y livre le récit de sa journée et comment lui est venue l’idée de lancer ce cri.
"Je n'étais pas encore certain d'y arriver"
P.L. raconte que ce cri vient d’une promesse faite à deux amis. En se rendant à Bruxelles, il ne savait pas encore s’il serait capable de lancer ce cri, mais divers événements et rencontres au cours de la journée l’ont convaincu. "Je suis sorti de la Gare Centrale pour aller au Parvis Saint-Michel, le Te Deum était terminé. J'ai bavardé avec des journalistes en camionnette, pour savoir quand aurait lieu l'hommage à la Colonne du Congrès. On a évoqué l'accessibilité du public, ils ont remarqué les livres que j’avais à la main, qui venaient de Tournai. L'un d'eux a dit qu'en France, au moins, on pouvait choisir son chef de l'État. Ça m’a réconforté, même si les autres journalistes se sont raidis. Je n'étais pas encore certain d'y arriver."
"J'ai vu rouge"
P.L. poursuit son parcours et c’est dans le parc qu’il prend sa décision: "Après avoir lu Le Soir, un peu avant 13 heures, qui était offert gracieusement. J'ai vu rouge. Parce qu’on y voyait l'hémicycle, et qu’on y indiquait la place qu'occuperait Barroso, la place qu'occuperait Monseigneur Léonard. Je savais que le public n’avait pas accès à la Chambre pour le Serment. Bien sûr, je comprenais qu’il n’y avait pas de place pour la population dans le Palais de la Nation, mais ce qui m’a outré, c’était de constater que ce mot, Nation était un concept asymétrique en Belgique. Parce que Barroso n'en fait pas partie, et les dignitaires catholiques encore moins. Y avait-il un dignitaire musulman, un laïc, un protestant, un athée ?"
"Le type qui se tenait derrière moi en a profité pour me donner deux claques sur la tête"
Après toutes ces réflexions, il a attendu que le silence se fasse après la Sonnerie aux Morts à la Colonne du Congrès pour lancer son cri. Les réactions ne se sont pas fait attendre : huées et insultes de du public. Des "Vive le roi !", "Vive la Belgique !" en réponse. La police elle aussi a réagi rapidement. "La voiture officielle s'est éloignée. J'ai été empoigné par-derrière, le bras saisi et emmené manu militari au coin de la rue de Ligne. Le type qui se tenait derrière moi en a profité pour me donner deux claques sur la tête. Il n'a pas été inquiété. Il souriait. Une femme m’a craché dessus. Le type en rouge, qui avait fait ses moulinets délateurs, m'insultait, me traitait de con, de connard. Il avait été paracommando, précisa-t-il. Je leur ai demandé pourquoi ils m’insultaient. Au coin de la rue où ils m’avaient emmené, deux des quatre policiers qui s’occupaient de moi m'ont rudoyé. Ils m'ont fait ôter mon blouson, j’ai eu droit à la palpation complète."
"Je suis fier de mon geste"
Il n’a finalement pas été arrêté. Selon un des policiers qui a répondu à sa question, il a été sorti de la foule pour le protéger. On lui a demandé de ne plus se présenter à aucun événement, sous peine d’arrestation administrative et amende de 250 euros pour trouble de l’ordre public. "Je suis fier de mon geste. Je suis encore plus fier que ce ne soit plus un député qui ait crié, mais un citoyen normal désireux de démocratie. Je dédie le combat qui s'annonce à Julien Lahaut et à mes ancêtres. Au travail de ces ouvriers. À leurs petites payes. À leur courage de chaque jour. Et aux soldats tombés pour la démocratie et la liberté", a-t-il conclu.
