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"Coût important", "stress chronique": Ricardo regrette son master en gestion... les études supérieures garantissent-elles l'épanouissement?

C'est une phrase que tout étudiant a déjà entendu: "Finis tes études supérieures, ça t'ouvrira des portes". Ricardo, qui nous a contacté via le bouton orange Alertez-nous, a suivi ce conseil. Pourtant, aujourd'hui, il regrette ces "années perdues" et son travail actuel, "un job de bureau stressant et ennuyeux". Comment expliquer la désillusion de ce jeune travailleur ?

Ricardo est diplômé d'un master en ingénieur de gestion. Cinq années d'études plus tard, il dresse le bilan : "J'ai investi énormément dans ce parcours académique. Entre les longues années d'études, le stress qui est devenu chronique, mais surtout d'importants moyens financiers : des dizaines de milliers d'euros pour des cours particuliers, les kots...". Un tableau morose pour obtenir un salaire qui lui permettrait à peine de payer son loyer et ses charges.

C'est dans un bureau que ce jeune travailleur trouvera un emploi : "J'analyse des données face à un ordinateur". Un domaine qui ne le "passionne pas du tout" et dans lequel il ne "trouve aucun sens". "Je peine à m'épanouir, et je remets clairement en question mon choix d'avoir opté pour des études supérieures. J'ai le sentiment de m'être fait arnaquer", regrette-t-il.                    

Confrontation avec la réalité

Comment expliquer un tel désenchantement ? Est-ce passager ou synonyme d'un vrai problème ? "Il y a parfois cette difficulté après les études à trouver une place dans le monde du travail en adéquation avec ce qu'on avait imaginé", reconnaît Joséphine Monbry, conseillère d'information au Service d'Information sur les Études & les Professions (SIEP) de Bruxelles. "Ce n'est pas tellement étonnant", continue-t-elle.

Ce qui semble certain, c'est qu'il existe un temps d'adaptation après les études, lié à une déconnexion entre le monde du travail et celui des cours. "Nous essayons d'encourager les jeunes à prospecter sur le terrain, à se renseigner, et pas uniquement sur les programmes de cours, pour éviter les mauvaises surprises", explique Joséphine Monbry. Ricardo travaille maintenant depuis deux ans. 

Un problème d'orientation ?

Et s'il ne s'agissait pas d'un phénomène passager ? Et si Ricardo s'est réellement "trompé" de voie ? "C'est une possibilité, mais pas une fatalité", répond-elle. "Généralement, on fait face à beaucoup d'influence et beaucoup de pression quand on choisit ses études, avec tous les préjugés, avec les attentes familiales qui peuvent influencer", déplore la conseillère d'information. Mais pas question de céder à la panique pour autant. "Aujourd'hui, on ne fait pas un seul métier toute sa vie. Il y a toujours la possibilité de continuer à évoluer, à se former ou même à reprendre des études", assure Joséphine Monbry.

Les études supérieures, le parcours par excellence ?

Selon plusieurs études, le lien entre emploi et type de diplôme est clair. "Plus le niveau de diplôme augmente, plus le taux d'emploi augmente", explique Claire Dujardin, chargée de recherche à l'IWEPS, l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique. En effet, selon des chiffres de Statbel pour 2022 et les calculs de l'IWEPS, le taux d'emploi des 25-49 ans était de 89 % pour les diplômés de l'enseignement supérieur, 73 % pour les diplômés du secondaire supérieur, 54 % pour les diplômés du secondaire inférieur et seulement 36 % pour les personnes ayant au plus un diplôme de l'enseignement primaire.

Un type de formation n'est pas meilleur qu'un autre.

Malgré ces chiffres sans équivoque, force est de constater que les études supérieures ne doivent pas constituer un but ultime pour tout le monde. Un message que le SIEP essaye de faire passer aux jeunes et à leurs parents : "On fait tout un travail de déconstruction d'idées reçues pour présenter tous les secteurs de manière neutre", explique Joséphine Monbry. Les étudiants du secondaire général ont tendance à se diriger automatiquement vers l'université par exemple. "Un type de formation n'est pas meilleur qu'un autre", assure-t-elle. Toutefois, "c'est plus sécurisant dans certains domaines de faire des études supérieures, mais tout dépend du projet", rappelle la conseillère d'information.

Trouver sa voie

Pas la peine de se lancer dans des démarches très importantes lorsqu'on souhaite s'orienter vers un type d'études. "Ce qui est essentiel, c'est l'étape d'information. Rien que le fait de s'assurer d'avoir toutes les filières, toutes les options, cela permet de faire un choix en connaissance de cause et de ne pas faire un choix par défaut ou parce qu'on a "entendu que" ou parce qu'on a été influencé", recommande la conseillère d'information au SIEP. "Ceux qui hésitent encore peuvent aller plus loin", ajoute-t-elle.

Passion et stabilité, éternels ennemis ?

"L'arnaque, je la ressens quand je me compare à des amis qui ont eu le courage de suivre leur cœur en pratiquant des choses qui les passionnent réellement : ils sont chanteurs, artistes, sportifs ou ont tout simplement choisi de travailler dans des domaines qui les intéressent comme l'électricité, la restauration...", nous relate Ricardo, jeune diplômé en ingénieur de gestion. "Quand on présente un certain type de secteur de métier, il y a des réalités à prendre en compte", répond Joséphine Monbry. La rémunération reste une considération importante chez les futurs travailleurs. Pour cette conseillère, "ce ne serait pas correct de dire qu'on peut vivre d'amour et d'eau fraîche". Le SIEP respecte donc l'envie de la personne tout en essayant de "voir ce qui est possible pour amener la stabilité d'une autre manière".

En fin de compte, s'il y a bien un aspect sur lequel Joséphine Monbry et Ricardo s'entendent, c'est que les études "ne sont pas le seul moyen de réussir dans la vie". Bien que ce ne soit pas une garantie, les chiffres ne trompent pas. Selon Eurostat, parmi les jeunes diplômés belges (moins de 3 ans), le taux d'emploi est plus important pour les diplômés de l'enseignement supérieur (87 %). Il chute à 73 % pour les récemment diplômés de l'enseignement secondaire supérieur et à 28 % pour les diplômés du secondaire inférieur.

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Commentaires

1 commentaire

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  • Attention à ne pas confondre passion et travail. Une personne passionnée de dessin n'est pas forcément prête à dessiner des "commandes" imposées 8h par jour pendant 40 ans... A l'inverse, choisir une formation JUSTE pour la salaire est aussi mauvais. Il faut choisir un domaine dans lequel on est prêt à passer 38h par semaine, y compris quand on n'est "pas d'humeur".

    Thierry Frayer
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