Accueil Actu

Les absorbants au fond des barquettes peuvent transmettre du plastique à la viande: en quantité acceptable selon l'Europe

"Certaines barquettes d'aliments contiennent une espèce d'absorbant. De quoi est-il fait ? Est-ce bon pour la santé ?" Ces deux questions nous ont été posées par Gilles via notre bouton orange Alertez-nous. La réponse ? Ces absorbants sont le plus souvent composés d'un mélange de matières plastiques et naturelles et ne sont pas néfastes pour la santé, au sens où ils respectent les limites européennes de quantité de plastique qui peuvent être transmises aux aliments. Ce sont les fabricants eux-mêmes qui doivent prouver à chaque État membre que leur produit respecte ces limites, en les faisant analyser par des laboratoires agréés.

Vous les connaissez depuis toujours, mais vous ne vous êtes jamais intéressé(e)s à eux. Ces petits papiers au fond des barquettes de viande vendues en supermarché ont pourtant une utilité. En absorbant le trop plein de liquides de la viande, ils permettent à celle-ci de moins rapidement se dégrader en offrant un environnement moins propice à la prolifération des bactéries. Pour faire simple, la viande se conserve mieux et reste par la même occasion plus belle plus longtemps.

Pour y arriver, il existe deux systèmes. D'un côté, les absorbants indépendants de la barquette. On parle alors de coussins absorbants, de buvards ou encore de tampons absorbants. De l'autre, les barquettes absorbantes, dans lesquelles le coussin est intégré au fond.

Comme une couche pour bébés

Le coussin absorbant fonctionne exactement comme une couche-culotte pour bébé ou une serviette hygiénique. Une fine membrane poreuse en contact avec la viande laisse passer le liquide vers des fibres qui piègent celui-ci à l'intérieur.

La composition de ces systèmes absorbants peut varier en fonction du fabricant, mais la plus commune est la suivante :

  1. Un film de polyéthylène (une matière plastique) imperméable perforé qui sera en contact avec la viande
  2. Une couche de colle (d'origine naturelle ou synthétique)
  3. Une couche plus épaisse de tissu fait de fibres de cellulose (donc issues du bois) et de billes de polymère super-absorbant, un produit synthétique capable d'absorber jusqu'à 1000 fois son poids en eau
  4. Une nouvelle couche de colle
  5. Un film de polyéthylène non perforé

Les coussins absorbants parmi les plus écologiques sur le marché ont une autre composition.

  1. Le film de polyéthylène est remplacé par un textile non tissé à base de coton et de cellulose
  2. La couche absorbante reste composée de fibres de cellulose et de billes de polymère super-absorbant, même si des équivalents biodégradables sans ces polymères existent également (ceux-ci sont alors exempts de plastique).
  3. Une autre couche de textile non tissé recouvre l'autre face

L'avantage de ce système, c'est qu'il permet de se passer de colle. Le film et le centre contenant tous les deux de la cellulose, ils peuvent être thermo-soudés.

Les barquettes absorbantes, elles, sont le plus souvent faites en polystyrène expansé, donc en frigolite. Il s'agit d'un matériau imperméable pouvant entrer en contact avec la nourriture et qui est alors perforé pour permettre au liquide d'atteindre une couche absorbante identique à celles présentées ci-dessus et située dans le fond de la barquette.

Tous les coussins absorbants vendus en Belgique répondent aux règles européennes

Voilà pour la composition, place à la santé. Nous avons demandé aux 3 principaux acteurs de la grande distribution en Belgique, Delhaize, Colruyt et Carrefour, de nous parler de ces dispositifs. Tous les trois en utilisent pour les produits frais d'origine animale qui dégorgent du liquide, qu'ils proviennent de fournisseurs externes, d'une centrale de distribution propre ou des boucheries situées dans leurs magasins.

Quand on leur demande leur impact sur la santé, la réponse est la même : "Tous répondent aux règlements européens applicables", explique Roel Dekelver, porte-parole de Delhaize. "Nos emballages ont été certifiés comme conformes aux lois européennes", confirme Nathalie Roisin, porte-parole de Colruyt. Enfin, "Carrefour travaille uniquement avec des fournisseurs certifiés. La procédure de validation d’un emballage de fournisseur implique systématiquement la délivrance d’un certificat Food Compliance approuvé par l’AFSCA", détaille Siryn Stambouli, leur porte-parole.

