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L'accord de la majorité des États membres de l'Union européenne sur une nouvelle politique européenne d'asile et de migration est "peu surprenant", mais pose "beaucoup de questions sur sa mise en œuvre" et "sur le plan éthique", estime Martin Deleixhe, professeur à l'Université libre de Bruxelles (ULB), spécialiste de la sociologie des migrations.
"Cet accord est très vague", constate-t-il. "Il y a une espèce de flou juridique qui permet de faire converger des positions très éloignées. Mais il reste encore beaucoup d'étapes avant que cette politique soit mise en œuvre." Notamment un passage devant le Parlement européen, "qui pourrait considérer que cet accord n'est pas respectueux des valeurs européennes", alors que les États européens "sont dans une logique répressive".
Martin Deleixhe rappelle qu'il "existait un accord de solidarité européen sur cette question de l'asile en 2015", mais "il n'a jamais été appliqué et a été sabordé par le groupe de Visegrád" (Hongrie, Pologne, Tchéquie et Slovaquie). La Pologne et la Hongrie n'ont d'ailleurs pas voté pour ce nouveau compromis, alors que la Slovaquie et la Tchéquie se sont abstenues, tout comme la Bulgarie, la Lituanie et Malte.
Selon le professeur, les 27 ont choisi de mettre en place "une solidarité qui se construit sur le dos des migrants".
Il s'inquiète de l'annonce selon laquelle un examen accéléré sera prévu aux frontières extérieures de l'UE. "C'est un risque énorme, cela peut mener à deux filières de traitement des dossiers et il y aura un danger d'erreurs judiciaires. Or, le droit d'asile est clair: tout le monde doit pouvoir bénéficier d'un examen individuel", rappelle-t-il. La question du paiement d'une compensation pour éviter d'accueillir des réfugiés est aussi "hautement problématique": "On met un prix sur l'accès à des opportunités fondamentales pour des personnes en précarité extrême", pointe Martin Deleixhe.