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Symbole d'un certain retour à la normale après le confinement, le pape François s'est adressé dimanche pour la première fois depuis trois mois directement aux fidèles, qui peuvent désormais venir l'écouter en s'espaçant prudemment sur la place Saint-Pierre à Rome.
"Aujourd'hui que la place est ouverte, nous pouvons revenir, c'est un plaisir!", a lancé le pape argentin depuis une fenêtre du palais apostolique, saluant en contrebas plusieurs centaines de personnes dispersées sur l'immense place encerclée par les colonnades du Bernin, mais aussi par la police.
Ils étaient 1.500, estime le service de presse du Vatican, bien loin de l'affluence dix fois supérieure lorsque les touristes et pèlerins de la planète entière prenaient d'assaut le quartier. Mais entretemps, l'épidémie de coronavirus a durement éprouvé l'Italie, faisant plus de 33.000 morts, et le pays s'est confiné deux mois. La péninsule a entamé début mai son déconfinement et la situation se normalise lentement.
Micaela Testa, en tenue colorée et estivale de joggeuse, a joint le sport au spirituel. Elle a pris le bus depuis sa commune de Fregene sur le littoral romain, puis couru quatre kilomètres jusqu'à la place Saint-Pierre.
"C'est un moment où vous sentez que vous devez faire quelque chose, comme vous approcher de ce monument symbolisant la foi", confie-t-elle. "C'est aussi un moment où l'on se rapproche les uns des autres", ajoute-t-elle, persuadée qu'une solidarité nouvelle est née de la pandémie.
"Ayons le courage de changer, d'être meilleurs qu'avant et de pouvoir construire positivement l'après-crise de la pandémie", a d'ailleurs plaidé une nouvelle fois le pape, fermement engagé dans une bataille pour une société plus juste et à l'écoute des pauvres.
- "Réflexion sur l'avenir" -
Elisa Marzia Vitaliano, une directrice d'école, ne voulait pas manquer ce rendez-vous "hautement symbolique" vécu comme "un point de départ pour entamer une réflexion sur l'avenir". Cette inconditionnelle juge que ce pape "charismatique" a su soutenir les croyants à travers ses paroles et prières diffusées par internet durant le confinement.
Des interventions suivies jusqu'en Tanzanie, assure Herbert Mpwage, un étudiant tanzanien venu étudier la théologie à Rome. Le pape "donne de l'espoir" et dit que "la vie doit continuer", apprécie le jeune homme qui veut devenir prêtre.
Image lugubre qui restera dans les esprits: François était apparu fin mars sur une place Saint-Pierre déserte et balayée par la pluie pour présider une prière face à "la tempête" de la pandémie, en exhortant le monde "apeuré et perdu" à revoir ses priorités.
Dimanche, sous un soleil radieux, il a semblé savourer les retrouvailles, précisément le jour important de la Pentecôte, sans devoir parler à l'objectif d'une caméra comme il le faisait depuis le 8 mars. Pour autant, il ne devrait pas s'adonner de si tôt aux traditionnels bains de foule de l'audience du mercredi, ponctués d'embrassades et de milliers de poignées de mains sur la place.
L'Argentin Jorge Bergoglio a demandé dimanche à la foule de prier avec lui en silence pour "les médecins, volontaires, infirmières, tout le personnel sanitaire qui ont donné leur vie", qui méritent "gratitude" et "admiration".
"Soigner les gens est plus important que l'économie", a-t-il improvisé, suscitant une volée d'applaudissements.
- Pensée pour l'Amazonie -
En d'autres temps, le pape avait réuni en octobre dernier au Vatican un synode régional inédit consacré aux problèmes de l'Amazonie, avec 200 participants dont des prélats de la région et des représentants des peuples indigènes.
Dimanche, il s'est dit préoccupé pour ces populations "particulièrement vulnérables" face à la pandémie de Covid-19. "Il y a tellement de personnes contaminées et décédées", a-t-il regretté, jugeant que personne dans le monde ne devait être privée d'assistance.
Dans une homélie de la Pentecôte prononcée auparavant devant une cinquantaine de fidèles dans la basilique Saint-Pierre, le pape avait appelé les chrétiens à laisser de côté "égoïsme" et "pessimisme", pour affronter avec "unité" les conséquences de la pandémie.
Autre signe d'une normalisation, on pouvait croiser aussi dimanche des promeneurs non croyants, heureux de venir admirer la basilique sans faire la queue. Comme Javier Cerrato, un Espagnol vivant à Rome, qui espère néanmoins que les visiteurs étrangers reviendront, attirés par le pape et le Vatican, "des atouts touristiques".