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Belgique: le chef des indépendantistes flamands rallume la polémique sur la collaboration avec les nazis

Le chef des indépendantistes flamands, vainqueurs des législatives belges, Bart De Wever, a ouvert une boîte de Pandore potentiellement dangereuse pour une Belgique fragilisée en accusant la Wallonie d'occulter davantage que la Flandre sa collaboration avec l'occupant nazi.

Au beau milieu de difficiles négociations avec les francophones sur la constitution d'un nouveau gouvernement, Bart De Wever qualifie de "particulièrement sommaires" les recherches "relatives à la collaboration francophone", dans une tribune intitulée "Nazis flamands" parue mardi dans le quotidien néerlandophone De Standaard.

Le chef de la N-VA, qui prône l'indépendance à terme de la Flandre, la région néerlandophone du nord de la Belgique, prend pour exemple le mutisme entourant selon lui l'antisémitisme et les sympathies fascisantes de Hergé, le pape de la BD francophone belge, dans les années 1940.

"Contrairement aux Belges francophones, le lien établi entre la collaboration et le Mouvement flamand empêche en Flandre de balayer sous le tapis la tentation de l'Ordre nouveau comme s'il ne s'était agi que d'une passade éphémère", estime-t-il.

M. De Wever évoque à l'appui de ses dires le cas de Willy Vandersteen, le créateur des personnages de Bob et Bobette et le plus célèbre des auteurs de BD belge de langue néerlandaise, dont la famille, au nom de la vérité historique, a confirmé la semaine dernière qu'il avait réalisé des dessins antisémites en 1942.

Moralité, selon M. De Wever, historien de formation: "Il vaut mieux faire toute la lumière sur le passé d'une société sans masquer la réalité plutôt que de juger en vertu d'une supériorité morale déplacée et basée sur l'ignorance collective".

Son grand-père ayant été membre d'un parti collaborationniste, le VNV, le chef indépendantiste a souvent été en butte chez les francophones à des soupçons de sympathies fascistes voire antisémites, renforçant le cliché du Flamand pro-nazi.

Mercredi, le journal francophone Le Soir a condamné les propos de Bart De Wever dans un éditorial titré "Le jeu malsain du Belge le plus +collabo+", rappelant que "les francophones n'ont jamais réclamé un brevet de sainteté" et que Hergé a maintes fois reconnu ses errements.

Le journal bruxellois publie aussi une contribution d'un historien qui souligne que le VNV comptait 100.000 adhérents pendant la guerre, alors que Rex, le parti collaborationniste francophone de Léon Degrelle, n'en comptait que 10.000.

L'après-guerre en Belgique avait été marquée par une grave crise entre les deux communautés, qui a abouti en 1950 dans un climat pré-insurrectionnel, à l'abdication du roi Léopold III, soupçonné de sentiments pro-allemands.

Le chef du gouvernement régional wallon, le socialiste Guy Demotte, a critiqué mercredi ceux qui "jettent de l'huile sur le feu" par des "propos déplacés".

On peut s'étonner que le patron de la N-VA ait pris le risque de compliquer plus encore ses négociations sur la formation d'un gouvernement avec le chef des socialistes francophones, Elio Di Rupo, l'autre vainqueur des élections.

Le chef de la N-VA, qui avait critiqué en octobre 2007 les excuses adressées par la municipalité socialiste d'Anvers aux familles des Juifs déportés, est coutumier des polémiques sur des sujets tabous.

Cette fois, M. De Wever veut-il réintroduire une vieille revendication du mouvement nationaliste flamand, à savoir l'amnistie pour les faits de collaboration?

Ayant sans doute cette hypothèse à l'esprit, la députée centriste francophone Catherine Fonck réplique que "les francophones ont toujours condamné avec force" la collaboration "et n'ont jamais, quant à eux, plaidé pour l'amnistie à cet égard".

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