Maximum 10 mg de plastique qui passent dans la viande par carrés de 10 cm sur 10 cm

Concrètement, comment ça marche ? La réglementation européenne dont ils parlent est la directive 2002/72. Elle stipule que "les matériaux et objets en matière plastique ne peuvent céder leurs constituants aux denrées alimentaires dans des quantités dépassant 10 milligrammes par décimètre carré de surface du matériau ou de l’objet". De plus, ces matériaux plastiques ne peuvent pas provenir de n'importe où. L'European Food Safety Authority (EFSA) évalue ceux-ci et dresse la liste des monomères et additifs autorisés pour la fabrication de ces plastiques.

Mais 10 mg/dm², ce n'est pas zéro. Du plastique se retrouve donc dans la viande. Cependant, l'Europe estime qu'il s'agit là d'un seuil en-dessous duquel il n'y a aucun risque pour notre santé. D'autant que ce seuil n'est pas forcément toujours atteint. Par exemple, les barquettes absorbantes que l'on trouve chez Colruyt ont été analysées pour la dernière fois en février 2015 par "le laboratoire Eurofins Hamburg", nous révèle Nathalie Roisin, pour des "résultats inférieurs à 2 mg/dm²".

Les fabricants et distributeurs font faire eux-mêmes les tests en laboratoire

Comment s'assure-t-on que les fabricants ne trichent pas ? Le contrôle du respect de la réglementation européenne n'est pas du ressort de l'Europe, mais de chaque État membre. En Belgique, c'est donc la compétence de l'Agence Fédéral pour la Sécurité de la Chaîne Alimentaire (AFSCA).

Stéphanie Maquoi, sa porte-parole, explique comment se déroulent les contrôles. C'est en fait comme pour la nourriture. Les matériaux qui entre en contact avec celle-ci sont soumis au même principe de précaution : l'autocontrôle. "Ce sont les opérateurs (fabricants, grossistes, distributeurs, …, ndlr) qui sont responsables de ce qu'ils mettent sur le marché et doivent faire tester leurs produits de manière régulière."

Les fabricants de coussins absorbants font donc tester ceux-ci "par des laboratoires accrédités". S'ils passent les tests, ils reçoivent alors un certificat Food Compliance. C'est ce certificat qui prouve que le produit respecte les normes européennes. Il est systématiquement demandé par l'AFSCA lors de ses contrôles, mais également par tous les maillons de la chaîne de distribution dont les magasins, qui pourraient en effet être tenus responsables d'avoir mis à disposition des consommateurs un produit qui ne respecte pas les normes en vigueur.

"Tous les emballages de nos produits de marque propre doivent être testés dans un laboratoire pour prouver qu’aucune substance néfaste ne migre vers des aliments. Les résultats de ces tests sont demandés systématiquement à nos fournisseurs ils sont ensuite évalués et enregistrés dans nos systèmes", détaille par exemple Roel Dekelver, porte-parole de Delhaize.

Si un coussin absorbant devait être dangereux, il serait retiré des rayons

L'AFSCA, de son côté, ne se contente pas de ce certificat. "Dans le cadre de notre mission de contrôle, on fait régulièrement analyser des échantillons en laboratoire", détaille Stéphanie Maquoi. Des tests inopinés, aléatoires, qui permettent de vérifier que le système d'autocontrôle fonctionne correctement.

Et lorsque l'AFSCA découvre un dépassement des normes, "le fabricant doit émettre un communiqué de presse pour alerter la population et leur demander de ne pas consommer le produit".

En résumé : tous les coussins absorbants que vous trouvez en supermarché en Belgique ont passé des tests qui prouvent qu'ils ne sont pas néfastes pour votre santé. Et si un jour l'un d'eux venait à rejeter trop de ses constituants dans la viande, il serait rappelé immédiatement et retiré des rayons.

À lire aussi

Sélectionné pour vous